Le président du MSP, Abderrezak Makri, sera reçu aujourd'hui par Abdallah Djaballah, président du parti El Adala (Front pour la justice et le développement). Cette rencontre sera-t-elle le coup de grâce pour l'initiative de consensus national défendue par Makri ? Vu que le rendez-vous regroupe deux formations politiques du même courant, la suite que donnera le «cheikh» Djaballah, actuel doyen des islamistes, à l'offre que lui fera l'enfant de Mahfoud Nahnah, est déterminante pour la suite des événements, surtout que Makri n'a jusque-là enchaîné que des rejets. Pourtant, de retour à la dernière sortie du président du FJD à l'ouverture des travaux de l'université d'été de sa formation à Zeralda, on est tenté d'admettre qu'à la fin du rendez-vous Djaballah-Makri, le consensus recherché va partir en fumée. Dans son discours, Djaballah avait estimé que «l'issue» à la crise se situait dans «la révision de la loi électorale pour permettre une compétition transparente où le peuple choisira en toute liberté». De plus, il n'est pas question d'impliquer l'institution militaire, comme l'a suggéré Makri. Sa mission est définie dans la Constitution et il s'agit de «de sécuriser les frontières du pays, de veiller à garantir la paix et la stabilité». Ce qui tranche catégoriquement avec le projet du président du MSP. En effet, il paraît clair que Djaballah n'est pas un adepte de l'idée d'un candidat du consensus pour une période de transition. Aussi, il ne pourra pas cautionner une quelconque collaboration avec les partis du pouvoir, comme l'espère dans son imaginaire Makri. Des éléments qui plaident en faveur d'un rejet diplomatique, sinon d'un affront d'où Makri ne pourra pas se relever, car il n'y a pas pire que lorsque l'on est rejeté par sa propre famille. Le chef du MSP a déjà été déçu par certains responsables de parti de la mouvance islamiste. Dans la majorité présidentielle, Amar Ghoul, président de TAJ, s'est montré catégorique avec les concepts de transition et d'appel à l'Armée. Le seul point qu'il a dit avoir partagé avec le MSP était le constat sur la situation économique. C'est le cas aussi pour Abdelkader Bengrina, chef du parti El Bina, une formation d'obédience islamiste. Bengrina qui, à son tour, propose l'initiative de «consensus, l'Algérie pour tous», a montré beaucoup de divergences avec le président du MSP. Pire encore, El Bina est presque favorable à la réélection du président Abdelaziz Bouteflika pour un cinquième mandat. Ce que n'imagine pas, jusqu'à l'heure actuelle, Abderrezak Makri. A ceux-là s'ajoute la récente réaction de Mohamed Douibi, président du Mouvement Ennahda, qui a appelé à «éloigner» l'institution militaire du débat politique, accusant indirectement Makri de «vouloir replonger l'Algérie dans les années de la décennie noire». Pour Douibi qui n'a pas encore été consulté par le MSP, il est de l'intérêt du pays que l'ANP reste en dehors de la chose politique. Quant au mouvement El Islah de Filali Ghouini, il faut savoir qu'il a déjà annoncé qu'il soutiendra en 2019 «un candidat n'appartenant pas au parti, dans le cadre d'un partenariat politique national». Dans les coulisses, on parle d'un soutien à l'actuel chef de l'Etat, et si c'est le cas, il serait même inutile que Makri aille sonder Ghouini. C'est dire qu'en fin de compte, même les islamistes, censés soutenir Abderrezak Makri par esprit de solidarité et de fraternité, du moment qu'ils partagent la même idéologie, voire le même projet pour l'Algérie, lui tournent le dos. C'est sans espoir presque qu'il va aujourd'hui à la rencontre de Abdallah Djaballah. Ce dernier ne va rien inventer de plus. Seulement, il aura juste l'honneur, ou plutôt la responsabilité, de donner le coup de grâce à l'initiative de son «frère».