Les islamistes au pouvoir en Tunisie et l'opposition laïque se sont mis d'accord pour nommer l'actuel ministre de l'Industrie, Mehdi Jomaa, au poste de Premier ministre d'un gouvernement intérimaire chargé de préparer de nouvelle élections, ont annoncé samedi les médiateurs. Ils ont ainsi confirmé une information que Reuters avait obtenue auparavant de trois sources. Mehdi Jomaa, ingénieur aéronautique de formation, est censé prendre la tête d'un cabinet apolitique chargé d'expédier les affaires courantes jusqu'au scrutin qui devrait avoir lieu début 2014. Le choix du successeur d'Ali Larayedh à la tête du gouvernement s'inscrit dans le cadre d'un accord plus large conclu jeudi, qui doit conduire le parti Ennahda, considéré comme une formation islamiste modérée, à rendre le pouvoir d'ici quelques semaines pour mettre fin à la crise politique. Les discussions entre Ennahda et l'opposition ont eu lieu sous l'égide de la puissante centrale syndicale UGTT. "Malgré les difficultés, nous sommes parvenus à un accord sur le nom de Mehdi Jomaa. Le prochain gouvernement doit être indépendant et apolitique pour conduire le pays vers les élections", a annoncé Hussein Abassi, secrétaire général de l'organisation. LE RÔLE DE L'ISLAM La crise qui couve depuis la "révolution de jasmin" de janvier 2011, tourne notamment autour du rôle de l'islam dans la sphère politique. Après plusieurs semaines de discussions infructueuses, le dialogue national entamé pour sortir le pays de l'impasse politique a été suspendu le 4 novembre faute d'accord sur le nom du Premier ministre. L'UGTT a ensuite fixé au 14 décembre la date limite des discussions sur le nom d'un Premier ministre. Ennahda, qui s'est heurté à une vive hostilité de certains de ses rivaux laïques, a donc accepté de céder le pouvoir une fois que la classe politique aura désigné un cabinet de transition, achevé la rédaction d'une nouvelle Constitution et fixé une date pour des élections. Les tensions entre islamistes et laïques, exacerbées cette année par les assassinats de deux figures influentes de l'opposition, menaçaient de faire échouer la transition démocratique près de trois ans après la chute de Zine ben Ali. En février, le meurtre de l'opposant Chokri Belaïd avait donné lieu à de grandes manifestations à Tunis et à une crise gouvernementale. Celui de Mohamed Brahmi, fondateur du Mouvement du peuple (Echaâb) et élu de l'Assemblée nationale constituante (ANC), en juillet, a encore accentué les antagonismes.