Les services de sécurité, qui avaient déployé des véhicules 4X4 de la BRI et de la police judiciaire, pour tenter d'intimider les marcheurs en essayant de bloquer le début de la marche, ont dû céder devant la pression des marcheurs dont les rangs ont grossi à la vitesse de l'éclair. En effet, les véhicules de police stationnés un peu plus haut que le stade du 1er-Novembre, ont été ensuite déployés sur la route de l'université, où les partisans du Mouvement pour l'autonomie de la Kabylie formaient déjà leurs premiers carrés pour marcher. Sur place, nous avions remarqué la présence de Mokrane Aït Larbi, qui donnait des interviews pour des chaînes-télé présentes en force. L'apparition des éléments de la BRI et de la police munis de matraques, a été ressentie comme une provocation. Ils voulaient même former un cordon pour empêcher les marcheurs de s'ébranler. Ces derniers, qui portant des dizaines de drapeaux (celui du MAK) et des portraits de Ferhat Meheni, leurs rendaient la réponse en criant haut et fort : «on n'a pas peur de vos chars !» Eu égard à leurs slogans, ces derniers réclamaient l'indépendance de la Kabylie. Aucun autre slogan commémorant le double anniversaire n'a été scandé par les partisans du MAK. Entre-temps, les citoyens arrivaient en grand nombre sur les lieux. Très vite, ils ont déployé le drapeau national et le drapeau amazigh en grand nombre. La foule grossissait et les policiers étaient, pour ainsi dire, «noyés». Les marcheurs ont réussi à déjouer leur tentative de brancher, voire même d'en découdre. C'est alors que le premier carré s'est ébranlé aux cris de : «pouvoir assassin !», et «Ulac Smah ulac !». La foule prenait encore de l'ampleur, et les policiers ont dû se retirer et quitter les lieux sous les sifflements des manifestants. D'autres carrés de marcheurs se sont encore formés derrière ceux du Mak, et la marche a eu lieu. Si les partisans du MAK se sont contentés de scander leurs propres slogans tout au long de l'itinéraire, les autres ont rendu des hommages aux martyrs du printemps noir et à tous les militants de l'amazighité, de la liberté et de la démocratie. C'était l'esprit du 20 avril qui avait plané sur la capitale du Djurdjura, qui a arboré les couleurs vert, bleu, jaune et rouge. Des milliers et des milliers de drapeaux amazighs ont «fleuri», hier à Tizi Ouzou. Arrivés en face de l'hôpital, les marcheurs ont observé une minute de silence, et allumé des bougies à la mémoire des victimes du printemps noir 2001, dont les portraits ont été brandis par les manifestants, ainsi que des banderoles noires. Ils étaient donc plusieurs dizaines de milliers de marcheurs à prendre possession de l'itinéraire habituel, qu'ils empruntent depuis de longues années de lutte et de combat. Nous avons remarqué la présence de certains acteurs du printemps berbère de 1980, comme Mouloud Lounaouci, Arab Aknine, ainsi que Hend Sadi et la veuve du Rebelle, Nadia Maâtoub, qui a marché dans l'avant-dernier carré. Même l'esprit de Maâtoub Lounès était très présent. Des dizaines et des dizaines de portrait du rebelle étaient visibles. En somme, la commémoration de ce 39e anniversaire du double anniversaire du 20 avril 1980 et du printemps noir 2001 a été une grande réussite.