Le docteur Ahmed Bendifallah, spécialiste dans les laboratoires de contrôle antidopage, ex-vice-président du Comité olympique algérien et ancien président de la Fédération algérienne d'haltérophilie, demande à ce que soient instaurés en Algérie des contrôles antidopages lors de chaque compétition nationale. Les gens parlent de dopage, mais la majorité ne connaît pas réellement la dangerosité de ces produits prohibés ; comment définissez-vous ce thème ? Le dopage est l'utilisation de substances ou tout moyen destiné à augmenter artificiellement le rendement en vue ou à l'occasion de compétitions, ce qui peut porter préjudice à l'éthique sportive et à l'intégrité physique et psychique de l'athlète. Il y a divers moyens de dopage, allant de la méthode physique comme l'électrostimulation, l'autotransfusion, le caisson hyperbare, aux méthodes pharmacologiques. Parmi celles-ci les hormones stéroïdes androgènes (testostérone, nandrolone), l'hormone de croissance, les tranquillisants, les stimulants, les corticoïdes, l'EPO, les diurétiques et produits masquants, et les méthodes génétiques. Tous ces produits, qui à l'origine étaient destinés à un usage thérapeutique, sont ainsi détournés de leur vocation première et administrés à des personnes saines, en vue d'augmenter leurs capacités physiques et sensorielles. Et quels sont leurs méfaits ? On ne dispose pas d'études scientifiques et médicales suivies dans le long terme et sur des populations importantes de sportifs dopés, qui permettraient d'établir formellement une relation précise entre le recours à une forme de dopage et les pathologies spécifiques. Mais leur côté destructeur est prouvé scientifiquement, non ? Absolument, l'autotransfusion, par exemple, peut être très mal supportée et s'accompagner d'infections et de réactions pathologiques diverses si elle est pratiquée en dehors d'un contexte médical sérieux. Même contrôlée médicalement, cette pratique est dangereuse et à l'origine d'accidents circulatoires graves. Il y a aussi les sédatifs (bêtabloquants), les produits d'éveil (amphétamines) ou les corticoïdes qui comportent des risques physiques immédiats (problèmes cardiaques, vasculaires, respiratoires, digestifs, neurologiques ou psychiques) et peuvent engendrer des effets de diminution des défenses immunitaires, d'accoutumance et de dépendance aux conséquences lourdes. Quelles sont les conséquences que peuvent engendrer tous ces produits dopants à moyen et long termes ? L'administration prolongée d'hormones (EPO, hormone de croissance, stéroïdes anabolisants) entraînent des lésions tendineuses, des claquages physiques ou psychiques chez les adultes, des troubles du métabolisme du calcium, des anomalies de la croissance chez les jeunes sujets. Plus gravement, il y a des accidents cardiaques et circulatoires, des insuffisances rénales et hépatiques, des cancers, une impuissance ou une stérilité, des troubles de la grossesse et une atteinte du fœtus chez les femmes. Les traitements sont d'autant plus dangereux qu'ils associent des médicaments de nature différente qui potentialisent au niveau des effets. Et quid du dopage chez nous ? La réalité algérienne est que les gens consomment des produits illicites en toute impunité vu qu'il n'y a pas de sanctions, du fait que le contrôle antidopage est quasi inexistant chez nous. Il est inadmissible qu'il n'y ait pas de contrôle antidopage dans les différentes compétitions nationales. Les compétitions engagent l'avenir de l'entraîneur et de l'encadrement au sein du club. Certains encadreurs véreux se permettent de donner n'importe quoi à l'athlète sans se préoccuper de son avenir ni de sa santé, pour peu que ce dernier réalise une bonne performance, ce qui explique le décalage des performances réalisées par nos athlètes en Algérie et à l'étranger. Pour diminuer cette pratique malsaine qui a tendance à prendre des proportions inquiétantes dans notre pays, il faut instaurer des contrôles antidopages systématiques lors de chaque compétition nationale. Mais a-t-on les moyens pour le faire ?