Tayyip Erdogan, tout auréolé désormais de son nouveau statut de président de la Turquie et d'une majorité au Parlement, vient de lancer sa croisade contre son ennemi juré, l'imam Fethullah Gülen, exilé en Pennsylvanie (Etats-Unis) et son mouvement social «Hizmet» (service en turc). Le nouveau «sultan ottoman» s'est en effet payé les services du fameux et (fumeux) cabinet d'avocats «Amsterdam and LLP Partners», spécialisé dans les activités de lobbying et d'investigation à l'échelle internationale. Pour ce faire, Erdogan n'a pas lésiné sur les moyens détournés en décidant de prélever une enveloppe de «plusieurs millions de dollars» sur les fonds spéciaux alloués à la primature (Premier ministère, NDLR). «Ils ont trahi Tayyip Erdogan», a lâché le chef de l'Etat turc lors d'une émission de télévision, mercredi 18 novembre, en parlant de lui à la troisième personne. «Ils», ce sont les sympathisants du Hizmet, ce mouvement civil d'inspiration religieuse de Fethullah Gülen. Son péché ? Avoir éventé en 2013 via des juges et policiers honnêtes un vaste réseau de corruption qui a touché l'entourage d'Erdogan dont son fils Bilal. Pour le «raïs», ces révélations portaient la signature du «Hizmet» et qu'elles visaient à le renverser. Il ordonna alors la chasse contre toutes les structures proches de la communauté Gülen, dont des centres scolaires, des médias et des établissements financiers. N'ayant pas pu faire taire les «Gülenistes» par les chantages, les pressions et les harcèlements politico-judiciaires, Erdogan opte désormais pour une campagne de lobbying internationale en s'appuyant sur ce cabinet d'avocats dans l'espoir d'arrêter les activités civiques et humanitaires du «Hizmet». Erdogan en fait quasiment une affaire personnelle dès lors que c'est sa gouvernance qui est mise en cause dans les scandales de corruption dénoncés par le mouvement Gülen présent dans plus de 167 pays. «Nous avons un accord sérieux entre un cabinet d'avocats et notre gouvernement, notre Etat. Je pense que très rapidement, nous obtiendrons des résultats. Mais il ne serait pas juste que j'en parle maintenant», a bien confirmé Tayyip Erdogan à la télévision. Le choix du cabinet Amsterdam est motivé par le fait qu'il dispose de liens profonds avec des gouvernements en Afrique où des centaines d'écoles ont été fondées par le Hizmet. Son fondateur Robert Amsterdam s'est fendu d'une déclaration qui va dans le sens de la rhétorique de son mandant Erdogan. «Les activités du réseau Gülen, notamment son infiltration dans la justice et la police turques, et son lobbying politique à l'étranger devraientconcerner tous ceux qui se soucient de l'avenir de la démocratie en Turquie», a-t-il déclaré. Autrement dit, c'est le mouvement «Hizmet» d'inspiration laïque prônant le dialogue interreligieux et l'adhésion à l'Europe quimenacerait la démocratie en Turquie et non pas le régime du «frère» Erdogan qui ferme Facebook, Youtube et Twitter…