La rue a vibré, hier, dans la ville de Tizi Ouzou à l'occasion de deux marches organisées par le le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) et le Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK) pour célébrer le 36e anniversaire du Printemps berbère. Dès 9h, des grappes de personnes commençaient à affluer vers le point de départ des deux manifestations, devant le portail principal du campus universitaire de Hasnaoua. Les marcheurs du RCD se sont constitué en carrés à un intervalle de quelques mètres de ceux du MAK qui s'affairaient, eux aussi, à mettre le décor de leur action. Des portraits de Matoub Lounès, Mouloud Mammeri, des jeunes assassinés lors des événements de 2001 étaient accrochés à des véhicules en tête des deux marches. Puis, peu avant 11h, la marche du RCD a démarré en se dirigeant vers la montée du stade du 1er Novembre. Les marcheurs arboraient des drapeaux amazighs tout en brandissant des banderoles sur lesquelles étaient écrits les mots d'ordre de cette manifestation. «Pour une officialisation entière et effective de la langue amazighe» et «Corrigez l'histoire, l'Algérie n'est pas arabe», pouvait-on lire sur les étendards des marcheurs qui ont déployé également l'emblème national. La foule avançait ainsi, dans la sérénité, avec une prédominance remarquable de jeunes, dont Nassim Yaffa, coordinateur national de la jeunesse libre du RCD. Dans un autre carré, au milieu de la procession, on remarquait la présence des élus, des maires avec leurs écharpes, le président du parti, Mohcine Bellabas, ainsi que l'ancien leader de la formation politique, Saïd Sadi. La manifestation s'est poursuivie jusqu'à la placette de l'ancienne mairie où il y a eu des prises de parole. «Nous avons prouvé au pouvoir que nous sommes des gens civilisés», a lancé Ouahab Aït Menguellet, président de l'APC de Tizi Ouzou. Mohand Arezki Hamdous, président du bureau régional du RCD s'est félicité de la réussite de la marche qui a enregistré, a-t-il déclaré, une mobilisation grandiose. «Il y a toujours de la solidarité en Kabylie», a-t-il affirmé. De son côté Mohcine Bellabas n'y est pas allé avec le dos de la cuillère pour fustiger «le pouvoir qui a voulu manipuler l'opinion publique par la constitutionnalisation de tamazight. L'officialisation de cette langue doit être entière. La marche d'aujourd'hui a donné des messages de fraternité. Nous demandons aussi le départ du pouvoir en place», a-t-il martelé tout comme Ali Yahia Abdennour qui a exhorté la jeunesse à reprendre le flambeau du combat identitaire. L'autre marche s'est ébranlée, peu après 11h, pour suivre le même itinéraire. Les marcheurs ont déployé des portraits de Ferhat M'henni et le drapeau du MAK en criant, à gorge déployée «Kabylie autonome» et « Nous sommes des Amazighs». Au fur et à mesure que la procession avançait, d'autres personnes rejoignaient les carrés. Bouaziz Aït Chebib, président du MAK, exhortait, à l'aide d'un mégaphone, les marcheurs à marquer des haltes après avoir fait quelques dizaines de mètres. Devant le CHU Nedir Mohamed, sur la rue Lamali, les manifestants ont observé une minute de silence à la mémoire des martyrs du Printemps noir. «On ne doit pas oublier ces 126 jeunes tombés sous les balles assassines des gendarmes», a lancé un militant du MAK avant que la foule ne continue sa marche vers le rond-point Djurdjura où elle s'est rassemblée pour ensuite se diriger vers la place Slimane Azem, en contrebas du stade 1er Novembre. Hocine Azem, membre du MAK, a déclaré que «malgré la répression du pouvoir, les citoyens ont répondu favorablement à l'appel du MAK. Il y a d'anciens délégués du mouvement citoyens des archs, des chanteurs, des comédiens ainsi que des militants mozabites, des étudiants et d'anciens détenus d'Avril 1980 qui ont pris part à notre manifestation qui se veut aussi une grande action de solidarité en faveur du docteur Fekhar et ses codétenus toujours emprisonnés à Ghardaïa», a-t-il ajouté. Notons que les deux marches se sont déroulées dans le calme, sans le moindre incident, et qu'un hélicoptère de la police survolait la ville de Tizi Ouzou durant les marches.