Quand le Bayern va, tout va... Traditionnel pourvoyeur de talents de l'équipe d'Allemagne, le Bayern Munich, qui a remporté cinq titres en deux ans, tire vers le haut la "Nationalmannschaft" finaliste de la Coupe du monde. En demi-finale face au Brésil, l'Allemagne avait définitivement l'accent bavarois. Sur le onze de départ, six joueurs - Neuer, Lahm, Boateng, Schweinsteiger, Müller, Kroos - provenaient des rangs de l'actuel champion de la Bundesliga, club le plus titré du pays (24 fois champion, 17 Coupes d'Allemagne, 5 Ligues des champions). Les Bavarois sont les joueurs les plus utilisés par le sélectionneur Joachim Löw, au moins six à chaque match depuis le début du Mondial. L'Allemagne leur doit 8 des 17 buts inscrits. Le rayonnement de l'équipe nationale allemande, au sommet de la hiérarchie mondiale depuis quelques années, est en phase avec l'irrésistible ascension du Bayern en Europe, auteur d'un triplé historique (championnat, coupe d'Allemagne, ligue des champions) en 2013 et d'un doublé (championnat et coupe nationale) cette saison. Tradition bien ancrée "FC Deutschland", titrait vendredi le Süddeutsche Zeitung, quotidien de Munich, espérant que la Mannschaft puisse profiter de la confiance acquise par les joueurs bavarois dans les grands rendez-vous. Le journal rappelait une citation de Philipp Lahm, capitaine du Bayern et de l'Allemagne, juste avant la Coupe du monde: "Maintenant, nous savons comment on gagne de grands titres", en référence au triplé de 2013. L'Allemagne 2014 perpétue une tradition bien ancrée depuis les années 1970. A l'époque, les succès du Bayern, champion en 1972, 1973 et 1974 et vainqueur de la Ligue des champions en 1974, 1975 et 1976, portaient également l'équipe nationale. Lors de leur victoire en finale de la Coupe du monde 1974 face aux Pays-Bas, le "Kaiser" Frank Beckenbauer, capitaine et libéro, le gardien Sepp Meier et "le bombardier" Gerd Müller, tous trois bavarois, constituaient l'ossature du onze allemand, avec trois autres camarades de club: Schwarzenbeck, Breitner et Hoeness. "Le Bayern est le plus grand club du pays et l'un des plus importants au monde", analyse Tobias Altschäffl, journaliste qui suit le club bavarois pour le journal Sportbild. "Leur philosophie, ce n'est pas seulement d'acheter cher des joueurs mais c'est aussi de promouvoir et développer de nouveaux talents", souligne-t-il, pour expliquer leur constance au plus haut niveau. 'FC Bayern Deutschland' Dans les années 80-90, ce fut au tour des Rummenigge (Ballon d'or 1980-81, finaliste des Coupes du monde 1982 et 1986) Matthaüs ou Klinsmann de jouer les ambassadeurs du Bayern en équipe nationale, avec à la clé un titre mondial en 1990. Les années 2000 voient émerger Stefen Effenberg, Oliver Kahn, Mehmet Scholl ou encore Michael Ballack qui, bien que né et formé en ex-Allemagne de l'Est, ne pouvait s'épargner un passage (2002-2006) dans le saint des saints du football allemand. "Les meilleurs joueurs d'Allemagne se doivent d'évoluer au Bayern", affirme Tobias Altschäffl. C'est le cas d'un joueur comme Mario Götze, joueur emblématique du Borussia Dortmund qui, il y a deux ans, ne put résister aux sirènes bavaroises, au grand dam des supporteurs du club de la Ruhr. Cette domination ne va pas sans jalousies ni aigreurs, surtout quand le club affiche clairement ses ambitions: le bouillonnant président du Bayern, Uli Hoeness -qui regarde en ce moment la Coupe du monde depuis sa cellule, où il purge une peine de prison pour fraude fiscale- a par exemple proclamé qu'il souhaitait faire de son équipe "le FC Bayern Deutschland". Depuis que Löw dirige la Mannschaft, le rêve d'Hoeness prend des contours réels. "On peut dire que l'équipe nationale pratique le football du Bayern", selon Tobias Altschäffl. Après avoir été un moment inspiré par l'art de la contre-attaque, pratiqué par Dortmund, le sélectionneur s'est clairement engagé en faveur d'un jeu où l'équipe, dotée d'un très solide milieu de terrain, assume le contrôle du ballon... comme au Bayern. Et la présence à la tête du club de Munich d'un entraîneur aussi réputé que Pep Guardiola a encore renforcé son influence sur la sélection.