La sortie virulente de Patrice Evra tombe au plus mauvais moment et plonge la Fédération française de football (FFF) dans l'embarras, juste avant les barrages (15 et 19 novembre) qualificatifs pour le Mondial-2014. En dehors du terrain, l'image des Bleus n'avait pas besoin de ça et, sur le terrain, une suspension éventuelle du joueur, titulaire en défense et leader dans le vestiaire, serait problématique en vue des barrages. Knysna ressuscite après une belle parenthèse sportive Un récent sondage BVA pour Le Parisien-Aujourd'hui en France avait établi que 82% des Français avaient une "mauvaise opinion" des Bleus. Cette mauvaise image des Bleus est clairement due aux polémiques liées à la dernière Coupe du monde en Afrique du Sud en 2010, 76% des personnes interrogées reconnaissant avoir "encore à l'esprit" l'affaire du bus de Knysna (grève des joueurs à l'entraînement) quand ils pensent à l'équipe de France. Mais les joueurs français avaient réussi à montrer une belle image sur le terrain, avec 13 buts inscrits pour trois victoires toutes compétitions confondues lors de leur trois derniers matches. Karim Benzema, chambré par le public au Parc des Princes alors qu'il venait de mettre fin à 1222 minutes sans but en Bleu, s'était montré beau joueur et avait finalement récolté des applaudissements en fin de match contre l'Australie en amical le 11 octobre. Et voilà que la diffusion dimanche d'une interview d'Evra datant du mardi 15 octobre, après une victoire 3-0 contre la Finlande en qualification pour le Mondial-2014, vient de nouveau brouiller l'image publique des Bleus. Le défenseur de Manchester United, qui y traite quatre consultants (Luis Fernandez, Bixente Lizarazu, Rolland Courbis et Pierre Ménès) de "clochards" et de "parasites", entre autres, ressuscite les fantômes de Knysna. Evra a obtenu l'inverse de ce qu'il cherchait, puisqu'il accusait ces consultants de raviver artificiellement les plaies de la fameuse grève en Afrique du Sud. Ainsi, les images d'archives qui tournent désormais sont celles d'un Evra, alors capitaine des Bleus, qui s'embrouille avec le préparateur sportif de l'époque, Robert Duverne, qu'il vient d'informer de la volonté du groupe de faire grève de l'entraînement ce fameux 20 juin 2010. Une suspension serait problématique sportivement La FFF, qui fait de l'image des Bleus et de leur communication une priorité, a logiquement convoqué (à une date qui n'est pas précisée) le joueur de ManU pour s'expliquer devant le président de la "3F" Noël Le Graët et le sélectionneur Didier Deschamps. Ces deux derniers étaient présents lundi au tirage au sort des barrages au siège de la Fifa à Zurich. Ils comptaient à l'origine ne parler que du terrain: c'est raté. La question est de savoir si Evra peut être suspendu pour ces fameux barrages. Si c'est le cas, il faudra prendre en compte le passif du joueur, sanctionné de cinq matches de suspension en Bleu après les évènements du Mondial-2010. Une suspension d'Evra (52 sélections) poserait d'abord un problème sportif. L'ancien joueur de Monaco a montré sur les derniers matches d'octobre qu'il restait au dessus de son concurrent Gaël Clichy dans la hiérarchie au poste de latéral gauche. Les alternatives ne sont pas légion. Lucas Digne, champion du monde des moins de 20 ans cet été, et titulaire à ce poste avec les Espoirs, n'a joué que 270 minutes cette saison avec le Paris SG, seulement en championnat, barré par la concurrence du Brésilien Maxwell chez les champions de France en titre (829 minutes jouées en Ligue 1 et Ligue des champions). Il ne faut pas négliger non plus le poids d'Evra dans le vestiaire. De nombreux joueurs français avaient insisté sur le rôle de leader et le discours remobilisateur tenu par Evra à la mi-temps de Bélarus-France (victoire 4-2), alors que les Bleus étaient menés 1-0 à la mi-temps et que le capitaine Hugo Lloris, peu expansif en temps normal, était en train de livrer un de ses plus mauvais matches. Comment réagira le groupe bleu si Evra, très apprécié du leader technique français Franck Ribéry, est suspendu pour les barrages ?