Le ministère des Affaires étrangères a annoncé vendredi une série de mesures de facilitation au profit de la communauté nationale établie à l'étranger. Parmi cette batterie de mesures qui vise au renforcement de la protection consulaire, figurent le recensement des détenus algériens incarcérés à l'étranger, l'organisation de visites consulaires aux détenus. L'annonce de l'instauration d'un recensement des détenus algériens incarcérés à l'étranger a été bien accueillie par les représentants des associations des droits de l'homme, notamment Abdelmoumène Khelil, secrétaire général de la Ligue algérienne des droits de l'homme (Laddh) et membre du groupe de travail sur les migrants au sein de l'association Euromed qui a estimé que cette action permettra aux Algériens qui sont en détention et qui ne font pas l'objet de médiatisation de bénéficier d'une assistance. Néanmoins, M.Khelil souligne que jusqu'à présent, «l'absence d'une évaluation chiffrée est une négligence de la part du ministère des Affaires étrangères et ce, d'autant que cette opération relève de ses prérogatives». «Il n'est pas normal que l'on instaure ce recensement aussi tardivement. Il devrait s'effectuer automatiquement. La protection et le suivi de la situation des ressortissants algériens à l'étranger sont l'une des missions ordinaires des représentations diplomatiques. Malheureusement, le recensement n'a pas été effectué systématiquement et aujourd'hui, nous sommes face à des situations de détresse incommensurable et où la vie de nos ressortissants et leur dignité sont bafouées», a-t-il déploré. Dans le même sillage, il a souligné qu'en l'absence d'un tel outil, il était très difficile d'avoir une évaluation précise du nombre de détenus algériens à l'étranger, mais a indiqué qu'ils se répartissaient en deux catégories bien distinctes, à savoir les détenus de droit commun et les migrants clandestins incarcérés dans les centres de rétention. S'agissant des détenus de droit commun, M. Khelil a expliqué qu'une majorité de ces prisonniers était concentrée en Europe et sur la rive sud de la Méditerranée, notamment la France, l'Italie et l'Espagne. Questionné sur la protection des binationaux, ce responsable a affirmé que cette procédure était technique et que ces cas étaient particuliers, mais qu'à partir du moment où la personne arrêtée fait valoir sa nationalité algérienne et qu'elle est inscrite sur les registres consulaires, elle a droit à la protection de son pays. Situation des détenus en Irak Dans le même ordre d'idées, il a évoqué les conditions de vie désastreuses, humiliantes et dégradantes des détenus algériens en Irak dont la plupart ont été condamnés à mort car soupçonnés d'appartenance à une organisation terroriste, et a appelé les autorités algériennes à agir efficacement et rapidement afin de trouver une solution pour ces ressortissants et ce, d'autant que certains ont été exécutés et que l'Irak vit actuellement une situation chaotique qui peut leur nuire davantage. Concernant les migrants clandestins, M. Khelil a précisé que les données relatives aux harraga n'étaient pas fiables car la plupart du temps, les personnes arrêtées dans ce cadre masquent leur identité pour éviter de se faire expulser. Il relève que leurs conditions de vie dans les centres de rétention, notamment en Bulgarie où l'insalubrité règne leur ôtent toute dignité. En outre, il dénonce la durée de détention appliquée aux harraga puisque bien souvent, elle s'éternise et ce, en totale contradiction avec les lois européennes qui régissent l'immigration. «L'absence d'intervention diplomatique est un obstacle pour les détenus qui ne bénéficient pas d'une défense équitable et qui, faute de connaître leurs droits, en sont souvent privés, notamment en ce qui concerne le service médical», a-t-il regretté. S'agissant de la protection consulaire des Algériens soupçonnée d'appartenance à une organisation terroriste et qui sont détenus notamment en Syrie, au Yémen, M. Khelil a tenu à souligner l'importance de respecter le principe universel de la présomption d'innocence, relevant que les déplacements dans ces pays peuvent ne pas avoir de visées criminelles et que c'est aux services de sécurité d'effectuer ce travail d'enquête. «La présomption d'innocence doit primer. Ces Algériens doivent avoir une protection consulaire et bénéficier d'un procès équitable car l'expérience de Guantanamo prouve que des personnes ont été arrêtées en dehors de toute légalité et préservation de la dignité humaine», a-t-il rappelé, dénonçant ces procédés qu'il qualifie d'arbitraires. S'agissant du travail de la Laddh sur cette problématique, M. Khelil a indiqué que la ligue s'appuie essentiellement sur les informations collectées auprès des familles des détenus qui sollicitent son assistance, sur les rapports des ONG, notamment le réseau Euromed qui œuvre au niveau de la rive sud de la Méditerranée, carrefour des migrations, notamment la Grèce, Chypre, la Turquie. «Nous avons des échanges d'informations entre les organisations partenaires, nous sensibilisons les opinions publiques afin de rendre visible la situation de ces détenus», a-t-il affirmé.