Chaque année, et en l'espace de quelques jours, la conjugaison de nombreux facteurs font que des milliers d'hectares sont ravagés par les feux. Parmi ces facteurs, citons les effets de la chaleur, la sécheresse, le vent et en sus l'imprudence de l'Homme. C'est pourquoi, les spécialistes du domaine des forêts estiment que la protection de nos ressources sylvicoles ne saurait rester l'affaire réservée à eux seuls. L'ensemble des pouvoirs publics et la société civile doivent se mobiliser. La détermination, l'engagement et l'attitude responsable de chacun constituent des gages de la protection durable du patrimoine forestier.
2008, une année destructrice La wilaya de Tizi Ouzou englobe une importante superficie forestière estimée à 112 182,64 ha dont 41 890 ha de forêts, 66 985 ha de maquis et broussailles, soit un taux de 38% de la superficie globale de la wilaya. Le patrimoine forestier est constitué essentiellement de chênes qui couvrent une superficie de 33 500 ha. Quant aux boisements artificiels, ils s'étendent sur 14 500 ha. La conservation des forêts de Tizi Ouzou, a enregistré 165 foyers d'incendies qui ont parcouru 2797,70 ha, dont 488,70 ha de forêts (42,53% de chêne-liège), 1266,00 ha de maquis et 1043,00 ha de broussailles. Les 82 incendies enregistrés durant la canicule du 9 et 10 septembre 2008, ont parcouru un total de 3809,20 ha de forêts et d'arbres fruitiers. Divers fruitiers ont été ravagés par 16 incendies qui ont parcouru 1784 ha, détruit 50 bottes de foins et 1000 unités de poulet de chair. Selon le rapport rétabli par la conservation des forêts de la wilaya, les pertes subies par la subéraie sont les plus importantes. Les daïras les plus touchées sont celles d'Azeffoun, Azazga et Drâa El Mizan, plus particulièrement durant les mois de septembre et août. Le même rapport ajoute que plus de 70,90% des feux se sont déclarés entre 10 heures et 16 heures, ce qui s'explique par le fait que c'est la tranche horaire où le végétal accuse le déficit hydrique le plus important.
Des pertes de différentes natures En entend par pertes économiques uniquement les pertes en matière de produits forestiers, à savoir les bois, les lièges et les diverses broussailles. Par ailleurs, d'autres pertes sont occasionnées par les incendies, dites pertes indirectes et concernent la faune, la flore, l'érosion du sol, la chasse, le pâturage etc., volets qui ne peuvent êtres évalués avec exactitude. Il y a lieu de ne pas confondre entre les superficies brûlées et les superficies parcourues par le feu. Généralement, dans les subéraies, les arbres ne brûlent pas en raison de la carapace qui les protège (liège) et de la vitesse de propagation du feu (vent). Les subéraies reprennent à 20% dès la première année après le passage de l'incendie. Le sous-bois reprend dès la deuxième année. Les parties parcourues par le feu retrouvent leur recouvrement à 100% à partir de la dixième année, lorsque toutes les conditions sont réunies, à savoir absence de sécheresse prolongée et de répétition d'incendies sur les mêmes lieux. L'analyse des différents bilans des campagnes des années précédentes fait ressortir un manque dans la maîtrise préalable des sinistres, des moyens à mobiliser en dépit du «plan feux de forêts» préétabli par le comité opérationnel permanent. A cela, s'ajoute une baisse de vigilance nécessaire à la prévention ainsi qu'un manque de coordination entre les différentes structures devant agir et prévenir le risque. Mobilisation d'hommes et de moyens A ce titre, un rappel concernant les mesures à prendre par les collectivités locales et certains organismes en matière de travaux de prévention a été diffusé conformément au décret 87/44 relatifs à la prévention entre les incendies dans le domaine forestier national et à proximité. La conservation des forêts va mobiliser six brigades mobiles forestières pour la détection, l'alerte et les premières interventions et quinze brigades équipées de citernes de 400 litres et 600 litres qui sont positionnées dans les massifs vulnérables. Il est également prévu le recrutement de 79 ouvriers occasionnels sur une durée de cinq mois, pour assurer l'intervention. De plus, ce dispositif sera renforcé durant cette année comme les années précédentes, par la présence de chantiers de travaux forestiers installés en plein massif, ces chantiers au nombre de seize totaliseront environ 217 ouvriers, répartis à travers la wilaya dont les plus importants concernent la récolte des lièges. L'analyse de la composition des massifs forestiers de la wilaya et des bilans antérieurs d'incendies, permet d'établir une classification des zones, selon le niveau de risque encourue par les villes et villages, d'après la formule de De Mongolfier et ce, conformément à l'esprit de la loi 04-20 du 25-12-2004, relative à la prévention des risques majeurs et à la gestion des catastrophes dans le cadre du développement durable, notamment en matière de prévention des feux de forêts et la détermination des agglomérations ainsi que les établissements humains implantés dans des zones forestières ou à leur proximité et pour lesquelles le déclenchement d'un feu de forêt peut constituer un risque majeur. 37 villages menacés Ainsi, il existe quatre niveaux de risques d'incendies, dont les plus élevés concernent trente sept villages, à savoir ceux de Cheurfa-Bouarzik, Ihnouchène et Ibeskrienne dans la commune d'Aghribs, daïra d'Azzefoun, Aït Atalla, Tafoughalt, Aït Rahmoune, Tizi Guezgarene et Tachtiouine, dans la commune d'Aït Yahia Moussa, daïra de Drâa El Mizan, Imsounène et Adhrar, dans la commune d'Iflessen, daïra de Tigzirt, Achouba, Taguemount-Boudrar, El Kalaâ, Cheurfa, Issoumathène dans la commune et daïra d'Azzefoun. Le monde rural dans la wilaya de Tizi Ouzou est marqué d'une part par la précarité, la pauvreté, le chômage et d'autre part par une pression accrue sur les écosystèmes naturels et leur fragilisation.Pour pallier ce problème et se rapprocher davantage des riverains, la conservation des forêts procède à l'élaboration et l'exécution des projets de proximité de développement rural intégrés. A ce titre, 60 projets PPDRI sont prévus au titre de l'année 2009 et se résument comme suit : dix projets sont prévus pour la modernisation des villages et des ksour, vingt-six autres sont prévus pour la diversification des activités économiques, dix-huit pour la protection et valorisation des ressources naturelles et six en vue de la protection et la valorisation du patrimoine rural matériel et immatériel. 46 communes réparties sur une vingtaine de daïs sont concernées par ces projets qui concerneront une soixantaine de localités. Au total, 17 127 ménages seront concernés pour une population de 111 330 personnes. Il est prévu aussi, à travers ce programme, de créer 3931 emplois. Quant à l'espace traité, il portera sur un volume de 17 280 ha.
La surveillance renforcée La surveillance des massifs forestiers est assurée par six postes de vigies qui font partie du réseau de vigie qui rayonne sur 80% du territoire de la wilaya. Durant toute la campagne de protection des forêts, chaque poste de vigie, pourvu de deux gardiens, fonctionne sans interruption de jour comme de nuit. Toutefois, pour des raisons conjoncturelles, la surveillance de nuit est suspendue, sauf dans les cas de déclenchement du plan Orsec. Par ailleurs, sur les zones d'ombre, la surveillance, l'alerte ainsi que la première intervention est prise en charge par les six brigades mobiles qui complètent le réseau de vigie, auxquelles s'ajoutent les chantiers de travaux déployés à travers les massifs forestiers pendant l'été. L'analyse des bilans des campagnes précédentes, fait ressortir que 58% des départs de feux, sont signalés par les postes de vigie et 32% par les brigades mobiles. Pour les combattants du feu, les points d'eau proches d'une forêt sont essentiels dans la lutte contre les incendies. Ainsi, le rayon d'action autour d'un point d'eau est estimé, en fonction de l'expérience des intervenants contre les flammes, à environ 2 km. L'inventaire des plans d'eau à travers la wilaya ne met pas à l'abri des confusions entre un plan d'eau et un autre objet. C'est pourquoi, à l'avenir des vérifications ainsi que des mises à jour d'informations seront effectuées par les techniciens sur le terrain afin d'apporter les modifications nécessaires à l'aide du SIG. La conservation des forêts compte 23 points d'eau opérationnels pour la campagne 2009, d'une contenance de 50 m3 chacun. Tous sont positionnés par GPS. Par ailleurs, il est à signaler que le réseau de pistes traversant les massifs de la wilaya est de 866,46 km, dont 444,73 km sont accessibles et carrossables. En matière de tranchées pare-feux, seuls 123,82 ha sur 477,95 ha ont été aménagés et ce, toujours pour des raisons d'inaccessibilité.