Chahuté par l'ensemble du Santiago Bernabéu, le pressant de démissionner, Florentino Pérez se retrouve au cœur de la crise qui secoue l'institution blanche. Une situation presque logique, tant les choix présidentiels expliquent le marasme dans lequel se trouve le Real Madrid. «Tu es qui, toi ? Tu as déjà joué au football ? Tu te prends pour qui ?» Sitôt débarqué en zone mixte du Santiago Bernabéu, Marcelo perd ses nerfs. La première question, concernant l'attitude des Merengues durant le Clasico, suffit à le faire sortir de ses gonds. En soi, l'illustration la plus claire du mal-être qui règne dans le vestiaire madridista. Croqué et humilié par l'ennemi blaugrana de toujours, le Real se prépare à vivre des jours pénibles : oui, il vient d'entrer dans une crise dont il a le secret. Simple détonateur, ce revers ne surprend presque personne dans l'ancien Chamartin, tant les Merengues étaient à la peine dans le jeu depuis le début de saison. La première défaite encaissée à Séville laissait ainsi présager d'une déroute face au Barça. De fait, seul l'écart affiché au tableau d'affichage surprend. Une surprise qui, dès la mi-temps, puis au coup de sifflet final, presse le Santiago Bernabéu à exiger la démission de Florentino Pérez, coupable, selon le public blanc, d'être la cause de tous les maux du club. À dire vrai, les aficionados locaux sont loin d'avoir tort. Très loin même. Benítez, coincé entre son vestiaire et son président «Aujourd'hui, comme toujours, mais plus que jamais, Hala Madrid. Et aujourd'hui, ce cri du cœur se traduit par un ‘Florentino démission'.» Carlos Mendoza, président de l'association des Valeurs du madridismo, peine à cacher sa colère. Dégoûté plus que déçu par ce Cl&sico, il quitte le Santiago Bernabéu avec l'envie de renverser le président actuel. Dans l'œil du cyclone, Florentino Pérez concentre toutes les critiques des supporters. Et elles sont nombreuses. La première d'entre elles renvoie à mai dernier, lorsqu'il annonce, en grande pompe, le licenciement de Carlo Ancelotti, adoré par l'aficion et adulé par ses joueurs. Malgré les demandes pressantes de Cristiano Ronaldo et de Sergio Ramos, il préfère se fier à son instinct légendaire et décide de ramener Rafa Benítez a casa. Cette décision, incomprise par l'ensemble de la nébuleuse madridista, offre un crédit plus que limité à l'ancien technicien du Castilla. D'autant plus que ce même Benítez, adepte d'un système compact et d'une organisation presque militaire, se veut en antithèse du coaching à la coule de son prédécesseur. Dès le coup d'envoi de l'exercice, les premiers couacs se font sentir. Premier en bisbille avec le nouveau jefe, Cristiano Ronaldo ne supporte pas son repositionnement. Idem, il ne se sent pas considéré comme la star de l'équipe. Gareth Bale, caprice facturé 100 millions d'euros de Florentino Pérez, trouve, lui, grâce aux yeux du nouveau technicien madrilène. Au jeu des comparaisons, l'importance du Portugais, malgré quelques semaines difficiles, est à des années-lumière du Gallois. Comme lors de ce Clasico, c'est bien l'ancien Spur qui s'est une énième fois mué en fantôme. Telle une ombre, il fait le bonheur du seul Florentino Pérez - qui, lors de cet été, a refusé une offre à plus d'une centaine de millions d'euros de Manchester United. Dans le même sens, comment expliquer la préférence de Benítez pour Danilo en lieu et place de Carvajal ? «C'est l'équipe de Florentino Pérez, ses chouchous doivent jouer», peste Carlos Mendoza, porte-parole de socios désabusés. Pourtant, il ne le sait que trop bien : le premier à trinquer sera Benítez, coupable d'avoir accepté un challenge qu'il ne pouvait relever, et coincé entre les exigences présidentielles et celles de ses poids lourds du vestiaire. Une révolte populaire pour répondre au putsch présidentiel ? Le président de l'association de défense des Valeurs du madridismo, toujours : «Le pire, c'est qu'aucun candidat ne lui fera face aux prochaines élections.» En effet, par un tour de passe-passe administratif, le board actuel a changé les statuts du club. Et donc, les conditions pour qu'un socio se présente aux élections présidentielles… À la suite de la débâcle de ce Clasico, les nombreux chants prônant son départ prennent des airs de révolte populaire. Mais, de la crise institutionnelle jusqu'à la crise sportive, le premier à trinquer se trouve sous la guérite du Bernabéu, non dans sa loge d'honneur. Bien qu'un licenciement de Benítez ne soit pas, encore, à l'ordre du jour, les prochaines rencontres merengues feront office de juges. Dans la manche de Florentino Pérez, une dernière carte lui reste à dégainer. Et elle répond au nom de Zinédine Zidane. Actuellement en tête de son groupe de troisième division, l'entraîneur du Castilla est évoqué par tous les journalistes en charge du suivi du Real Madrid comme le potentiel successeur de Benítez. Ne reste plus qu'une question : quand ?