Dans cet entretien, Abdelkader Bendamèche, président du conseil national des arts et des lettres, nous parle de la carte professionnelle des artistes, de la couverture sociale, du projet de textes des relations de travail, du fichier national des artistes et de la nomenclature des métiers artistiques. En tant qu'artiste spécialisé dans le domaine musical, Abdelkader Bendamèche répond à nos questions sur ce sujet. Le Temps d'Algérie : Nous savons que beaucoup d'artistes ont eu leur carte professionnelle, comment se présente la situation actuellement ? Abdelkader Bendamèche : Cette action se déroule dans de bonnes conditions et les artistes viennent déposer leurs dossiers. Je vous informe que ce décret est opposable à toutes les institutions du pays, en particulier la Cnas, directement concernée par cette action. Je dirai aussi que ce n'est pas le ministère de la culture qui a piloté cette opération, mais le ministère du travail. Nous dépendons du ministère de la culture pour la question culturelle, mais en ce qui concerne l'application des textes c'est le ministère du travail qui s'en occupe. D'ailleurs il est le premier à appliquer ce décret et à ouvrir ses agences aux artistes. A notre connaissance, au départ les artistes n'étaient pas vraiment convaincus qu'un jour le projet du statut de l'artiste verrait le jour, qu'en est-il aujourd'hui ? Il est vrai qu'au départ les artistes étaient sceptiques quant à la concrétisation de cette opération, mais plus maintenant, puisque plus de 3000 cartes ont été remises aux artistes sur les 5000 demandes déposées. Maintenant que la question de la carte est évacuée, nous passons à la deuxième étape qui concerne les relations de travail. C'est-à-dire les relations de l'artiste avec les autres. Par exemple pour un peintre, ses relations avec les galeries, les entreprises privées, la même chose pour un chanteur, un comédien… Ces relations seront réglementées par un contrat, c'est-à-dire que chaque opération effectuée par un artiste sera sanctionnée par un contrat, car l'artiste ne peut pas être employé, d'ailleurs lui-même, il refuse. Donc, il leur faut une réglementation adaptée. L'autre chose qui les concerne est l'identifiant fiscal, puisque l'artiste cotise à la sécurité sociale. donc pour être actif, il doit participer à la fiscalité en conformité avec les règles de la société comme cela se fait à travers le monde. Ainsi la protection sociale est opérationnelle. Que reste-t-il encore pour l'accomplissement du statut de l'artiste ? Avant c'était de l'empirisme, mais avec le prochain décret, l'artiste deviendra autonome. Il pourra avoir un cachet et signer un contrat… Il reste aussi d'autres choses qui sont urgentes, tel le fichier national de l'artiste. Au départ, déjà pour avoir sa carte, l'artiste remplissait une fiche de renseignements qui accompagne le dossier, ainsi que deux photos. Cette fiche nous permet de recenser tout ce que nous avons déjà et à partir de ces renseignements on peut connaître le nombre d'artistes dans les différents métiers. Ces informations serviront d'appoints aux institutions du pays. C'est une mission importante qui est prévue dans le décret de 2011, puis avec ces informations, on pourra établir la nomenclature des métiers artistiques. Aussi, le conseil se réunit pour faire des propositions sur différents sujets touchant tous les domaines culturels et artistiques. En tant qu'artiste spécialisé dans le domaine musical, que pensez-vous de la situation de la musique en Algérie ? Je peux dire que chaque génération produit sa propre musique et notre pays ne peut pas être en dehors de ce qui se fait dans le monde. Et ce qui se passe par exemple au Caire, en France ou ailleurs se passe en Algérie. Nous avons eu des périodes de lumières, lorsqu'on avait chez nous Ahmed Wahbi, Mahboub Bati, El Anka, Abdelkrim Dali, Dahmane Benachour, il y avait en Egypte Oum Keltoum, Mohamed Abdelwahab, Abdelhalim Hafez, en France il y avait Jacques Brel, Edith Piaf, Georges Brassens …, en Italie il y avait Pavarotti, la même chose pour les autres pays. Aujourd'hui c'est l'introduction des machines à sons et l'informatisation de la musique. Donc on constate que beaucoup de choses ne sont pas consistantes sur le plan de la mélodie, sur le plan identitaire ou de la mémoire musicale, ça c'est aussi la conséquence de la modernité. Le travail se fait à l'aide des boîtes à rythmes et l'apport de l'être humain est minime. Je sais qu'il viendra un jour où la mémoire reviendra et l'être humain reprendra sa place, que le son acoustique va revenir, car une machine ne pourra pas remplacer l'être humain surtout dans le domaine de l'art, car la musique électronique est sans âme. Lorsqu'on parle de musique actuelle, cela n'a pas de sens. Entretien réalisé