Bien qu'absent physiquement depuis plus de 17 ans, Matoub Lounès reste présent partout en Kabylie et dans le monde à travers ses chansons et son engagement pour l'identité berbère et la démocratie. A l'occasion de la commémoration du 60e anniversaire de la naissance du chanteur kabyle, Matoub Lounès, la Fondation qui porte son nom a concocté un riche programme pour évoquer cette date du 25 janvier 1956, qui a vu la naissance de celui qui restera à jamais gravé dans le cœur de ses adeptes. Au menu de ces festivités entamées hier, une exposition de photos et d'articles de presse sur le combat et l'œuvre artistique de Matoub au siège de l'association à Taourirt Moussa, dans la commune d'Ath Mahmoud, daïra d'Ath Douala. Les visiteurs auront ainsi l'occasion de revisiter l'œuvre monumentale et immortelle de ce monstre sacré de la chanson kabyle assassiné le 25 juin 1998 lors d'une embuscade tendue par un groupe armé à Thala Bounane sur la route de Beni Douala. Des photos inédites de Matoub prises dans les quatre coins du monde avec des personnalités politiques, sportives et artistiques seront exposées aux visiteurs. Il est également question d'une rencontre citoyenne autour d'une waâda traditionnelle devant la maison du chanteur, suivie du coup d'envoi du concours des jeunes talents Lounès-Matoub dans sa première édition. La Fondation éponyme a rendu publique une déclaration avant-hier dans laquelle elle est revenue brièvement sur la naissance et le parcours de l'artiste qui a marqué des générations de mélomanes. «Lounès Matoub est né il y a 60 ans, le 24 janvier 1956 à Taourirt Moussa en Kabylie. Il reste le chantre le plus populaire et le symbole de l'amazighité, de la liberté et du droit à la différence. La vie de Lounès Matoub aura été brève et intense. Le patrimoine qu'il a laissé est immense, ce qui fera de cette année, une année riche en événements autour de sa mémoire car nombre de ses chansons demeurent dans l'inconscient collectif.» Kateb, Issiakhem et Zamoum honorés La commémoration de l'anniversaire de la naissance de l'artiste a coïncidé également avec l'attribution du 9e prix «Matoub Lounès contre l'oubli», initié par l'association Amgud de Draâ El Mizan, dans la wilaya de Tizi Ouzou. Cette distinction a été décernée avant-hier, à titre posthume, à Kateb Yacine, M'hamed Issiakhem et Ali Zamoum, lors d'une cérémonie organisée à la Maison des jeunes de Draâ El Mizan en présence de Malika Matoub, la sœur de Lounès et présidente de la Fondation et des membres des familles des trois lauréats. «Notre choix, cette fois-ci, pour ces trois personnalités, a été fait parce qu'elles ont un dénominateur commun. Ce sont de grands hommes qui ont fait l'Histoire de ce pays. Il s'agit de Kateb Yacine, M'Hamed Issiakhem et Dda Ali Zamoum», dira Malika Matoub pour justifier le choix des destinataires de ce 9e prix Lounès-Matoub, contre l'oubli. Malika Matoub a révélé à cette occasion qu'après l'assassinat de son frère, le grand révolutionnaire Ali Zamoum avait beaucoup aidé la famille Matoub pour créer la Fondation en rédigeant notamment le préambule de la Fondation. «Nous lui sommes reconnaissants», fera-t-elle savoir à l'assistance. Revenant sur l'assassinat et surtout le procès de son frère, Malika Matoub qui milite depuis plus de 17 ans en compagnie de sa mère, Nna Aldjia, pour faire éclater la vérité, est revenue de nouveau à la charge. «Nous ne demandons qu'une chose, dix-huit ans après l'assassinat de Lounès, que la procédure soit recommencée du début. Il faudrait une reconstitution des faits, une autre enquête, une étude balistique et entendre la liste des 55 témoins que j'ai remise à la justice parce que des noms d'hommes politiques y figurent et ils pourront apporter des faits importants. Mais je ne peux pas oublier de vous dire que durant toute cette période ma famille a tellement souffert. En plus des procès à notre encontre, il y a eu des paroles blessantes. Ma mère a été traitée de mère porteuse, de mère biologique et de dévoreuse d'os. C'était vraiment pénible pour une mère qui a perdu son fils unique. Mais je suis sûre qu'un jour la vérité éclatera», lance-telle à l'assistance.