«C'est un 36, il est plus dangereux que les 41 et les 12 réunis, il faut serrer à droite et ralentir au maximum quand on croise ou quand on est sur le point d'être dépassé par cette espèce d'excités, on ne sait jamais...» C'est là l'une des nombreuses remarques que l'on entend souvent dans la région de Annaba en évoquant les excès de conduite et notamment les accidents, souvent mortels qui en résultent.36, 41 et 12 ne sont que les indicatifs des wilayas d'El Tarf, de Souk Ahras et de Tébessa où sont immatriculés les véhicules taxés par la vox populi, à tort ou à raison, d'extrêmement dangereux. Dans l'imaginaire du citoyen, on fait allégrement l'amalgame entre l'intitulé de la plaque minéralogique du véhicule et le niveau de maîtrise, en matière de conduite automobile, de celui ou celle qui est au volant.Une sorte de «délit de faciès» qu'il est difficile de contrer par un argumentaire objectif. Difficile en effet de convaincre celui qui pense que les conducteurs résidant dans les grandes villes sont plus chevronnés que ceux des wilayas de l'intérieur.
Absence de statistiques détaillées Ceci d'autant plus que l'on ne dispose d'aucune statistique suffisamment détaillée pour déterminer si le code de la route est mieux observé par les uns que par les autres. On sait par contre, selon le bilan de l'année 2008, qu'au niveau de la wilaya de Annaba, la RN44, qui mène à Constantine et Skikda, est de loin plus meurtrière que la RN16, par exemple, avec une moyenne de deux accidents par jour et autant de pertes en vies humaines et autres polytraumatismes. Deux fois plus de dégâts que sur l'axe routier reliant la ville métropole de l'extrême est, qu'est Annaba, à Souk Ahras et Tébessa. Un axe routier qui n'en est pas moins considéré à risque aux yeux des services de police et de gendarmerie, lesquels ont multiplié les contrôles à hauteur des tronçons propices aux excès de vitesse depuis le début de l'année. Ainsi on a pu constater une présence plus accrue des brigades mobiles de gendarmerie et de la police routière ainsi que des détecteurs radars disposés indifféremment sur des véhicules banalisés ou à même les arbres longeant cette voie. «On ne fera jamais assez pour endiguer le phénomène de l'inobservation des règles de conduite automobile, se désole M. Méchai, directeur d'une auto-école à Sidi Amar. Les chauffards sont si nombreux qu'on en est à se demander s'ils retiennent un tant soit peu de ce qu'on leur a appris avant qu'ils ne décrochent le permis». Et d'affirmer: «Tout le monde sait que la plupart des accidents mortels sont dus à l'excès de vitesse, aux dépassements dangereux, si ce n'est à des refus de priorité. Les 3 accidents de bus à proximité de Azzaba, en février dernier, qui ont coûté la vie à une vingtaine de personnes, ne semblent pas avoir impressionné les chauffards». Même sentiment de dépit chez cet officier de la police routière, lequel se demande de son côté si les dispositifs lourds mis en place pour obliger les automobilistes à se conformer aux prescriptions de prévention routière, sont suffisants. «Je suis bien placé pour savoir que souvent, trop souvent peut-être, nos agents procèdent à des retraits de permis aux inconscients qui écument nos routes, mais en vain. Les gens récidivent et persistent à faire les fous au volant. Faut-il penser à des mesures plus répressives ? Je ne sais franchement pas ce qu'il faut faire...», dira-t-il avec un geste de lassitude.