Entre lenteur dans la délivrance des documents administratifs et agressions au sein des consulats d'Algérie en France, les ressortissants algériens sont vraiment mal lotis. L'avènement du passeport biométrique, document obligatoire pour pouvoir se rendre en Algérie, est le énième coup de grâce qui n'a nullement apaisé les esprits. Mais le pire est à venir. Selon Mme Chafia Mentalecheta, députée de la Communauté nationale établie en France - Zone 1 et membre de la Commission des affaires étrangères, «il est évident que la situation va aller en empirant pour plusieurs raisons». Dans un rapport qu'elle a adressé au Premier ministre Abdelmalek Sellal en 2014 et dont nous détenons un exemplaire, Chafia Mentalecheta déclare, en effet, qu'«à l'approche de la date fatidique du 27 novembre 2015, date à laquelle chaque voyageur devra disposer d'un passeport biométrique, on constate une absence flagrante de la part des services concernés de l'Etat d'une réflexion élaborée pour pallier les déficiences constatées, signalées, exposées… dans la mise en œuvre du passeport biométrique particulièrement en ce qui concerne les citoyens algériens qui résident hors des frontières». Selon cette députée que nous avons contactée à ce propos, «les services de l'Etat (Intérieur, AE et Justice) se réunissent, se renvoient la balle mais ne prennent aucune décision pour alléger les procédures bureaucratiques ou faire preuve d'initiative concrète, efficace et efficiente pour hiérarchiser les priorités». Un Algérien qui réside à l'étranger, notamment en France, est soumis à moult contraintes et embûches, signale Chafia Mentalecheta. A titre d'exemple, «pour faire corriger une erreur son S12, il faut toujours se déplacer en Algérie pour obtenir un jugement. Pour les enfants de moins de douze ans, l'imprimerie nationale n'a toujours pas donné les critères requis pour les photos et les CD font le va-et-vient entre le consulat et l'imprimerie…» Pire encore, ajoute notre interlocutrice, «pour désengorger les consulats en été, une vraie mauvaise mesure de substitution a été prise, celle de tolérer aux binationaux l'entrée sur le territoire munis d'un passeport français sans visa et d'une carte d'identité nationale algérienne en totale contradiction avec les textes législatifs. Sans épiloguer sur le fait que cette mesure discrétionnaire est également discriminatoire pour les ressortissants algériens munis d'une carte de séjour, elle a entraîné l'effet inverse, soit une ruée de nos compatriotes vers les consulats pour se faire délivrer une carte d'identité, pensant ainsi avoir réglé définitivement le problème du passeport biométrique algérien». Comme une erreur ne vient jamais seule, cette «tolérance», qui prendra fin d'ailleurs en janvier 2016 (lire notre article ci-dessous), va entraîner un nouveau rush dès la rentrée de septembre, prévient notre interlocutrice.
Agents sans formation et ressortissants impatients S'agissant des nombreuses plaintes d'agressions signalées dans les différents consulats d'Algérie en France, Mme Chafia Mentalecheta rapporte : «On constate dans certains consulats que des agents de sécurité ne sont pas formés à l'accueil du public, qu'ils outrepassent clairement leurs prérogatives et qu'ils sont quelquefois d'une agressivité et d'une grossièreté inacceptables dans un service public». Par contre, ajoute la députée, «certains de nos compatriotes ont aussi un comportement totalement inadapté. Si on peut comprendre leur degré d'impatience, leur agressivité et leur grossièreté sont aussi inacceptables. Leur degré d'exigence est en inadéquation avec leur propre laisser-aller administratif. J'ai personnellement assisté à des situations ubuesques. Par exemple, certains prennent leur billet d'avion, constatent par la suite que leur passeport a expiré depuis 2 ou 3 ans et exigent une prolongation immédiate», explique-t-elle. En conclusion, «l'Etat ne prend pas la mesure des difficultés auxquelles vont se heurter les Algériens vivant hors des frontières. Je crains un automne consulaire très chaud», prévient encore la députée.