Avec le retour de la vie artistique et musicale, Alger vit également le retour des vendeurs de matériel et d'instruments de musique. Si le plus connu et le plus ancien vendeur de matériel musical, El Amri, s'est fait remplacer par ses enfants, d'autres ont ouvert des magasins pour répondre au besoin de nos musiciens. Il faut rappeler qu'El Amri, dont la boutique se trouve à la rue Tanger, a acheté ce magasin «La Maison du Jazz», qui appartenait à une Française en 1964. Selon des musiciens, El Amri, qui serait venu à ce métier par hasard, reste un commerçant, car il n'aurait jamais appris à jouer d'un instrument de musique et il paraît qu'il ne sait même pas régler une guitare. Bien que le métier d'El Amri soit le commerce, certains de ses concurrents trouvent anormal qu'un vendeur d'instruments ne sache pas régler un instrument. Par l'exemple, pour accéder à un tel métier en Suisse, il est obligatoire de passer un stage de deux années. Pour vérifier cette information, on est passé à la rue Tanger, mais la boutique était fermée. El-Amri reste en tout cas parmi les vendeurs d'instruments les plus estimés par les musiciens, car il a toujours répondu à leurs attentes. Les autres vendeurs d'instruments se trouvent à El Biar, Riadh El Feth, Cheraga et Chevalley. Baghdadi, chanteur et musicien Le magasin de Chevalley se distingue par le fait que son patron est un véritable artiste. En effet, Mohamed Kheireddine Baghdadi est issu d'une famille de musiciens. Dès sa naissance, il fut bercé par les airs andalous. Le père de Kheireddine jouait à la mandoline. Comme son frère, il devait rejoindre les associations andalouses afin d'avoir une base pour chanter le hawzi et le chaâbi. A peine passé le seuil de sa boutique sise entre Chevalley et le Gai Soleil, on se trouve attiré par les photos des anciens maîtres de l'andalou et du chaâbi. Cheikh Sfindja, Benteffahi et tous les maîtres de la musique andalouse du début du siècle dernier ornent les trois murs de la boutique de Baghdadi. A droite, on reconnaît Hadj M'hammed El Anka avec un groupe de musiciens, et en face, Abdelkrim Dali et le maître Larbi Bensari. Son fils Redhouane qui a choisi de partir au Maroc est également présent. On peut dire que Baghdadi a de la chance puisqu'il passe toute sa journée dans le milieu qu'il aime. Alors qu'on parlait de ses débuts dans les associations Andaloussia et Sendoussia, une jeune fille entre et lui demande de lui régler sa guitare. Notre artiste commerçant lui demande si elle joue l'universel ou la musique algérienne. Elle précise qu'elle est débutante et qu'elle s'intéresse au rock. En deux minutes, elle ressort toute contente avec son instrument réglé. Quelques minutes après un amateur de chaâbi demande si sa derbouka a été réparée. Il la reprend tout en écoutant les conseils de Baghdadi quant à la méthode de réglage des vis. Une belle vitrine à El Biar Au niveau du magasin d'El Biar, en l'absence du patron, le vendeur nous dit qu'il n'est pas artiste et que son seul souci est de vendre les instruments. Il faut dire que la vitrine est jolie et que les instruments exposés, notamment le synthétiseur et le luth, donnent envie d'apprendre à jouer de la musique. Il faut noter que ces vendeurs de matériel et d'instruments, dont la clientèle est surtout composée d'associations et de maisons de jeunes, ne sont pas comme les fabricants d'instruments qui sont de véritables artisans.