Le malheureux receleur, qui avait été pris avec un portable volé, avait été assommé à la barre, vu que ses «fournisseurs», deux voleurs, avaient volé plus d'une centaine d'appareils toutes marques confondues. Ligotés devant l'évidence, ils iront dans les profondeurs de la loi puiser des arguments afin de sauver les meubles, car le 350 demeure un redoutable article qui punit avec beaucoup de rigueur les voleurs, tous les voleurs... Les quatre détenus pour le vol de plus d'une centaine de portables dérobés sur une période donnée s'avancent à la barre. Ils sont résignés. Ils sont même abattus ! Et ils le sont à la vue d'une victime attentive et heureuse de récupérer peut-être son bien ou à défaut le prix équivalent. Hamid R., Hocine L., Hassib H., et Belkacem F. sont entendus un à un. Le receleur est le seul à être dans un mauvais pétrin. Il a perdu, outre sa liberté, la somme déboursée pour acheter de la marchandise volée. «Vous saviez que c'était un portable volé ! Et vous le saviez vu son prix proposé !» balance juste après Hadj Rabah Barik, le juge de Koléa (cour de Blida). Me Hayet Kadi et Me Salem Houari attendent tout comme Me Salah Souilah et Hadj Salah d'intervenir pour sauver ce qui peut l'être. Il est nettement apparu durant les débats que les inculpés étaient des revendeurs se contentant de petits bénéfices. Mais l'appétit vient en mangeant... Koussa, le représentant du ministère public, suit avec beaucoup d'attention les propos débités par le juge qui avait tenu à rappeler que dans cette juridiction «qui vole un œuf vole un bœuf». L'adage avait été utilisé par le magistrat, car l'un des voleurs avait juré n'avoir volé qu'un seul téléphone ! La mise au point effectuée, le juge prend acte des demandes du procureur qui avait relevé la gravité des faits et, par conséquent, les peines requises étaient en droite ligne avec l'application de la loi ! «Trois années de pri son ferme et une amende de dix mille dinars les feront réfléchir.» Avant, pour la partie civile, Me Kadi a fait beaucoup de bruit. «Le vol est à imputer même aux receleurs car sans le receleur le voleur n'y gagne rien», s'est-elle écriée. «Ils ont mis en place un diabolique stratagème pour s'enrichir sur le dos de jeune commerçants !» Me Kadi ne veut rien savoir : «Il faut qu'ils remboursent et payent cent mille dinars à titre de dommages et intérêts.» Au cours de leurs brèves mais percutantes plaidoiries, les quatre avocats ont mis l'accent sur l'âge des inculpés et surtout pour ceux qui l'ont fait. L'indulgence du tribunal devrait aller vers ceux qui se sont mis à table au cours des débats. «Les réparations réclamées par-devant l'honorable juridiction de la première instance sont le fait d'un gros préjudice financier pour le bris de la porte avec tous ses accessoires, la marchandise dérobée et revendue hélas, mais surtout le coup porté au moral de mon client», avait articulé Me Kadi qui allait laisser la place à son confrère défendeur de l'adversaire de la victime. Me Salem Houari, l'avocat de Belkacem L., inculpé de recel, a plaidé l'ignorance de la provenance de la marchandise acquise qui s'est avérée être le produit d'un vol. Il avait pris soin d'attirer l'attention de Hadj Barik, le juge, sur le fait que l'inculpé n'a commis aucun délit ni même aucune infraction pour être obligé de verser des dommages à la victime. A l'issue des plaidoiries, les détenus avaient droit au dernier mot. Le verdict aura été le mandat de dépôt à l'audience du troisième inculpé qui était sous contrôle judiciaire et cinq ans de prison ferme pour tous les inculpés.