Samsung Electronics a réalisé des bénéfices inférieurs aux attentes au quatrième trimestre 2013 après avoir distribué l'équivalent d'un milliard de dollars de primes à ses salariés pour marquer le 20e anniversaire de sa transformation en géant mondial de l'électronique grand public. Le groupe sud-coréen, premier fabricant mondial de smartphones, a choisi de puiser dans sa trésorerie pour récompenser son personnel, deux mois après avoir déçu ses actionnaires en augmentant son dividende moins qu'espéré. L'entreprise a estimé mardi son bénéfice opérationnel à 8.300 milliards de wons (5,7 milliards d'euros) au quatrième trimestre, en baisse de 6% sur un an et de 18% par rapport au résultat record du troisième trimestre. Ce chiffre, inférieur aux plus estimations les plus pessimistes des analystes interrogés par Reuters, serait le plus bas depuis les 8.100 milliards de wons du troisième trimestre 2012. Le résultat a été amputé par des primes distribuées au personnel à l'occasion du 20e anniversaire du lancement de la stratégie de "New Management" par le président Lee Kun-hee, qui a transformé le groupe en géant mondial du high tech. Selon les analystes, ces bonus, distribués à tous les échelons et également dans les filiales à l'étranger, ont peut-être atteint les 1.000 milliards de wons, soit bien plus que les 300 à 700 milliards qu'ils envisageaient auparavant, un montant qui correspondrait à un bonus moyen de 4.000 dollars (2.930 euros) pour chacun des 240.000 salariés du groupe. Après avoir succédé en 1987 à son père à la tête de Samsung Group , Lee avait en 1993 ordonné à ses lieutenants de "tout changer sauf de femme et d'enfants" afin de transformer Samsung Electronics, jusque-là un fabricant de téléviseurs sans prétention, en leader mondial de l'électronique grand public. Le groupe a depuis supplanté Sony dans les téléviseurs, Nokia dans les téléphones mobiles et Apple dans les smartphones. Il est de tradition en Corée du Sud de compléter les salaires par des primes corrélées aux performances mais dans le cas de Samsung cette politique irrite les investisseurs. "Nous n'avons rien contre les versements de bonus aux salariés mais les actionnaires devraient en avoir autant", tempête ainsi Mark Mobius, président exécutif de Templeton Emerging Markets Group. "Ils devraient marquer l'événement avec un gros bonus et aussi une hausse du dividende, ce qui peut encore arriver." La politique de redistribution prudente du groupe explique en grande partie que son cours de Bourse ait reculé en 2013 pour la première fois en cinq ans en dépit d'un bénéfice opérationnel estimé en hausse de 28% au record de 36.800 milliards de yens. APPLE MENACE EN CHINE Les résultats du quatrième trimestre ont aussi probablement pâti d'une baisse des parts de marché des smartphones de Samsung aux Etats-Unis et au Japon pendant la période de Noël, au profit de l'iPhone d'Apple. Le groupe a estimé son chiffre d'affaires trimestriel à 59.000 milliards de wons, alors que le consensus établi par Starmine, filiale de Thomson Reuters, était de 61.000 milliards. Pour Samsung, présent dans les smartphones depuis 2007, la concurrence devrait être encore plus rude en 2014 puisqu'Apple pourra commencer dès le 17 janvier à écouler des iPhone en Chine via China Mobile, le premier opérateur télécoms chinois dont Samsung est partenaire depuis sept ans. Apple devrait également lancer à l'automne prochain des smartphones avec des écrans plus larges, venant ainsi concurrencer le Galaxy Note lancé fin 2011. "Même en tenant compte des primes, le résultat trimestriel est plus faible qu'attendu. Samsung n'a pas fourni de détail mais peut-être que les smartphones ont fait moins bien que prévu à cause d'une hausse des de coûts de marketing", commente Lee Seung-woo, analyste chez IBK Investment & Securities. Les appareils mobiles représentent les deux tiers environ du bénéfice opérationnel de Samsung et sont aussi le principal débouché, avec les téléviseurs, de sa division d'écrans. Le groupe publiera ses résultats définitifs le 24 janvier. A la Bourse de Séoul, le titre a fini en baisse de 0,23% à 1.304,00 wons dans un marché en hausse de 0,32%. L'action a chuté de 10% sur les 15 derniers jours, tombant la semaine dernière à un plus bas de quatre mois qui représentait une baisse de capitalisation de 19 milliards de dollars - l'équivalent de la valeur boursière de Sony. Ce mouvement vendeur brutal a été motivé par des révisions en baisse des estimations des analystes pour le quatrième trimestre et par l'appréciation du won face au dollar, qui réduit la valeur des bénéfices rapatriés.