Le cerveau de la prise d'otages du site gazier d'In Amenas en 2013 aurait été tué par une frappe aérienne américaine en Libye. Mokhtar Belmokhtar, dit Le Borgne, aurait été abattu durant la nuit de samedi à dimanche, a annoncé hier soir le gouvernement libyen reconnu par la communauté internationale. Le Pentagone a indiqué à Washington que le terroriste avait bien été la cible d'une frappe américaine, mais n'a pas confirmé sa mort. «Nous continuons à évaluer les résultats de l'opération et fournirons plus de précisions de manière appropriée», a déclaré dans un communiqué le colonel Steve Warren, porte-parole du Pentagone. «Des avions américains ont mené une opération qui a abouti à la mort de Mokhtar Belmokhtar et d'un groupe de Libyens appartenant à une organisation terroriste dans l'est de la Libye», ont indiqué les autorités libyennes sur leur page Facebook, ajoutant que la frappe a eu lieu «après consultation avec le gouvernement intérimaire libyen». Quelques heures plus tôt, à Washington, le Pentagone avait annoncé que l'armée américaine avait mené une frappe dans la nuit de samedi à dimanche contre une cible «terroriste liée à Al-Qaïda» en Libye. Washington a, par le passé, déployé des drones dans cette région. Cette fois serait la bonne, à entendre le gouvernement libyen qui semble être sûr de la mort de ce chef terroriste. Donné pour mort à plusieurs occasions, Belmokhtar refaisait surface. L'agence libyenne Lana, citant un responsable du gouvernement reconnu par la communauté internationale, a précisé que «la frappe de l'armée de l'air américaine a eu lieu dans la nuit de samedi à dimanche dans une ferme (...) à Ajdabiya, à 160 km à l'ouest de Benghazi, chef-lieu de l'est libyen, où l'émir du groupe terroriste ‘'les signataires par le sang'' Belmokhtar tenait une réunion avec d'autres chefs de groupes extrémistes, dont des membres d'Ansar Asharia», une organisation classée terroriste par l'ONU. Sur les réseaux sociaux, des comptes djihadistes ont fait état de 7 morts dans le raid. Une page Facebook d'un groupe islamiste à Ajdabiya a publié dès dimanche matin des photos de corps ainsi que les noms des personnes tuées, sans aucune référence à Belmokhtar. Par ailleurs, des combats meurtriers ont eu lieu autour de l'hôpital de la ville, les terroristes ayant tenté, en vain, de prendre le contrôle de l'établissement, aux mains de milices locales, pour soigner leurs blessés, selon des témoins. Dans son communiqué posté sur Facebook, le gouvernement du Premier ministre Abdallah al-Theni, installé à al-Baida (est), apporte son «soutien» aux frappes américaines, affirmant que «cette opération fait partie de l'aide internationale qu'il a longtemps réclamée pour lutter contre le terrorisme». La dernière opération des Américains en Libye date de juin 2014, quand leurs forces spéciales ont capturé Ahmed Abou Khattala, un des organisateurs présumés de l'attaque contre le consulat américain à Benghazi en 2012 qui avait coûté la vie à l'ambassadeur Chris Stevens et à trois autres Américains. Mokhtar Belmokhtar avait réaffirmé mi-mai la loyauté de son groupe Al-Mourabitoune à Al-Qaïda et démenti l'allégeance à l'Etat islamique (EI) proclamée par un autre dirigeant, laissant présager une sérieuse discorde dans la hiérarchie du mouvement. Donné pour mort par le Tchad en avril 2013, il avait revendiqué un double attentat-suicide au Niger en mai 2013, qui a fait une vingtaine de morts. Al-Mourabitoune est né en 2013 de la fusion des ‘'Signataires par le sang'' et du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), un des groupes terroristes ayant contrôlé le nord du Mali jusqu'au lancement de l'opération française Serval en janvier 2013. Condamné à mort à deux reprises par la justice algérienne, Belmokhtar aurait commandité l'assassinat de quatre Français en Mauritanie en décembre 2007, et la prise en otages de deux Canadiens en 2008, trois Espagnols et deux Italiens en 2009. Né en juin 1972 à Ghardaïa, il a combattu très jeune en Afghanistan en 1991, où il a perdu un œil, ce qui lui a valu le surnom de «Laouar» (le borgne). Ex-chef d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), avec laquelle il était entré en dissidence, Mokhtar Belmokhtar avait créé fin 2012 sa propre unité combattante, les ‘'Signataires par le sang''. En janvier 2013, il avait revendiqué l'attaque sanglante et la prise d'otages massive qui s'en est suivie sur le complexe gazier d'In Amenas.