B. L. veut divorcer. La procédure, simple au départ, lui semble insurmontable car il est pressé de se refaire une santé en se remariant. B. L., la cinquantaine, s'approche du pupitre du juge Louael, à l'appel de son nom. S. F. trente-quatre printemps arrive juste derrière B. L. qui annonce d'emblée qu'il est venu divorcer, qu'il travaille ce matin et donc, étant pressé, il voulait une réparation au plus vite. «doucement, monsieur. Vous voulez divorcer ? C'est votre droit, mais il y a des procédures à respecter. Allons-y sûrement et calmez-vous, s'il vous plaît. Le tribunal a horreur de travailler dans la pagaille. - Vous avez un avocat ?» dit sans ponctuation le président de la section «Statut personnel» qui s'est aperçu que le demandeur piétinait les procédures. - «Non, monsieur le président. J'ai une requête à vous remettre», répond, sûr de lui et moins stressé qu'à son arrivée à la barre, B. L. qui a, à la main gauche, une copie du «statut personnel» dont la couverture rappelle étrangement Les fleurs du mal de Beaudelaire. - «Donnez la requête au policier, une copie à votre adversaire et à monsieur le procureur», lance prestement le magistrat qui va, juste après, s'adresser à la jeune dame qui voulait visiblement parler, en vain. - «vous voulez divorcer vous aussi ?» - «Non monsieur le président, je ne lui ai rien fait. Et puis il a quelqu'un dans la rue.» - «Non, non madame. Il est strictement interdit de faire des commentaires et surtout de porter atteinte à quiconque. Ce serait outrager le tribunal. C'est compris ?» lance Liamine Louael, calme d'allant. - «J'ai le droit de divorcer !», lance sans être autorisé B. L. qui brandit le code de la famille. - «Vous, vous parlerez lorsque le tribunal vous le permettra. Avez-vous des enfants ?» balance, l'œil vif, le magistrat. - «Non !» répondent les deux époux, en chœur. Le juge gonfle les joues comme pour ressentir un bienfait, car il n'a pas de drame à traiter, donc dès la seconde comparution, il décidera du divorce aux seuls torts du mari. Il fixe rendez-vous au couple dans quinze jours pour une ultime rencontre peut-être qu'entre-temps, les cœurs seront sur un tambour, et les trompettes de Jéricho (Ariha) sonneront fort pour une reprise fougueuse et éternelle.