La Tunisie a revendiqué dimanche un succès important contre sa mouvance jihadiste avec la mort de neuf "terroristes parmi les plus dangereux" du pays, juste avant une marche internationale en réponse à l'attentat sanglant au musée du Bardo. Le président François Hollande, ses homologues polonais et palestinien Bronislaw Komorowski et Mahmoud Abbas, ainsi que les chefs des gouvernements italien et Algérien Matteo, Renzi et Abdelmalek Sellal, ont notamment confirmé leur participation à la marche prévue à la mi-journée devant le musée. Quelques heures avant son début, le ministère de l'Intérieur a annoncé que les forces de l'ordre avaient abattu tard samedi soir dans la région de Gafsa (centre-ouest) neuf combattants de la Phalange Okba Ibn Nafaa, le principal groupe jihadiste de Tunisie, accusé par les autorités de l'attaque du Bardo le 18 mars. "On est très content (...) Les neuf étaient parmi les plus dangereux terroristes de Tunisie", a assuré le porte-parole du ministère, Mohamed Ali Aroui. Le ministère a accusé jeudi Okba Ibn Nafaa, qui est liée à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), d'être derrière l'attaque contre du musée, bien que celle-ci a été revendiquée par l'organisation jihadiste rivale Etat islamique. Des radios tunisiennes ont affirmé qu'un chef du groupe, l'Algérien Lokmane Abou Sakhr, était parmi les neuf morts mais le ministère a indiqué qu'il était trop tôt pour tirer de telles conclusions. Abou Sakhr a été accusé par le ministre de l'Intérieur, Najem Gharsalli, d'avoir "dirigé" l'attaque du Bardo. Son groupe --qui serait composé de plusieurs dizaines d'hommes, des étrangers comme des Tunisiens -- est responsable selon les autorités de la mort d'une soixantaine de policiers et militaires depuis décembre 2012. 'Le monde réagit' La Phalange Okba Ibn Nafaa a notamment revendiqué l'attaque en 2014 contre la maison du ministre de l'Intérieur de l'époque à Kasserine, ville voisine du mont Chaambi où se trouve le principal maquis jihadiste en Tunisie. La réussite de cette opération intervient alors qu'à 11H00 (10H00 GMT) doit débuter une marche populaire à laquelle les autorités attendent "des dizaines de milliers de personnes" pour dénoncer l'attaque du Bardo qui a fait 22 morts, 21 touristes étrangers et un policier, un bilan revu à la hausse samedi après le décès d'une Française grièvement blessée. Les invités de marque accompagneront, eux, vers 12h00 (11h00 GMT) le président tunisien Béji Caïd Essebsi sur une centaine de mètres le long de l'enceinte du musée, avant d'y inaugurer une stèle à la mémoire des victimes. M. Hollande sera présent bien que se déroule en France le second tour des élections départementales. "Désormais, tout le monde réagit après chaque attentat terroriste comme si l'attentat était perpétré chez lui", a souligné le président tunisien au quotidien français Ouest-France. Cette marche rappelle celle organisée en janvier par M. Hollande après les attentats de Paris contre l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo, une policière et un supermarché casher. La Tunisie, pays pionnier du "Printemps arabe", a malgré les turbulences achevé sa transition avec des élections fin 2014, mais sa stabilité pourrait être menacée par l'essor de la menace jihadiste ainsi que par les difficultés économiques et sociales persistantes qui étaient à la racine de la révolution de 2011. Divisions Le parti islamiste Ennahda, deuxième force politique du pays présente dans le gouvernement de coalition, a appelé ses partisans à participer à la marche "pour exprimer l'unité des Tunisiens face à ce danger et leur détermination à défendre leur patrie et (...) préserver leur liberté". La puissante centrale syndicale UGTT a également invité ses membres à y participer "massivement". Mais le Front populaire, coalition de gauche et principale formation d'opposition, a annoncé qu'il n'y prendrait pas part pas en accusant d'"hypocrisie" certains participants, dans une claire allusion à Ennahda. De nombreux politiques de gauche accusent en effet le parti islamiste de s'être montré laxiste face à la montée de courants jihadistes lorsqu'il était au pouvoir (fin 2011-début 2014) et d'être responsable, voire complice, des assassinats en 2013 de deux membres du Front populaire, Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi.