Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a affirmé hier au Palais de la culture, à Alger, que l'Exécutif a décidé de mettre fin à l'anarchie qui règne dans le secteur et menace les chaînes de télévision privées, qui n'obéissent à aucune éthique, de fermeture. «Le gouvernement a chargé le ministre de la Communication d'assainir la situation dans les meilleurs délais, en attendant la mise en place de l'Autorité de régulation de l'audiovisuel qui interviendra dans les prochaines semaines», a-t-il déclaré dans un discours prononcé à l'occasion d'une opération de destruction d'un lot de deux millions de supports audiovisuels piratés. Sur un ton coléreux, Sellal a précisé que «toutes les télévisions qui se conformeront au cahier des charges seront agréées en tant que chaînes algériennes bénéficiant de toutes les mesures de soutien et d'encouragement prévues par la loi». Quant à celles qui ne respecteront pas ce cahier des charges, elles se verront interdire l'activité, a-t-il ajouté. Après avoir laissé faire depuis plus de trois ans, le gouvernement décide de mettre de l'ordre dans le secteur de l'audiovisuel. Le Premier ministre a souligné que parmi 60 chaînes existantes, cinq seulement sont agréées. Le plus dramatique c'est que, de l'aveu de Sellal, «certaines chaînes versent plus dans la publicité mensongère, la violation de la vie privée, l'atteinte à la dignité des personnes, la désinformation et, plus grave encore, des attaques contre la cohésion de la société algérienne avec des appels à la haine, au régionalisme et à la fitna». L'orateur n'a pas nommé les chaînes concernées mais elles se reconnaissent certainement d'elles-mêmes. Il a regretté la vulgarisation de l'insulte et l'invective et déploré que le paysage audiovisuel est «pollué et dévoyé par une minorité mue par l'appât du gain ou des desseins encore plus vils». Mais le gouvernement qui a observé la posture d'un spectateur semble avoir décidé d'agir et de sévir. «Il est temps que nos concitoyens sachent la vérité et que la loi s'applique à tous dans l'équité et la transparence», a-t-il dit sur un ton déterminé, affirmant qu'on a touché aux valeurs morales des Algériens. Dans son discours, Abdelmalek Sellal a reconnu que depuis la promulgation de la loi sur l'audiovisuel, les autorités ont permis un démarrage désordonné «en espérant une autorégulation et une décantation qui ne sont pas, hélas, venues». Mais, s'est-il engagé, «à compter de ce jour, aucun dépassement ne sera plus toléré et la loi sera appliquée dans toute sa rigueur et en toutes circonstances. Je le dit en présence de tous les ministres du gouvernement et de tous les services concernés». Le Premier ministre qui met en garde de manière directe les chaînes qui diffusent des discours haineux a appelé à cesser la pratique du chantage, la diffamation, la violation du secret de l'instruction judiciaire et la pression sur les cadres de l'Etat. Il a dénoncé le transfert illicite de devises pour louer des fuseaux satellites, le maquillage de revenus publicitaires dans des boîtes de communication et la fraude fiscale. A ceux qui veulent utiliser l'audiovisuel pour servir des intérêts personnels ou nuire à l'Algérie, Sellal assure que «leur adversaire n'est pas seulement le gouvernement, mais le peuple qui rejette votre amateurisme et vos funestes projets». Les menaces de Sellal ne sont pas adressées uniquement aux chaînes de télévision non soucieuses de l'éthique. Elles sont également destinées aux agents de l'Etat, quel que soit leur niveau de responsabilité. «Ils ne peuvent ni ne doivent adopter dans leurs activités publiques des positions ambiguës quand il s'agit des fondements et des valeurs de la nation», a-t-il lancé, promettant que «tout manquement sera sanctionné».