La flambée des prix des fruits et légumes inquiète au plus haut point les habitants de Tizi Ouzou. Beaucoup peinent à faire leurs emplettes dans les marchés de la ville, y compris chez les marchands ambulants qui, dit-on, pratiquent des prix plus ou moins abordables. Détaillants et mandataires se rejettent la balle sur la hausse des prix, mais la guéguerre n'intéresse plus les consommateurs qui en appellent à l'arbitrage de l'Etat. A l'instar des autres régions du pays, le marché des fruits et légumes au niveau de la wilaya de Tizi Ouzou connaît une hausse vertigineuse des prix des fruits et légumes. Chaque jour, ces prix sont majorés de quelques dinars à tel point qu'ils constituent le principal sujet de discussion sur les places publiques. Chacun y va de son propre commentaire pour essayer de comprendre les raisons de cette flambée jamais connue jusque-là, en dehors des premiers jours du ramadhan. Pour les détaillants, cette hausse est imputable aux mandataires qui ont profité des derniers jours de pluie pour augmenter les prix, prétextant l'impossibilité d'accéder aux vergers. Pour les mandataires, la faute incombe aux seuls détaillants qui fixent les prix qui les arrangent, n'hésitant pas à doubler, voire tripler ou quadrupler le prix d'achat. Les grossistes estiment en effet que les revendeurs prélèvent de grosses marges bénéficiaires sous prétexte qu'ils payent leurs impôts, qu'ils prennent des risques en achetant certains produits qui se vendent mal ou qui se périment trop rapidement, outre l'excuse du prix du transport qu'ils jugent excessif. Où sont les agriculteurs ? Pour les citoyens, la question est perçue autrement. Beaucoup se posent des questions sur l'utilité des subventions accordées par l'Etat aux agriculteurs «qui n'arrivent même pas à approvisionner correctement le marché» . Et de remettre sur le tapis la question de l'effacement des dettes des producteurs agricoles, une opération très coûteuse pour le trésor public mais qui n'a aucun prolongement sur le marché qui continue de flamber. De nombreuses personnes rencontrées au marché couvert de Tizi Ouzou n'ont pas caché leur déception face à cette situation unique dans les annales du pays et qui risque, si elle perdure, d'avoir des conséquences sociales dramatiques. Beaucoup de citoyens disent regretter le silence des autorités, en particulier la Direction de la concurrence et des prix (DCP) qui ne bouge pas le petit doigt pour mettre un terme à cette spéculation éhontée. «La DCP ? On entend parler d'elle seulement durant le mois du ramadhan. Tout le reste de l'année, elle est sclérosée et laisse le champ libre aux spéculateurs de tout bord qui régulent à leur manière le marché des fruits et légumes» fulmine un vieux retraité qui dit savoir de quoi il parle. Des prix à donner le vertige Dans ce marché assez bien achalandé, la majorité des clients rentrent chez eux, le couffin presque vide. Et pour cause : la pomme de terre a atteint un seuil jamais égalé, atteignant les 110 DA le kilo. Cet aliment de base, pourtant connu pour être l'aliment du pauvre, est devenu aujourd'hui un produit de luxe que seules les bourses bien garnies peuvent se permettre. Le piment est cédé à 170 DA alors que le poivron est affiché à 160 DA. Rien n'est accessible hormis l'artichaut qui se vend à 35 DA. Tout le reste ne sert presque qu'à garnir les étals, les consommateurs ne pouvant les approcher. D'autres raisons viennent aggraver cette situation des plus insupportables. En ce qui concerne la pomme de terre, la wilaya de Tizi Ouzou qui est connue pour son territoire accidenté dont 83 % de relief montagneux atteignant une attitude de 800 m, le reste étant constitué de piémonts, ne dispose que d'une superficie minime de terres agricoles dont la majorité est située dans les plaines de Drâa El Mizan, Makouda, Tamda, Djebla… Ce qui la rend complètement dépendante des wilayas limitrophes à savoir Boumerdès et Bouira. La production de la pomme de terre atteindra les 16 830 quintaux cette année d'après les responsables de la direction de l'agriculture de la wilaya de Tizi Ouzou. Toujours selon la même direction, la production obtenue depuis le début de la récolte jusqu'au 2 mars dernier a atteint les 6640 quintaux sur une superficie de 51 ha. La régulation du marché reste donc d'actualité et ce, pour éviter que des populations entières soient soumises au diktat des cultivateurs, des mandataires et de toute la faune d'intermédiaires qui minent le secteur agricole.