Dans cet entretien, le Pr Abdelkrim Chelghoum, président du Club des risques majeurs, et expert en génie parasismique et numérique sismologie, revient sur la situation catastrophique qu'ont vécue les populations de nombreuses régions, soit près de 28 wilayas, toutes touchées par des inondations, qui ont causé de nombreux décès et provoqué des pertes matérielles très importantes. Il évoque également la responsabilité des pouvoirs publics dans la prise en charge de ces populations. Le Temps d'Algérie : Plus d'une vingtaine de wilayas ont été touchées par les inondations ces dernières semaines. quelles mesures devrait prendre l'Etat ? Abdelkrim Chelghoum : Depuis le début des intempéries, 28 wilayas ont été inondées ; l'Etat demeure responsable de cette situation et doit faire une déclaration de l'état de catastrophe naturelle dans ces régions sinistrées. L'Etat n'a pas déclaré l'état de catastrophe naturelle. Comment expliquez-vous cet état de fait ? Pourtant, depuis la promulgation de la loi 04-20 de 2004, l'Etat doit appliquer la loi. Il est du devoir de l'Etat de déclarer l'état de catastrophe naturelle dans ces régions sinistrées pour indemniser les populations et surtout les victimes, et compenser les dégâts matériels très importants. A partir de quel seuil peut-on parler d'état de catastrophe naturelle ? A partir du moment où il y a des pertes humaines, d'importants dégâts matériels, que l'activité économique est interrompue dans ces régions, il est du ressort des autorités compétentes de déclarer l'état de catastrophe naturelle. Rien qu'à Constantine, 150 voitures ont été emportées, à Adrar, c'est l'hôpital qui a été inondé. Ce sont 26 ou 27 wilayas, précisément les chefs-lieux, qui ont été touchés et non pas des petits villages situés loin des chefs-lieux. Comment pourra-t-on situer les responsabilités, et quelle appréciation faites-vous de la commission mise en place par les pouvoirs publics ? Il faut mettre en place une commission d'enquête neutre, alors que celle qui a été installée est composée des responsables du ministère de l'Intérieur et de la wilaya, présidée par le wali. Le wali ne peut pas être neutre, ni les responsables du ministère de l'Intérieur. Les conclusions de cette commission d'enquête sont connues d'avance. Il n'y a pas que les dégâts matériels, les populations sont encore sous le choc… Effectivement, il faut signaler également que ces populations sont encore sous le choc, elles ont besoin d'une prise en charge psychologique. Il faut que la loi soit appliquée. La loi leur impose la responsabilité de les prendre en charge et de les indemniser. Les particuliers ne sont pas assurés, on n'a pas cette culture. L'Etat doit imposer aux citoyens de s'assurer comme ils assurent leur véhicule. Pourtant, des BMS ont été émis, et le ministère de l'Intérieur a affirmé que l'Office national de météorologie n'a pas donné des BMS précis. Qu'en pensez-vous ? La météo est hors jeu. L'ONM n'a rien à voir dans les catastrophes, la responsabilité incombe aux ministères de l'Intérieur et de l'Habitat.