Le président d'une association caritative pour enfants, un monsieur respectable et respecté, semblait tout étonné de se retrouver devant le tribunal correctionnel de Chéraga, hier, afin de répondre pour le chef d'inculpation de coups et blessures involontaires. La victime, un jeune homme, l'accusait de l'avoir écrasé avec sa voiture, lui causant un grave traumatisme crânien. «J'étais sur le trottoir et je tournais le dos à la route. Je parlais à ma mère, qui était à la fenêtre», témoigna le plaignant, poursuivant : «Ensuite, je me suis retourné, et là c'est le trou noir. Je me rappelle seulement m'être réveillé à l'hôpital, en sang.» La juge, ne semblant pas comprendre comment une pareille chose peut arriver, demanda si le trottoir était bas, question à laquelle le jeune homme répondit par la négative, ajoutant toutefois, le sourire en coin, «mais il conduisait un 4×4». L'accusé, lors de son audition, apporta cependant un son de cloche diamétralement différent. Il affirmait que c'était le plaignant qui était venu, de lui-même, se cogner la tête accidentellement contre son rétroviseur. «Ma voiture était à l'arrêt, puisqu'un barrage de police ralentissait la circulation. Ce jeune homme était debout sur le trottoir, tournant le dos à la route, comme il l'a déclaré. Seulement, ce qu'il omet de dire, c'est que brusquement il s'est retourné, et s'est heurté contre ma voiture», assura-t-il. Le voyant assommé, il lui prodiguai les premiers secours, l'accompagnai à l'hôpital, puis dans une clinique pour effectuer un scanner, afin de s'assurer qu'il ne souffrait pas de lésions graves. «Et je tiens à signaler qu'il a repris ses esprits avant que je ne l'emmène à l'hôpital», rectifia-t-il, ajoutant : «Même la police a déclaré que la responsabilité était partagée, et je ne comprends pas les raisons qui l'ont poussé à entamer une poursuite judiciaire à mon encontre.» Lorsque le plaignant demanda à la cour un dédommagement d'un montant de 100 000 DA, l'avocat de la défense et son client semblèrent comprendre les raisons d'une telle action en justice. Ce que ne manqua pas de relever le magistrat lors de sa plaidoirie, déplorant l'ingratitude du jeune homme quant à cette culpabilité commune. «C'est la faute à pas de chance ! En sus, la loi ne prévoit rien dans de pareils cas de figure. Faut-il ne plus conduire, ou bien même surveiller les personnes debout dans la rue ?», s'insurgea-t-il. Le procureur de la République, resté sourd à ces arguments, requit le paiement d'une amende de 10 000 DA.