Les affrontements se poursuivent à Ghardaïa, allongeant une déjà trop longue liste de victimes. Cette fois, de graves incidents ont été enregistrés dans la nuit de vendredi entre des jeunes et les éléments de la force publique, dans le quartier de Chaâba. Les affrontements se sont poursuivis jusqu'à 5h du matin, 30 personnes ont été arrêtées dont des mineurs et 7 policiers ont été blessés. Alors que le pire a été évité après la prière du vendredi à El Hofra, suite à l'appel lancé sur les réseaux sociaux, invitant les fidèles à prier dans la mosquée Khaled Ibn El Walid, des individus présentés comme étant des ibadites de différents quartiers ont, selon des sources locales, cherché à «prendre revanche» sur les fidèles ayant répondu à cet appel, en s'attaquant la nuit à Chaâba, une localité habitée par, notamment, des malékites. Une unité des forces de l'ordre public, positionnée dans ce quartier à minorité arabe, a été attaquée vers 00h45 par des jets de pierres et de pièces métalliques. «Ces provocations venaient du côté ibadite», nous a assuré une source sécuritaire. Sur place, nous avons découvert un décor de guerre. Les éléments de la police tentaient de repousser ces attaques. Prenant position sur les toits des maisons mozabites, les assaillants utilisaient toutes sortes d'armes. Les policiers ont, malgré leurs grands efforts, trouvé des difficultés à les repousser. Ces personnes qui étaient au nombre de 500 sont venues d'El Oued, confient des sources locales, où elles se regroupent toujours avant d'attaquer un quartier à population arabe, utilisent les techniques de guerre des milices libyennes, comme constaté sur place. «Ils ont coupé l'électricité et lancé des gaz lacrymogènes sur le véhicule de police», assure cette nuit un jeune du quartier. Il ajoute que «c'est leur méthode de guerre». Ces bandits avançaient en se barricadant derrière des portes en fer afin qu'ils ne puissent pas être atteints par les gaz lacrymogènes lancés par la police. Les Mozabites, sur les toits, utilisant des projecteurs, étaient en position de force. «La souricière a réussi». 7 policiers blessés ont été transportés à l'hôpital. Ils sont déployés au nombre de 1200 éléments sur tout le périmètre. Les familles arabes, voyant leurs maisons incendiées, couraient dans tous les sens. Femmes et enfants se sont enfuis vers d'autres quartiers. Traumatisée, une femme tenant dans les bras ses deux enfants, nous disaient : «Ne vous aventurez pas. C'est très dangereux. Les Ibadites viennent de brûler ma maison.» En effet, 9 habitations de Malékites ont été saccagées et incendiées, alors que celles des Ibadites mitoyennes n'ont pas été touchées à l'exception d'une seule. Ce sont des attaques ciblées. «Seules les maisons des Malékites se font incendier. C'est leur mot d'ordre», me lance Mohamed, un homme de 45 ans. «Vous voyez, nous, nous ne touchons pas à leurs maisons, pourtant implantées au milieu de celles des Arabes», m'indique un autre jeune du quartier, ajoutant : «On est en position de défense. On a confiance en notre Etat et nos services de sécurité, mais on veut que ça s'arrête, nous sommes épuisés», dit-il. Une quinzaine de familles quitte le quartier. Alors qu'une Malékite a hébergé une femme ibadite chez elle, jusqu'à ce que son frère soit venu la récupérer. Les jeunes du quartier nous ont prêté des casques à moto pour éviter qu'un projectile nous atteigne. Deux bombes lacrymogènes sont tombées devant nous, sans blesser personne. Les affrontements ont duré jusqu'à 5h du matin et les forces de sécurité sont restées mobilisées. Hier matin, une trentaine de Mozabites ont tenté de provoquer la police mais cette dernière a réussi à les disperser. 30 personnes ont été arrêtées dont des mineurs. Complicité des Mozabites ? Une source policière affirme que les forces de sécurité ont eu des difficultés à repousser cette attaque. La nature des ruelles sinueuses les a pénalisés. Notre source souligne, par ailleurs, que les propriétaires des villas et habitations d'où les tirs provenaient seront convoqués dans les jours à venir pour enquête. «On a entamé la procédure pour les convoquer. Après investigations, on saura s'ils étaient complices ou pas», explique-t-elle. Elle a également indiqué que des perquisitions seront faites incessamment dans les quartiers mitoyens à celui de Chaâba. «On attend juste que le procureur de la République nous donne l'ordre de perquisition et on passera à l'acte», assure-t-elle. Elle nous indique que toutes les «clôtures installées par les Mozabites pour fermer les accès aux ruelles seront enlevées. C'est illégal». Notre source affirme également avoir trouvé des caméras de surveillance dans une maison de Mozabite, sans autorisation. «On va convoquer le concerné». Les éléments de la police, depuis le début des escarmouches, ont été pointés du doigt pour complicité avec les Mozabites contre les Arabes. Des vidéos lancées sur les réseaux sociaux les accablent. Pour cette raison, les policiers ont du mal à riposter. «C'est une guerre psychologique. Les Mozabites utilisent des caméras vidéo de haute technologie pour essayer de nous accabler», souligne notre source, en ajoutant : «Parfois, on a peur que les vidéos soient intentionnellement manipulées.» D'importants renforts sont arrivés à la veille du bac pour sécuriser le déroulement des épreuves. Des projecteurs et d'autres moyens logistiques seront acheminés à Chaâba incessamment. «Cette attaque intervient à un moment sensible. Heureusement qu'un dispositif sécuritaire spécial est déjà prévu afin d'éviter tout incident», assure notre source. Par ailleurs, dans la commune de Berriane, à 60 km du chef-lieu de la wilaya de Ghardaïa, une cinquantaine de jeunes se sont attaqués à une voiture de police stationnée devant le palais de justice.