Le procès opposant le groupe El Khabar au ministère de la Communication a lieu ce matin au tribunal de Bir Mourad Raïs, à Alger. Cette affaire, qui a fait couler beaucoup d'encre, va être tranchée après avoir été reportée la semaine dernière par le juge, à la demande de la défense pour lui permettre d'étudier le dossier. Le groupe El Khabar, devant passer aux mains de la filière de Cevital «Ness Prod» en vertu d'une transaction controversée et contestée par les pouvoirs publics, a provoqué une large mobilisation, notamment en faveur de la cession du groupe de presse à l'homme d'affaires Issad Rebrab. Journalistes, hommes politiques, organisations de la société civile n'ont pas hésité à exprimer leurs marques de solidarité à l'endroit d'un journal «dont l'ancrage dans la société et la qualité éditoriale ne sont plus à prouver.» L'ampleur de cette affaire, jugée par les uns comme étant un simple litige commercial entre le ministère de la Communication et le groupe Cevital a vite dépassé ce cadre pour déborder sur le champ politique. Plusieurs partis de l'opposition, dont le RCD, le PT, Talaie el Houriyat, ont crié au «harcèlement judiciaire et dénoncé les atteintes à la liberté de la presse et d'expression». Les marques de soutien se sont même intensifiées ces derniers jours. Mais il n'y a pas que de soutien. Ahmed Ouyahia, fraîchement reconduit à la tête de son parti, le RND, a exprimé un avis plus nuancé. S'il n'a pas tari d'éloges sur «ce grand journal» (El Khabar NDLR), il n'a pas manqué non plus de décocher une fléchette en direction de Rebrab, sans le nommer, coupable, d'après lui, d'avoir «politisé l'affaire». De son côté, Karim Tabbou a indiqué hier sur les colonnes d'El Khabar que «ce journal a donné une leçon de militantisme pour la liberté». Le leader du parti UDS, non agréé, pense que les contraintes et les pressions auxquelles fait face le journal El Khabar sont «une occasion pour les forces politiques de se pencher sur la situation des libertés et militer pour le respect de la création et de la réflexion», a indiqué Karim Tabbou. Et de rappeler que «l'affaire El Khabar est intimement liée aux luttes démocratiques». Même son de cloche chez le Syndicat national des journalistes (SNJ). Ce dernier dénonce dans un communiqué les «pressions exercées» sur la presse. «Ce qui n'était qu'une transaction commerciale entre deux parties consentantes, en l'occurrence le groupe El Khabar et le groupe industriel Cevital, avec, en prime, la préservation des intérêts de l'ensemble des salariés de notre confrère El Khabar, dans toutes ses filiales, vire brutalement à une nouvelle forme de pression du pouvoir sur la presse», a regretté le SNJ qui a appelé à la mobilisation. Pas en reste, Reporters sans frontières (RSF) a exhorté, pour sa part, les autorités algériennes «à abandonner le référé» entrepris auprès du tribunal de Bir Mourad Raïs pour annuler le rachat du groupe El Khabar par une filiale de Cevital. Dans un communiqué publié sur son site internet, cette organisation a appelé l'Etat algérien à «respecter les choix des propriétaires du quotidien arabophone indépendant El Khabar» de céder leurs parts à la société NesProd.