Un ouvrage collectif intitulé «Les mouvements amazighs en Afrique du nord», consacré à l'étude du mouvement amazigh en Algérie, au Maroc, en Tunisie, en Libye et en Egypte, a été publié récemment sous la direction de l'universitaire algérien Nacer Djabi. Cet ouvrage de 358 pages publié aux éditions Chihab est la première étude universitaire consacrée à ce mouvement et qui rassemble les écrits de plusieurs sociologues, anthropologues ou encore politologues sur des échantillons provenant de neuf régions des pays en question restées amazighophones dans leur quotidien. Composé de plusieurs études réparties en plusieurs chapitres, l'ouvrage met la lumière sur moult interrogations historiques Dans le chapitre qui compose la première étude intitulée «Le mouvement culturel amazigh au Maroc : le processus d'une transformation, le cas du Rif et du Moyen Atlas», ce sont des sociologues marocains, Harrami Noureddine et Khalid Mouna, coordonnée par Driss Benlarbi, chercheurs qui fournissent une «cartographie des locuteurs des langues berbères» ainsi que des indicateurs socio-économiques des régions amazighophones. Cette partie de l'étude considère que cette composition ethnolinguistique de la population est l'objet d'enjeux politiques et identitaires ayant profondément marqué la construction antagoniste de l'histoire du Maroc. L'évolution du mouvement amazigh au Maroc renseigne sur l'utilisation de cette question comme un vecteur de division depuis la loi coloniale de 1930, avant la naissance dès les années 1970 d'une forme d'organisation centrée sur l'identité amazighe et les droits culturels jusqu'à la consécration de la question linguistique dans la constitution de 2011 marquant la rupture avec la prudence et le passage de l'Etat marocain à un statut d'acteur de l'amazighité. «Le mouvement amazigh en Algérie et défis d'intégration nationale», une étude menée par les chercheurs Dida Badi, Nouh Abdallah et Samir Larabi, remonte à l'émergence de la question amazighe en 1949 dans la foulée du mouvement nationaliste indépendantiste (…) en réaction, par certains militant du PPA, à un rapport sur l'Algérie présenté aux Nations unies par Messali Hadj (…) qualifiant le pays de Etat arabo-musulman. Cette question a été gelée avec le déclenchement de la guerre de libération, et le déni de la spécificité linguistique et culturelle amazighe se poursuit après l'indépendance du pays, rapporte cette étude, qui remonte le fil des événements jusqu'au tournant du printemps berbère en 1980, puis du printemps noir de 2001. L'étude s'intéresse également aux répercussions du printemps berbère sur la vallée du M'zab et la région Touareg, avec la réhabilitation des variantes targuie et mozabite de la langue, ainsi qu'à d'autres faits sociaux dans ces régions comme l'émigration et la place de la femme dans la société. Les chercheurs tunisiens Asma Nouira, Houaida Ben Khater, et Mohamed Kerrou, auteurs de l'étude «La question amazigh en Tunisie : héritage, renaissance et résistance», rapportent que la question amazigh a émergé en Tunisie avec la révolution de la dignité qui a entraîné en 2011 la chute du régime de Zine El Abidine Ben Ali. Les événements ayant secoué plusieurs pays arabes en 2011 ont également conduit à une évolution notable de la question Amazigh en Libye, suite à la chute du régime de Kadhafi et des forces de répression du pouvoir central qui ont longtemps attisé la division des Amazighs du nord (principalement établis dans les villes de Djbel Nefoussa, Zouara et Tripoli) et les Touaregs dans le sud, rapporte une étude signée Dida Badi et Bilal Abdallah. Il est fait état du même constat concernant l'oasis amazighophone de Siwa en Egypte (820 km à l'ouest du Caire), une région touristique qui compte plus de 32 000 habitants répartis sur onze tribus. Les travaux de recherche publiés dans cet ouvrage ont été réalisés grâce à une subvention du Centre de recherche pour le développement international (Crdi) au Canada.