Les «Amis de la Syrie» ont pressé hier à Londres l'opposition syrienne, qu'ils soutiennent, de participer à de futures négociations de paix à Genève même si le président Bachar Al Assad refuse de démissionner. Pour se rendre dans la ville suisse, les opposants en exil de la Coalition nationale syrienne (CNS), principaux interlocuteurs des «Amis de la Syrie», exigent toujours que le régime d'Al Assad ne participe plus à la vie politique en Syrie dans la période de transition et à l'avenir. Les Etats-Unis et la Russie se sont mis d'accord en mai sur une nouvelle conférence internationale consacrée à la Syrie, un «Genève II» après la réunion de l'an dernier qui n'avait pas abouti. Depuis mars 2011, le conflit syrien a fait plus de 100 000 morts et des millions de réfugiés. Le chef de la Ligue arabe, Nabil Elarabi, a parlé du 23 novembre comme date de la conférence des pourparlers. Renforcé par ses succès militaires de ces derniers mois et par l'influence de plus en plus évidente des groupes djihadistes dans les combats, Bachar Al Assad s'est montré confiant lundi soir dans une interview à la chaîne de télévision panarabe Al Mayadine. Il n'a dit voir «aucun obstacle» pour qu'il se représente l'an prochain à la présidentielle et s'est montré sceptique sur la tenue d'une réunion internationale à Genève. «Pour l'instant, il n'y a pas de date fixée (...) et les développements actuels ne sont pas favorables», a-t-il dit, évoquant «de nombreuses questions relatives à cette conférence qui restent en suspens». Accueillant la réunion des «Amis de la Syrie» (Allemagne, Arabie saoudite, Egypte, Emirats arabes unis, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Italie, Jordanie, Qatar et Turquie), le secrétaire au Foreign Office, William Hague, a jugé essentiel que l'opposition accepte de se rendre sur les bords du lac Léman. Si les opposants «ne participent pas au processus de paix, alors les Syriens ne pourront plus choisir qu'entre Assad et les extrémistes», a dit à la BBC le chef de la diplomatie britannique. «Plus le conflit dure, plus il devient communautaire et plus les extrémistes prennent le dessus», a-t-il ajouté. Avant le début des discussions dans la capitale britannique, le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, a rencontré Ahmad Jarba, qui dirige la CNS. Rien n'a filtré de cet entretien. Pour lui, l'opposition syrienne risque de perdre toute crédibilité si elle se plie aux pressions internationales et va à Genève sans avoir obtenu la fin du régime. «Personne ne peut croire que l'opposition acceptera de voir Bachar Al Assad participer à un éventuel futur gouvernement de transition. Si Bachar pense régler les problèmes en se présentant l'an prochain à la présidentielle, je peux lui dire que cette guerre n'aura pas de fin», avait auparavant déclaré John Kerry. A Londres, les «Onze» doivent discuter de l'ordre du jour de Genève II et trouver les moyens de convaincre l'opposition syrienne d'y participer. L'éventuelle participation à cette conférence internationale de l'Iran sera également débattue. Sur le terrain, l'opposition syrienne s'est profondément divisée ces derniers mois. Des combats ont récemment opposé près de la frontière turque l'Armée syrienne libre (ASL) aux djihadistes de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL), la branche locale d'Al Qaïda, et à leurs alliés syriens du Front Al Nosra. L'Otan préoccupée par un éventuel retour d'extrémistes en Europe Dans ce contexte, l'Otan s'est dite hier préoccupée par la croissance d'éléments radicaux au sein de l'opposition syrienne et par leur possible retour en Europe. «Cela concerne particulièrement des jeunes qui participent aux combats aux côtés de l'opposition et qui pourraient rentrer dans les pays européens. Certains d'eux adoptent des points de vue radicaux et cela nous préoccupe. Nous surveillons de près la situation», a indiqué le secrétaire général de l'Alliance Anders Fogh Rasmussen lors d'un entretien avec des journalistes russes à la veille d'une réunion des ministres de la Défense des pays membres de l'Alliance atlantique et de celle du Conseil Russie-Otan. M. Rasmussen a fait remarquer que ces derniers temps, des groupes extrémistes de plus en plus nombreux rejoignaient l'opposition syrienne, «ce fait mettant en valeur la nécessité d'un règlement politique en Syrie, car il n'y a pas de solution militaire à ce conflit».