ALORS que l'opinion s'attendait à un premier verdict qui devait être prononcé, hier, dans le sillage des procès de corruption hyper-médiatisés qui font tâche d'huile depuis peu, l'affaire de transfert illicite de fonds vers l'étranger où sont impliqués deux ex-hauts responsables de Sonatrach vient de connaître un rebondissement des moins attendus. Alors que le procès, ayant eu lieu au début du mois courant, s'est achevé sur un réquisitoire accablant des deux mis en cause, Mohamed Méziane, ex-PDG de Sonatrach et Belkacem Boumediene, ex-vice-président de l'activité amont de la même compagnie, la sentence finale ne sera pas connue de sitôt. La cause ? Il y a désormais nécessité de recourir à une nouvelle «enquête complémentaire» pour mieux élucider les tenants et aboutissants de cette affaire de passations douteuses de marchés et de violation de la réglementation régissant le transfert de monnaie. «Avant de trancher dans le fond, il faut effectuer une enquête complémentaire au niveau des sièges de Sonatrach, de la BEA, des Douanes de Mostaganem et de Schlumberger pour voir les documents d'importation des pièces de l'usine de Stah». C'est le propos du magistrat Bensalem Abderrezak, président du pôle judiciaire d'Alger spécialisé des affaires de corruption. Faut-il préciser que Schlumberger est une entreprise américaine spécialisée dans les travaux pétroliers avec laquelle la compagnie Sonatrach avait contracté une transaction qui serait douteuse. Les Douanes sont concernées en tant que partie civile dans le procès impliquant Mohamed Méziane et Belkacem Boumediene. Au terme de l'audience qui s'est tenue le 8 avril, le ministère public avait requis, pour rappel, une peine de 5 ans de prison ferme assortie d'une amende de 122millions de dinars à l'encontre de chacun des deux prévenus. Ces derniers sont aussi inculpés,rappelle-t-on encore, dans l'affaire dite «Sonatrach 1», un autre scandale de corruption dont le procès portant sur le jugement de 17 prévenus au total a été reprogrammé pour la date du 7 mai prochain. Pour ce qui est de l'affaire de passation de marchés douteux et de transfert illégal de fonds que traite le pôle judiciaire d'Alger, les investigations menées à ce sujet à la suite d'une plainte déposée par l'administration des Douanes auraient prouvé que le marché conclu entre Sonatrach et Shlumburger est «en violation manifeste» de la législation régissant les mouvements de capitaux de et vers l'étranger. Ce qui n'est pas du tout l'avis du président dudit pôle judiciaire pour qui «cette affaire était légale», a-t-il indiqué hier, cité par l'APS. Cependant, indique la même source, «l'importation de pièces de rechange et de groupes électrogènes s'est accomplie par quotas surfacturés ayant atteint 1,2 million de dollars, ce qui constitue une violation flagrante de la loi sur les changes dans le but de transférer des fonds vers l'étranger». Lors du procès, Mohamed Méziane a comparu libre, contrairement à Belkacem Boumediene qui est en détention depuis 2010. L'ex-PDG de Sonatrach avait alors soutenu que «le projet de Stah est intervenu sur décision politique et instructions ministérielles après négociations entre le ministère des Affaires étrangères algérien et le MAE libyen pour tenter de trouver une solution technique, politique et économique à la question des hydrocarbures au niveau des frontières sud-est». Il avait, de surcroît, nié les deux chefs d'accusation retenus contre lui, à savoir la violation de la législation sur les changes et celle sur le mouvement des capitaux, clamant son innocence et celle du vice-président. Affaire à suivre.