Les dossiers de mémoire longtemps restés en suspens entre l'Algérie et la France semblent enfin bénéficier du plus haut intérêt des deux capitales. PARIS paraît tout à fait disposé à l'ouverture et au traitement de ces dossiers, plusieurs fois à l'origine de malaise et de crispation diplomatiques entre les deux pays. Les questions relatives aux archives, celle traitant des disparus algériens durant la Guerre de libération nationale ainsi que la question des essais nucléaires dans le Sahara algérien sont, depuis mardi à Paris, au coeur de discussions importantes entre le ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, côté algérien, et Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'Etat, côté français. Signe de bonne volonté, la France qui reçoit le ministre algérien affiche une mine positive, ce que ne manquera pas de noter Tayeb Zitouni qui a pu constater une «réaction positive de la partie française». Pour lui, «il est grand temps pour l'Algérie et la France de traiter tous les dossiers liés à la question de la mémoire commune et les prendre sérieusement en charge et en toute responsabilité». D'autant plus, ajoutera-t-il, qu'une «forte volonté» anime aujourd'hui les deux pays pour régler toutes les questions qui fâchent. Le ministre des Moudjahidine a soutenu que les deux parties doivent se baser sur la question de la mémoire, par le biais d'une «lecture responsable », afin de construire l'avenir des générations actuelles et prochaines au profit des deux peuples. Sous le signe de la confiance Inédite, la visite du ministre des Moudjahidine en France est perçue, à Paris comme à Alger, comme étant une marque de confiance qui tombe à point nommé. Déjà qu'elle (la visite) intervient dans un moment où le couple Alger- Paris connaît un réchauffement sans précédent. Le traitement de la mémoire commune pourrait alors ouvrir une nouvelle ère pour les deux pays. «Jamais un ministre des Moudjahidine algérien n'est venu en France en visite officielle. C'est là le sens de l'apaisement de nos mémoires respectives », a déclaré Jean- Marc Todeschini. Tayeb Zitouni dira, pour sa part : «Ma visite s'inscrit dans le cadre de l'instauration de la confiance entre les deux pays. Vous savez tous que les relations algéro-françaises connaissent un développement visible et sensible dans les domaines politique, économique, industriel, commercial et culturel. Il ne restait, cependant, que la question de mémoire qui pouvait nuire aux solides relations entre les deux pays». Le ministre des Moudjahidine a indiqué, par ailleurs, qu'il a évoqué avec le secrétaire d'Etat français tous les dossiers inscrits au programme de sa visite, notamment ceux liés aux archives, aux disparus durant la Guerre de libération et aux essais nucléaires français au Sud algérien durant la colonisation. «Je suis porteur d'un message clair aux Français pour leur exprimer la volonté de l'Algérie de consolider les relations entre les deux pays pour qu'elles soient bénéfiques pour les peuples des deux pays», a-t-il souligné, avant d'ajouter que ces relations, à travers les orientations des chefs d'Etat, Abdelaziz Bouteflika et François Hollande, «évoluent dans le bon sens». Sur le plan technique, le ministre algérien a annoncé que les deux parties se sont entendues pour que la question des archives soit abordée dans le cadre de la prochaine réunion de la Commission intergouvernementale de Haut niveau (CIHN) qui se tiendra au mois de mars à Alger. Le ministre algérien a, d'autre part, annoncé la mise en place prochaine d'une commission mixte qui devra se réunir le 11 février prochain pour étudier la question des disparus. Le troisième dossier qui concerne les essais nucléaires, Tayeb Zitouni a indiqué que la commission qui en est chargée devra aborder l'indemnisation des victimes, sans oublier l'aspect environnemental. De son côté, Jean-Marc Todeschini a affirmé qu'il était «temps de mettre nos actes et nos gestes dans les paroles des deux chefs d'Etat qui demandaient que les mémoires douloureuses des deux pays soient apaisées ».