Ecrire son histoire et ses mémoires est beau et généreux. Faut-il encore savoir l'écrire et bien le transmettre. D'autant plus lorsque cette part d'histoire est étroitement liée à la grande histoire, celle de son pays… Dans «Un été colonial à Constantine», l'auteur, Abdelkader Jamil Rachi a réussi haut la main son défi authentique et précis. L'auteur convie le lecteur à le rejoindre dans un voyage unique, intemporel et d'une richesse époustouflante. Dans ce livre poignant, il invite le lecteur à découvrir le courage du peuple algérien dans sa lutte contre le colonialisme français, tout en se familiarisant avec des personnages aussi attachants que réels dans la ville de Cirta. Ancien enseignant à l'université de Constantine et directeur du département des langues vivantes étrangères, avant d'entamer une carrière diplomatique qui a duré 27 ans, Abdelkader Jamil Rachi a écrit ce livre pour décrire la société coloniale qu'il a connue en 1950. Le colonialisme L'auteur tenait, en effet, à mettre des mots forts sur le courage de la population algérienne et constantinoise en particulier, face au colonialisme français. Et pour ce faire, l'auteur a tenu à rester fidèle aux événements en les rapportant tels qu'ils sont ancrées dans sa mémoire. «Tous les gens qui liront mon livre et qui auront vécu cette période se retrouveront», dit-il dans son livre. Abdelkader Jamil Rachi évoque aussi dans son récit, la topographie de la ville de Constantine, chose qui ne laissera pas de marbre les amoureux de cette ville des ponts suspendus. En plongeant dans ce roman bien ficelé et au fil des pages, le lecteur découvre ainsi la vie au Vieux Rocher dans les années cinquante. Il y découvre aussi la société constantinoise de l'époque à travers les pérégrinations d'une bande d'amis des cours complémentaires du collège Jules Ferry. «A ce moment, c'est la fin de l'année scolaire et les jeunes adolescents en vacances s'apprêtent à vivre, comme d'habitude, un été caniculaire à Constantine. Cherchant alors une bonne occupation durant les vacances, et en ce temps de guerre, les échos des maquis qui parvenaient aux adolescents constantinois les arrachent fortement à leur torpeur pour les introduire dans un rythme infernal où se conjuguent la rage de vivre, les soucis de la vie quotidienne et les questionnements sur l'évolution des rapports entre les ‘indigènes' d'un côté et les Européens et les israélites de l'autre...». Histoires réelles Dans ce récit que l'auteur écrit «en devoir de mémoire», les personnages et les faits du livre, tous réels, évoluent dans un véritable microcosme. A travers une écriture saine et agréable, l'auteur réussit aisément à remettre au goût du jour certains souvenirs émanant de personnes qu'il a connues à Constantine, et qui ont embrassé la cause nationale sans hésitation aucune. L'auteur rend aussi hommage à sa mère et à toutes les femmes qui ont combattu aux côtés de leurs frères pour la libération de l'Algérie. Sont évoqués aussi dans ce livre les événements marquants qu'a connus la population de Constantine tels que ceux du 20 août 1955, l'évasion de Mustapha Ben Boulaïd, où encore la venue à Constantine du générale Charle de Gaulle. En somme, Un été colonial à Constantine de Abdelkader Jamil Rachi tend à familiariser le lecteur non seulement avec des personnages, mais également avec des lieux qui n'existent plus, à l'image du Casino de Constantine, ou encore du commissariat central. Un monde foisonnant qui fait ressurgir toute l'époque coloniale avec ses violences et parfois ses aspects positifs.