Le nouveau ministre israélien des Affaires étrangères, Avigdor Lieberman, entreprend depuis hier sa première visite officielle dans l'Union européenne (UE), avec pour première escale Rome. Ce sera ensuite Paris, demain, puis Berlin et Prague. Une visite qui incommode quelque part les Européens dont on connaît l'attachement au principe de la création des deux Etats palestiniens prévue par les accords d'Annapolis auxquels avait souscrit l'ancien gouvernement d'Olmert. Netanyahu n'a pas voulu s'engager dans cette voie, autrement dit ni lui ni son ministre des Affaires étrangères ne veulent entendre parler d'Etat palestinien. Cet engagement que Netanyahu et Lieberman ont clairement refusé de prendre devant George Mitchell, l'émissaire du président Barack Obama, le mois dernier à Tel-Aviv, le chef de la diplomatie israélienne n'a pas de raison de le faire au cours de son périple. Au mieux cette question sera évoquée en priorité avec Washington. Obama pourrait insister le 18 mai à la Maison-Blanche pour connaître les intentions réelles, du moins exprimées de vive voix, du Premier ministre israélien dont ce sera le premier voyage à l'étranger. Il pourra aussi forcer la main au principal allié israélien pour s'impliquer dans le projet d'Annapolis. Tout porte à croire cependant que les nouveaux dirigeants israéliens tenteront de brouiller la piste diplomatique sans heurter de front les Etats-Unis, histoire de gagner du temps. L'objectif est clair et Lieberman l'a dit, ça ne lui avait pas échappé : «Il faut se préparer à la guerre.» Tous les gouvernements israéliens, à la manière de tous les présidents des Etats-Unis jusqu'à George Bush, ont eu leurs guerres. Pour les Israéliens, c'est le bon moyen qui a déjà fait ses preuves, de bloquer toutes les initiatives diplomatiques et d'imposer leur solution par le rapport de force sur le terrain. On n'en est pas encore là, certes, mais à quoi faut-il s'attendre si le processus de paix reste bloqué ? Les Européens pourront-ils demander aux Palestiniens d'attendre ? Quoi exactement, s'il paraît évident que Netanyahu et Lieberman ne sont ni seront porteurs de propositions en relation avec les objectifs dessinés à Annapolis ? La visite du ministre israélien des Affaires étrangères sera donc de pur protocole. Dans les chancelleries on trouvera la formule adéquate : «C' est un premier contact courtois.» Les capitales de l'UE qui se sont empressées d'isoler le gouvernement de Haniyeh sous prétexte que le Hamas est classé organisation terroriste seront mis à l'épreuve de la visite de Lieberman dont tout le monde connaît l'idéologie extrémiste et les objectifs belliqueux. Que lui diront ses homologues européens ? Absolument rien qui puisse ressembler à des pressions. La politique de deux poids deux mesures, on le sait, s'applique depuis une éternité - parfaitement - dans le cas du conflit israélo-palestinien. Au mieux, les Européens réitéreront à Lieberman ce que lui a dit en leur nom Miguel Angel Moratinos, le chef de la diplomatie espagnole, le mois dernier à Tel-Aviv. La réponse est connue : la création des deux Etats n'est pas à l'ordre du jour. Elle n'est même pas envisageable. La priorité, c'est l'Iran. La «sécurité d'Israël». Le vieux refrain.Que fera dans ces conditions l'UE ? La commissaire pour les affaires extérieures de la commission européenne, Benita Ferrero Waldner, a suggéré de suspendre les relations avec le nouveau gouvernement israélien pour le forcer à respecter les engagements pris par ses prédécesseurs. Javier Solana, le haut responsable de l'UE pour la politique extérieure et la sécurité commune des 27, osera-t-il brandir la menace de Benita Ferrero devant le chef de la diplomatie israélienne qu'il rencontrera à Berlin ? Ce serait très courageux.