Hier matin, une famille entière comparaissait au tribunal correctionnel de Chéraga, dans deux affaires successives. C'est à un véritable jeu de chaises musicales auquel se sont livrés les accusés, les victimes et les témoins au cours de ces deux audiences. Cette famille «respectable et respectée» a vécu une dispute qui a tôt fait de se transformer en une véritable bataille rangée. Ainsi, dans la première affaire, il est reproché à l'accusé d'avoir agressé son grand frère. Pourtant, les témoins à décharge, la mère et la sœur, assurent que «c'est l'aîné qui a commencé !» en malmenant la mère en question. «Je n'ai fait que sauver ma mère des mains de mon frère», plaidera l'inculpé. Lorsque le prévenu a tenté de défendre sa maman, il s'est vu asséné un coup à la nuque. La jeune sœur, minerve, béquilles et attelles aux doigts, a, elle aussi, eu le droit au même traitement lorsqu'elle s'interposa. La victime, quant à elle, confortée par le témoignage d'un autre frère, assura que l'accusé, «connu pour son tempérament violent», est celui qui a déclenché les hostilités. Compliqué, dira-t-on ? Cela n'est pas fini. Car dans l'affaire suivante, le grand frère, victime précédemment, se retrouva à la barre des accusés, pour «coups et blessures volontaires» sur… sa propre sœur, témoin auparavant. Les mêmes faits sont relatés par les mêmes personnes, l'accusé dans l'affaire antérieure se transformant en témoin à charge contre le frère auquel il avait été opposé. Les témoignages de toutes les parties étaient tellement embrouillées, confuses et manquaient tant de cohérence que la présidente de la cour, exaspérée, demanda à tout ce beau monde de se taire. «C'est bon, c'est bon, nous avons compris !», lança-t-elle exaspérée, tout en invitant les avocats à s'exprimer. Ces derniers ne manquèrent pas de réitérer la «respectabilité» de la famille, la tristesse, pour les deux parties, d'en arriver à se déchirer devant un tribunal, tout en soulignant les problèmes «administratifs» qui divisaient la fratrie. L'accusation, dans le premier cas, ne demanda qu'un dinar symbolique, alors que la défense prôna la légitime défense. Par la suite, les rôles se sont inversés : l'accusation exigeant des dommages et intérêts conséquents et à la hauteur de la gravité des blessures de la sœur. Chacun des accusés, et ce, dans les deux affaires, risque tout de même une peine de prison avec sursis.