Une indescriptible marée humaine a déferlé dans les rues de toutes les villes de l'Est du pays, aussitôt après le coup de sifflet final de l'arbitre sénégalais Badara Diatta, officialisant la victoire de l'Algérie sur le Burkina Faso (1-0) et la qualification des Fennecs pour le mondial brésilien. La liesse populaire observée à Constantine, mais aussi à Sétif, Batna, El Tarf, Annaba, Skikda, Jijel, M'sila, Biskra ou encore Bordj Bou Arreridj, n'avait d'égale que l'angoisse qui a étreint, 90 minutes durant, des dizaines de millions d'Algériens scotchés devant leur téléviseur. La fête semble bien partie pour durer une bonne partie de la nuit. Cortèges de voitures klaxons au vent, carrousels de motos, de camions, de minibus, voire de tracteurs dans certaines localités rurales sillonnent sans discontinuer toutes les cités urbaines, créant une ambiance de "folie". Dans la nouvelle ville Ali-Mendjeli, où les défilés de voitures recouvertes de l'emblème national sont déjà visibles depuis plusieurs jours, le climat d'allégresse est monté de plusieurs crans, donnant parfois lieu à des scènes plutôt saugrenues, proches de la transe. L'exemple de ce jeune homme d'une vingtaine d'années, se roulant, au centre de l'agglomération, sur l'asphalte mouillé par la pluie, torse nu malgré le froid, serrant contre lui un drapeau et hurlant de toutes ses forces, est édifiant quant à l'exaltation ambiante. Le centre de Constantine, notamment le boulevard Khemisti (ex-St-Jean) et la Place du 1er-Novembre (ex-La brèche), est noir de monde. Hommes, femmes, enfants et même des vieillards, crient leur allégresse sous des centaines de drapeaux accrochés aux balcons des immeubles. Adnane (25 ans) a du mal à contenir son enthousiasme. Montrant des ongles rongés jusqu'au sang, il avoue avoir eu "peur, très peur pendant le match" et craint le pire à chaque offensive des burkinabé, il a même failli tomber dans les pommes lorsque le cuir heurta le poteau de Zemmamouche. Mais "el hamdoullah on a gagné et c'est nous qui irons au pays de la samba", lance-t-il au comble du bonheur. A Sétif, une ambiance tout aussi survoltée marque la cité de Sid-El Khier, en particulier aux abords de la place où trône la statue d'Ain El Fouara, littéralement prise d'assaut. Chants à la gloire des verts, youyous fusant des balcons et milliers de "one, two, three, viva l'Algérie" s'associent pour faire la fête et célébrer la qualification de l'équipe nationale de football pour sa seconde phase finale de coupe du monde consécutive et sa quatrième de l'histoire. Comme dans toutes les autres villes du pays, d'interminables cortèges de voitures, klaxons à fond, parcourent les différentes cités et quartier de la ville chère au regretté Abdelhamid Kermali, comme pour inviter leurs habitants adeptes du "cocooning" à se joindre aux réjouissances qui, là encore, pourraient durer une grande partie de la nuit pourtant glaciale de la capitale des Hauts plateaux. A Jijel, où règne une ambiance tout aussi euphorique, les regards sont irrémédiablement attirés par des groupes de jeunes africains subsahariens (du Mali et du Niger, notamment), partageant la joie des supporters algériens et exécutant des pas de danse propres à leur pays. Le hurlement des sirènes des navires mouillant au port ou en rade, qui participent eux aussi à la fête, ne parvient pas à couvrir les cris de joie de milliers de supporters munis d'autant de drapeaux algériens. L'excitation étant parfois synonyme de démesure, Islam, un jeune jijélien de 20 ans, veut maintenant voir l'équipe nationale se hisser jusqu'aux demi-finales du mondial brésilien. Rien moins que cela.