La visite du Premier ministre français, Manuel Valls, intervient dans un contexte marqué par quelques petites tensions entre Alger et Paris. Risquent-elles pour autant de nuire aux relations algéro-françaises ? Pas si sûr. Les enjeux économiques sont tellement grands que les deux Etats n'ont pas intérêt à tomber dans le piège des «manipulations médiatiques». Entre Alger et Paris, les relations bilatérales ont connu un réchauffement sans précédent ces dernières années. Jamais la lune de miel entre les deux pays n'a duré autant. Elles semblent cette fois-ci se heurter à quelques crispations que les deux Etats auraient pourtant volontiers évitées. A Alger, le scandale mondial des «Panama Papers», mais surtout à cause du traitement des médias français réservé à cette affaire, a provoqué un malaise au plus haut sommet de l'Etat. Il aurait fallu, mercredi soir, l'intervention du ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, en personne pour protester officiellement auprès des autorités françaises. Le diplomate algérien a en effet élevé une protestation énergique auprès de l'ambassadeur de France, Bernard Emié, qui a été convoqué au siège du ministère des Affaires étrangères suite à «la campagne de presse hostile à l'Algérie et à ses institutions, menée en France dans différents médias». Le ministre des AE «a fait valoir le fait que ladite campagne malveillante et fallacieuse – que l'invocation de la liberté de la presse ne saurait aucunement justifier – a atteint son paroxysme avec des manipulations diffamatoires délibérément dirigées contre l'institution présidentielle», a indiqué un communiqué du ministère des Affaires étrangères. Lamamra a, dans ce contexte, «souligné la nécessité morale et politique que des autorités françaises qualifiées marquent clairement leur réprobation de cette campagne qui est incompatible avec la qualité et le niveau des relations algéro-françaises», ajoute la même source. Cette brouille risque-t-elle pour autant de nuire aux relations algéro-françaises ? Pas si sûr ! Les enjeux économiques sont tellement grands que les deux Etats n'ont pas intérêt à tomber dans le piège des «manipulations médiatiques». La raison économique Premier investisseur hors hydrocarbure en Algérie, la France joue gros sur la rive Sud. Sa présence en Algérie s'est nettement élargie constituant désormais un réseau de 400 entreprises sur le sol algérien alors que près de 40 000 expatriés français sont présents en Algérie. Paris sait que seule une relation saine et un partenariat gagnant-gagnant sont en mesure de fructifier les échanges commerciaux et de hisser une relation économique avec l'Algérie à son plus haut niveau. Manuel Valls fera tout pour dissiper cette fâcherie qui tombe mal. La raison économique inscrite au premier plan entre les deux pays, l'emportera à coup sûr. Alger, qui a cumulé excédent commercial, croissance soutenue et faible endettement une décennie durant, a vu sa situation économique se détériorer à toute allure du fait de l'effondrement des cours du pétrole. Les autorités sont conscientes de la gravité de la situation. La diversification de l'économie est inscrite au premier plan sur le calendrier gouvernemental. Et dans ce domaine, Alger voit d'un bon œil le déplacement du Premier ministre français accompagné par une délégation forte de 10 ministres. Une visite qui a pour objectif de prendre part au 3e round du Comité intergouvernemental de haut niveau, qui se déroulera à Oran. Il s'agira également de booster le partenariat entre les deux pays et faire le point sur les projets bilatéraux et leur taux de mise en œuvre. Le Premier ministre français profitera aussi de cette visite pour finaliser d'autres accords économiques, dont celui de la réalisation de l'usine Peugeot à Oran. Les domaines de l'agriculture et de l'agroalimentaire, de la construction, des énergies renouvelables, de la grande distribution, des loisirs, du numérique et des télécommunications, de la santé et de la sous-traitance mécanique (automobile et ferroviaire) feront également l'objet de discussions approfondies entre les deux parties. Le programme s'annonce donc chargé. Pas le temps de s'embrouiller !