Jacques Chirac vient de lancer le projet Aladin visant à lutter contre le négationnisme de la Shoah dans le monde arabo-musulman ! Alors là, c'est un comble, au lieu d'aider Bernadette à ramasser des pièces jaunes, le grand Jacques veut faire la leçon au monde arabo-musulman. Mais Monsieur l'ex-Président, les peuples arabo-musulmans ne sont pas antisémites. Ils ne sont pas concernés par la Shoah ! La Shoah ou l'holocauste, comme vous voulez, c'est votre histoire à vous les Européens civilisés. Ce sont les Français, les Allemands, les Alsaciens, les Hollandais, les Belges, les Italiens, les Autrichiens et j'en passe qui ont massacré des millions de juifs, de tziganes, d'homosexuels, de slaves, de noirs… Ce ne sont pas les arabo-musulmans qui au contraire ont combattu sur tous les fronts le nazisme. Ce sont les fantassins maghrébins et africains de vos anciennes colonies qui ont été aux premières lignes pour «libérer» l'Europe occupée et les juifs ! Cette vérité historique vous l'occultez, à tel point que les anciens combattants algériens, marocains, tunisiens, sénégalais… n'ont jamais été reconnus au même titre que leurs compagnons d'armes français qui étaient à l'arrière des fronts. La reconnaissance des anciens combattants Ce n'est que l'année dernière que ces combattants, pour la plupart bardés de croix de guerre et de bravoure, ont été reconnus par la France et ont pu avoir, pour les quelques survivants, une pension égale à celle de leurs collègues français. C'est cela la réalité Monsieur ! Alors, ne venez pas nous faire la morale. Le problème de la Shoah vous concerne au premier chef. Elle concerne vos citoyens, et notamment Le Pen qui se pavane au Parlement européen et tous les autres Français de souche que vous connaissez mieux que quiconque. Bien sûr, c'est plus facile de faire croire que les Arabes sont antisémites, avec ce qui se passe depuis 60 ans au Moyen-Orient, en Palestine. Mais Monsieur, en Palestine, il ne s'agit pas d'antisémitisme. C'est une guerre de libération d'un peuple spolié de sa terre grâce à la complicité de l'Europe, et qui lutte pour la récupérer. Comme l'Algérie spoliée pendant 130 ans et qui n'a eu cesse de lutter pour son indépendance qu'elle a arrachée au prix de un million cinq cent mille martyrs. Evoquez l'holocauste colonial ! C'est de cet holocauste colonial en Afrique que l'on aurait aimé vous voir parler et surtout sensibiliser les Européens, afin qu'ils n'oublient pas. Nous n'avons rien contre les juifs en tant que peuple. Nous avons les mêmes ancêtres et nous avons toujours vécu en parfaite intelligence.Relisez donc vos classiques puisque vous êtes à la tribune de l'Unesco pour cette nouvelle offensive contre le monde arabo-musulman que vous avez la prétention d'éduquer. Et dites-vous bien que «Sem est avec Cham et Japhet un des trois fils de Noé. Il est l'ancêtre d'Abraham et des fils de celui-ci, Isaac et Ismaël, d'où l'appellation de Sémites donnée aux descendants de ces patriarches bibliques». Le terme «sémite», comme vous le voyez, renvoie à Sem. Mais vous n'ignorez pas que c'est le nazisme qui est à l'origine de cet antisémitisme que vous vous évertuez à pérennisez envers et contre tout ! Tous les dictionnaires vous le confirmeront (*). Tout ceci pour souligner une fois encore que les Arabes sont plus près des juifs, du peuple hébraïque que tous les Européens réunis, qui, je le rappelle encore, étaient leurs exterminateurs et leurs génocidaires. Il faut le préciser. Je comprends la culpabilité ressentie par l'Europe et son désir de trouver des échappatoires pour se débarrasser de cette tare, mais le monde arabo-musulman n'a rien à voir avec cela. Un projet Aladin en direction des Européens ? Ceci dit, l'idée de lancer le projet Aladin n'est pas si mauvaise que cela, surtout si elle visait à décortiquer les politiques coloniales européennes et particulièrement française afin de montrer aux générations européennes les méfaits de telles politiques. Les jeunes Européens et Français notamment comprendraient mieux ce qui se passe en Guadeloupe et en Martinique par exemple… Et pour revenir à la Shoah et tout ce remue-ménage d'origine sioniste et à toutes ces lois que vous érigez pour faire oublier vos actes criminels et vous refaire une virginité historique sur le dos de peuples qui n'ont rien à voir avec vos histoires, il aurait été plus convenable que vous évoquiez ce qui se passe en terre palestinienne spoliée. Et, pour faire bonne mesure, condamner ce que les sionistes, et non pas les juifs, font en Palestine, avec leur politique de colonisation, le mur qui emprisonne des peuples sans défense, les embargos, le racisme… Vous feriez œuvre utile et c'est, ce faisant, que vous éviterez que des jeunes beurs français ne s'en prennent à des jeunes beurs d'origine juive !Qu'est-ce que le peuple iranien a voir avec la Shoah ? Ahmadinejad, leur Président, s'attaque à l'Etat d'Israël, qu'il considère comme un Etat voyou, spoliateur et antimusulman et anti-arabe. Il ne s'attaque pas au peuple sémite. Il s'attaque - verbalement - d'ailleurs à la politique israélienne d'occupation. Le Hamas est-il antisémite parce qu'il combat Israël ? Hamas est l'ennemi d'Israël qu'il combat pour récupérer des territoires, mais cela fait-il de lui un mouvement antisémite ? Il ne faut pas faire d'amalgame. Au fait, connaissez-vous Ella Shohat ? Cette Arabe juive qui est née et a grandi en Israël dans une famille de juifs irakiens originaires de Baghdad et qui avaient quitté leur pays dans les années 1950 ? Vous savez ce qu'elle dit en parlant de son pays Israël ? «En tant qu'Arabe juive, je suis souvent amenée à expliquer les mystères de cette entité antinomique. Expliquer que nous parlions l'arabe et pas le yiddish, que pendant des millénaires notre culture, comme notre créativité profane ou religieuse, s'est largement exprimée en arabe.» Ella Shohat est une figure emblématique des intellectuels et militants orientaux de la deuxième génération - celle née en Israël après l'immigration massive de juifs du Maghreb et du Moyen-Orient dans les années 1950-1960 - qui développèrent à partir de la fin des années 1980 une critique radicale du sionisme et de la société israélienne façonnée par les ashkénazes, les juifs d'Europe. Des juifs racistes vis-à-vis d'autres juifs Il me plaît ici de donner quelques vérités assénées fort à propos par cette intellectuelle à qui l'on doit ce livre si révélateur : Le sionisme du point de vue de ses victimes juives.Ella Shohat y rappelle beaucoup de réalités historiques élémentaires mais oubliées, à moins qu'elles ne soient volontairement occultées. Par exemple que le mouvement sioniste, qui se voulait un «mouvement de libération du peuple juif», était exclusivement ashkénaze, c'est-à-dire de juifs européens de l'Atlantique à l'Oural». Les «juifs arabes» et les Séfarades furent d'emblée, rappelle-t-elle, considérés comme des «sauvages» par les Ashkénazes, qui furent et restent les tenants du pouvoir en Israël, où ils sont pourtant largement minoritaires (moins de 30% de la population). Elle cite des propos, peu amènes à leur égard, de «pionniers» du sionisme comme Ben Gourion, Aba Eban ou Golda Meir qui, animés d'un esprit colonial très européocentriste, craignaient plus que tout l'«orientalisation» d'Israël. Car l'Orient, rien de nouveau là-dedans, «était le mal et l'Occident le bien». «La culture des juifs arabes était plus que méprisée : niée. Comme si les juifs arabes n'avaient commencé à exister qu'après leur arrivée en Israël.» Pour Ella Shohat, c'est un des grands échecs d'Israël, avec le fait que «c'est l'endroit le plus dangereux du monde pour les juifs, alors que le sionisme voulait en faire un havre de paix». «Elle se dit très inquiète de la tournure qu'y prennent les événements. Constatant l'inexorable poussée vers la droite et le militarisme, elle se dit convaincue qu'Israël ne peut continuer sur ce chemin.» «Au lieu de diviser pour régner, en dressant tout particulièrement les mizrahim (juifs orientaux) contre les Palestiniens, il doit au contraire, pour s'intégrer dans la région et vivre en harmonie avec ses voisins, s'appuyer sur ce pont culturel que constituent les juifs arabes.» Liebermann n'est-il pas un antisémite ? Ce sont là des paroles de sagesse. Ce sont de telles paroles et de telles vérités qu'il faudrait vulgariser en Europe, pour les Européens, afin qu'ils sachent que les juifs sont racistes même envers leurs propres congénères du moment qu'ils sont arabes. Et pourtant, ils sont juifs ! C'est quand même incroyable, n'est-ce pas ? Des juifs ashkénazes comme le raciste Liebermann qui veulent «exterminer» d'autres juifs parce qu'ils sont arabes. Peut-on, Monsieur l'ex-Président, appliquer à Liebermann les lois antisémites que vous défendez à tout bout de champ ? Votre projet Aladin évoquera-t-il toutes ces réalités, ces vérités que l'Occident bien intentionné occulte sans vergogne ? Désolé, mais avec le poids de 130 ans de colonialisme français soutenu et «bienfaiteur», je me sens obligé d'utiliser les mêmes expressions coloniales qui nous étaient servies à tout bout de champ ! Et répéter : petit Nicolas et grand Jacques : kif-kif bourricot ! Parce qu'autrefois, dans la France coloniale, quand tu ratais un examen, un devoir ou un travail, tu avais droit à «Kif-kif bourricot» ! Hé bien moi je vous ressers aujourd'hui cette bienfaisante remarque parce que, me semble-t-il, vous n'avez pas encore compris que nous ne sommes pas concernés par la Shoah !Et le stratagème utilisé désormais par tous les hypocrites en taxant les Arabes d'antisémites et de négationnistes, pour faire oublier que ce sont leurs parents et grands parents : français, allemands, belges, hollandais, alsaciens… qui sont les bourreaux du peuple juif est trop facile, évident et lâche ! L'empreinte du Crif et du sionisme Car, enfin, dites-moi pour quelle raison, après toutes les courbettes du gouvernement du petit Nicolas devant le Crif, le «grand Jacques» a-t-il lancé, vendredi 27 mars, en compagnie de représentants de 30 pays réunis à l'Unesco, ce bizarre projet Aladin, un soi-disant programme éducatif visant à lutter contre le négationnisme de la Shoah dans le monde arabo-musulman ? Un projet, louche, car né… à l'initiative de la Fondation pour la mémoire de la Shoah et qui vise à «rendre disponibles en arabe, en persan et en turc des informations objectives sur le génocide des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, les relations judéo-musulmanes et la culture juive». La belle affaire !Une histoire de la Shoah, du peuple juif et des relations entre les musulmans et les juifs au cours des siècles sera présentée en… arabe, persan (farsi), turc, anglais et français ! La culpabilité des Européens envers le peuple juif ne nous concerne pas ! Les Arabes sont aussi sont des peuples sémites, combien de fois faudra-t-il le répéter à tous ces cancres ? De grâce et à la mémoire de tous les Africains, Algériens, Marocains, Tunisiens, Sénégalais et autres contingents indigènes qui se sont sacrifiés dans les Ardennes, sur le front de Crimée, à mont Cassino, dans les tranchées glacées des fronts nord, et à travers l'Europe, pour la libérer, de grâce arrêtez vos média-mensonges !Peut-être qu'Aladin pourrait vous aider à retrouver le chemin de la vérité, grâce à sa lampe magique ! Par Mizrana ------------- (*) Le mot antisémite a été utilisé une première fois en 1860 par l'intellectuel autrichien et juif Moritz Steinschneider dans l'expression «préjugés antisémites». Steinschneider a utilisé cette dernière pour caractériser les idées d'Ernest Renan selon qui les «peuples sémites» étaient affectés de tares culturelles et spirituelles.C'est le journaliste allemand Wilhelm Marr qui invente vraiment le terme «antisémitisme» en 1879, dans son sens d'hostilité aux juifs, à l'occasion de la fondation d'une «ligue antisémite». «Marr, en désignant les juifs comme étant de ‘‘race sémite'', ne fait qu'exposer une idéologie raciste, conforme en cela aux prétentions ‘‘théoriques'' des discours et visions du monde racistes en vogue à l'époque.» «Cette confusion a eu pour effet de donner une apparence pseudo-scientifique, et non plus seulement religieuse, à la haine des juifs. Comme on le sait, les juifs constituaient en réalité si peu une ‘‘race'' qu'à l'époque des grandes persécutions antisémites nazies qui se sont abattues sur les juifs il fut décidé, pour les distinguer visuellement, de les affubler, en Allemagne nazie et en Europe occupée, d'une étoile jaune.» «Et malgré cela, sur les extraits de naissance délivrés sous le nazisme, pour déterminer l'appartenance raciale des individus, c'était en Allemagne nazie comme sous le régime de Vichy la religion des quatre grands-parents qui était prise en considération dans les statistiques. Preuve que l'antisémitisme nazi, pratiqué au nom de la ‘‘science'' et de la ‘‘race'', visait aussi le judaïsme.»