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Obama au Caire, ou le nouveau langage de l'Amérique
Salam aleïkoum !
Publié dans Le Temps d'Algérie le 05 - 06 - 2009

Quand on fait de la politique, on ne fait pas dans la dentelle. Il y aurait incompatibilité… Barack Hussein Obama n'échappe pas à cette réalité. Et cela s'est vérifié lorsque l'hôte de la Maison-Blanche s'est adressé, jeudi, aux musulmans à partir de la tribune de la prestigieuse Université du Caire.
Obama a fait très fort, quoiqu'on en dise ! Tout simplement parce qu'il est, probablement, le président américain le «plus américain» qui soit et que les Etats-Unis aient enfanté…
Grâce à ce discours, il vient de prouver à la face du monde, une fois encore, d'abord combien il aime son pays et à quel point il aimerait redorer le blason de la bannière étoilée, fortement ternie par ses prédécesseurs.
C'est ainsi qu'après le discours historique d'Ankara où il affirmait clairement, à l'adresse du monde musulman que «les Etats-Unis n'étaient pas et ne seraient jamais en guerre contre l'islam», Obama a tenu à réitérer au 1 milliard et demi de musulmans son ambition.
Un nouveau départ entre les Etats-Unis et les musulmans
«Je suis venu chercher un nouveau départ entre les Etats-Unis et les musulmans à travers le monde, un départ fondé sur l'intérêt mutuel et le respect mutuel, un départ fondé sur cette vérité que l'Amérique et l'islam ne s'excluent pas», a-t-il souligné.
On ne peut être plus clair et… courageux. En affirmant avec sincérité ce désir, le président américain engage l'ensemble du peuple d'Amérique. Un peuple qui l'a élu pour ses idées et son programme de changement et qui le soutient.
Ce faisant, Obama a sans doute pris le risque de se mettre à dos des lobbys puissants. Mais le fait de s'adresser aux musulmans à partir de la centenaire et prestigieuse Université laïque du Caire, au lieu d'El Azhar, montre toute la «finesse et l'intelligence» du locataire de la Maison-Blanche.
De cette place forte, le discours qu'il a prononcé prend une autre dimension. Humaine, et surtout exempte de toute connotation religieuse, même si Obama s'en est pris à l'extrémisme.
Lutter contre les extrémismes violents
Pour dire implicitement que celui-ci n'a pas sa place dans nos religions et surtout pas dans l'Islam, il précise : «Nous lutterons sans relâche contre les extrémistes violents qui représentent une grave menace pour notre sécurité car les Etats-Unis rejettent la même chose que les gens de toutes les fois : les meurtres d'hommes, de femmes et d'enfants innocents.»
Barack Hussein Obama, fils d'un musulman, a vécu plusieurs années en Indonésie, le 4e pays le plus peuplé du monde et surtout le 1er pays à majorité musulmane. Il sait de quoi il parle et il ne rate, d'ailleurs, aucune occasion de rappeler qu'il compte dans sa propre famille de nombreux musulmans…
Il a souvent fait référence au Coran et est allé même assez loin en évoquant un sujet cher aux musulmans vivant en Occident et particulièrement les femmes et leur liberté de porter ou non un voile.
La première femme voilée à la Maison-Blanche
Au Caire, Obama n'a donc pas fait dans la dentelle quand il a pris la défense du voile islamique et critiqué le fait qu'«un pays occidental dicte les vêtements qu'une musulmane doit porter».
Et, assurément, certains pays se sont sentis visés par cette remarque, vu la politique et les lois discriminatoires qu'ils ont votées à l'encontre du port du voile, particulièrement dans les écoles. La France et la Belgique, pour ne pas les citer, sont de ceux-là.
«On ne doit pas dissimuler l'hostilité envers une religion devant le faux semblant du libéralisme. Je sais qu'il y a un débat sur ce sujet», a martelé le président américain dont l'une de ses conseillères, Dalia Mogahed, américaine d'origine égyptienne est la première femme à porter le voile à la Maison-Blanche !
De là à dire qu'Obama favoriserait les musulmans et l'Islam, le raccourci est facile, surtout quand Israël Katz, le ministre des Transports israélien, déclare : «Le président américain a le droit de tenter de se réconcilier avec le monde musulman et faire concurrence à Al Qaïda ou l'Iran pour conquérir son cœur. Pour notre part, nous devons vérifier que cela ne portera pas atteinte à nos intérêts communs.»
Un discours qui écarte la langue de bois
Le discours très attendu de Barack Obama sera sans doute différemment interprété, surtout quand il aborde la question du Proche Orient et qu'il précise que «la seule solution au conflit avec Israël réside dans celle prévoyant deux États».
Alors, qu'il s'agisse du Proche Orient, de l'Irak, de l'Afghanistan ou de l'Iran où Barack Obama a reconnu publiquement – c'est une première ! – qu'«en pleine guerre froide, les Etats-Unis ont joué un rôle dans le renversement d'un gouvernement iranien démocratiquement élu», le président américain a toujours écarté la langue de bois.
Et cela, peu de présidents US, avant lui avaient osé le faire… C'est aussi cela le nouveau langage de l'Amérique. Et quoi qu'en disent ses détracteurs, ils devraient reconnaître que ce 44e président américain veut réellement changer l'image de cette Amérique qui s'est mise à dos, par son arrogance, tant d'ennemis et dont il a hérité.
Proportionnellement au nombre d'habitants, les USA, plus grand pays musulman de la planète!
Convaincre, rassurer, espérer, tendre la main, croire… En fait-il trop alors quand il affirme dans une interview à Canal Plus que «les Etats-Unis et le monde occidental doivent apprendre à mieux connaître l'islam et que, d'ailleurs, si l'on compte le nombre d'Américains musulmans on voit que les Etats-Unis sont l'un des plus grands pays musulmans de la planète» ?
Non, Obama semble seulement vouloir tenir ses promesses de campagne. Et en cela, sa «feuille de route» est réglée comme du papier à musique.
Il sait ce qu'il veut, où il va et comment y arriver.Certes, tout le monde l'attend au tournant. Des virages, il en aura beaucoup à négocier tellement il y a des sujets brûlants dans le Bureau ovale. Mais Obama y croit, il a cette audace d'aller au front et n'hésite pas à mouiller son maillot.
En Irak, en Afghanistan, en Palestine, au Pakistan, en Israël et dans les territoires occupés comme à Ghaza ou ailleurs en Asie, ce langage, cet engagement et cette volonté affichée de changement radical de la politique américaine, devraient recueillir un écho sinon favorable, du moins attentif.
Obama n'est pas un messie
Il est sans doute légitime de s'attendre à ce qu'Obama suive ses paroles par des gestes. Mais cela voudrait dire alors qu'Obama est considéré comme un «messie» par ses pairs. Et cela le locataire de la Maison-Blanche n'en veut pas, car l'image lui rappelle trop l'arrogance de ses prédécesseurs. Image qu'il cherche justement à effacer de tous les esprits.
Assurément, Obama ne pourra jamais rien régler tout seul, si les autres parties n'en ont pas la volonté et le désir.
Ce qu'il pourrait – et c'est ce qu'il s'évertuera de faire –, c'est de peser de tout le poids de son pays dans toutes les négociations à venir.
Et pour cela, Hussein Barack Obama y semble déterminé…Depuis son investiture, il est en train de mener une véritable «révolution»… Rendez-vous compte : même la puissante Aipac, le principal lobby pro-israélien à Washington qui est capable d'influer très fort sur le Congrès américain semble avoir donné du lest et accepté du bout des lèvres – mais accepté quand même – la solution à deux Etats.
Aussi, si Ben Laden ou ses sbires, si des extrémistes sionistes ou musulmans continuent encore dans leurs errements, persistent dans leur folie meurtrière ou croient qu'ils abuseront encore des peuples qui n'aspirent qu'à la paix, alors ils se trompent lourdement !


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