Les multiples déclarations du ministre de l'Agriculture, celles du président-directeur général de la Banque algérienne de développement rural (Badr), les innombrables placards et spots publicitaires, les dépliants et affiches vantant le nouveau produit de la Badr n'ont pas eu l'effet escompté sur le terrain, les embûches bureaucratiques ayant pris le dessus. En effet, les fellahs de Aïn Defla, qui ont accueilli avec espoir cette formule de crédit sans intérêts, remboursable dans un délai allant de 12 à 18 mois, se sont heurtés au réflexe bureaucratique des «banquiers». Au lancement de ce produit en septembre 2008, à la veille des labours-semailles et de la campagne de semence de la pomme de terre de saison, le premier responsable de cette banque n'exigeait dans le dossier de crédit qu'une carte d'agriculteur valide, une attestation de jouissance ou un contrat de location, à défaut d'un acte de propriété, un numéro de compte au niveau de la Badr et une déclaration sur l'honneur engageant le fellah à livrer sa production à la CCLS quand il s'agit des céréales, ou pour adhérer au Syrpalac pour les autres produits maraîchers, la pomme de terre entre autres. Tracasseries administratives L'application de ce dispositif est due au fait que les agences primaires exigent l'acte de propriété des terres, la carte de fellah délivrée par la Chambre nationale d'agriculture, une étude du projet (culture de céréales ou production de pomme de terre), une mise à jour des cotisations de la Casnos, une garantie dont la valeur est égale au crédit demandé et… une attestation de non-endettement au niveau des institutions bancaires. Ces documents sont obligatoires si le montant du crédit ne dépasse pas les 4 millions de dinars. Si le montant du crédit est supérieur à 4 millions de dinars, les «banquiers» réclament l'hypothèque des terrains bâtis, comme ce fut le cas pour Chachou Abdelkader qui avait demandé un crédit de 35 millions de dinars mais qui s'est vu octroyer que 7 millions de dinars, après une attente de 6 mois ! Ce fellah, qui s'était vu décerner la médaille du premier producteur de pomme de terre de consommation à travers le territoire national, avait planté 230 ha de ce tubercule, pensant que la banque allait régler les factures de ses fournisseurs de semences et d'engrais. «Si j'avais su que mon crédit ne me serait pas accordé, j'aurais emprunté cette somme chez un ou deux fellahs», dira-t-il avec déception. Le crédit Rfig ne concerne pas les petits fellahs des zones rurales car ces derniers sont bloqués au premier document, leurs terres étant dans l'indivision. Il est à signaler que la direction régionale de la Badr a notifié 214 dossiers de crédit pour un montant total d'environ 23 milliards de centimes, seulement certains de ces bénéficiaires de crédit doivent compléter leur dossier pour pouvoir utiliser leurs comptes. «El mandba kbira ouel meyet far», une expression signifiant «la montagne qui accouche d'une souris», est la qualification donnée par Hadj Djallali, président de la chambre de l'agriculture de la wilaya de Aïn Defla, au crédit Rfig. Un grand fossé sépare la théorie de la pratique, conclut ce responsable.