L'histoire de la Terre est ponctuée d'extinctions de masse qui, par cinq fois, ont détruit jusqu'à 95% des espèces. Pourtant, seule la disparition des dinosaures a retenu l'attention du public. Les chercheurs s'accordent sur un point : sur les dizaines de milliards d'espèces qui ont vécu sur Terre, à peine une sur mille serait encore en vie. On peut donc en déduire que l'extinction des espèces fait partie intégrante de l'évolution et n'est absolument pas un accident de parcours. La dernière datation effectuée sur le cratère du Yucatan remet totalement en cause les motifs de l'extinction des dinosaures. Les principales extinctions On ne peut pas isoler la disparition des dinosaures des autres disparitions d'espèces. Pour comprendre et peut-être un jour trouver les preuves irréfutables des causes de l'extinction des dinosaures, il est indispensable d'analyser cette extinction dans un contexte plus général. On sait qu'au moins à cinq reprises, la majorité des espèces a été balayée de la surface terrestre (les cinq grandes extinctions). Ces cinq extinctions de masse ont été séparées par de petites vagues d'extinctions. Chacune d'entre elle a modifié considérablement le cours de l'évolution. Des espèces secondaires sont devenues dominantes par exemple. On pourrait presque penser que l'évolution a besoin de ces «désastres» pour pouvoir repartir et engendrer une plus grande diversité. Extinction de masse de l'Ordovicien (438 Ma) Cause invoquée : refroidissement du climat Contexte : la vie animale n'existait pratiquement que dans la mer. Toutes les terres immergées se trouvaient au sud de l'équateur. Un continent géant «Gondwana» était recouvert d'une vaste calotte glaciaire. Pourcentage de disparitions : 50% Disparitions principales : Brachiopodes, Trilobites u Extinction de masse du Dévonien (367 Ma) Cause invoquée : Changement climatique Contexte : Climat chaud et clément. Niveau des mers élevé dû à la fonte de la calotte glaciaire Pourcentage de disparitions : 40% Disparitions principales : ammonoïdes, gastéropodes, nombreux groupes de poissons Goniatites, un mollusque protégé par une coquille Extinction de masse du Permien (245 Ma) Cause invoquée : activité volcanique; changement climatique ; formation de la Pangée. Contexte : la Laurasie et le Gondwana entrent en collision à la fin du Permien ce qui forme la Pangée. Le climat devient chaud et aride puis redevient froid. Pourcentage de disparitions : 75% sur terre. 95 % dans les océans. Disparitions principales : 81% des familles d'amphibiens. 75% des familles de reptiles dont les Pelycosaures. 50% des animaux marins. L'extinction de la fin du Permien est considérée comme la plus importante qui ait jamais existée. On estime que seulement 4% des espèces ont survécu.
Extinction de masse du Trias (208 Ma) Cause invoquée : Changement climatique Contexte : morcellement de la Pangée ; climat qui se refroidit au fur et à mesure que les deux continents nord et sud s'éloignent l'un de l'autre. Pourcentage de disparitions : 45% Disparitions principales : Rhynchocéphales, Dicynodontes; une grande partie des cynodontes. Pertes massives marines : poissons, oursins …
Extinction de masse du Crétacé (65 Ma) Cause invoquée : impact d'une météorite. Eruptions volcaniques. Contexte : La Pangée se divise en deux continents : la Laurasie et le Gondwana. Ces deux continents se disloquent pour former les continents actuels. Changement climatique important qui entraîne la montée des océans (200 m de plus par rapport à aujourd'hui) Pourcentage de disparitions : 45% Disparitions principales : dinosaures. Reptiles marins et volants. Outre les dinosaures. de nombreuses autres espèces se sont éteintes. On peut citer par exemple certains mammifères marsupiaux. Dans les mers, ont disparu, outre les reptiles marins, des poissons téléostéens, les ammonites et plus de la moitié des différentes familles planctoniques. Une datation qui remet tout en question Jusqu'à présent, la théorie de la chute d'un astéroïde faisait quasiment l'unanimité, malgré quelques objections périodiques. Des chercheurs américains remettent à nouveau cette hypothèse en cause. En effet, ils viennent de montrer que le cratère, situé au Mexique, serait antérieur de 300 000 ans à la fin de la domination sur Terre des dinosaures, il y a 65 millions d'années. C'est au fin fond du Yucatan (nord-est du Mexique), que se situe le cratère, baptisé Chicxulub, considéré comme étant le lieu d'impact entre notre planète et un astéroïde géant qui aurait provoqué la grande extinction de la fin du Crétacé et entraîné la disparition des dinosaures. Gerta Keller et des collègues de l'université de Princeton dans le New Jersey (Etats-Unis) ont fait des mesures géologiques sur le cratère. Selon leurs estimations, ce dernier se serait formé, il y a environ 300 000 ans avant l'extinction des dinosaures. Les travaux de Gerta Keller, publiés dans les Proceedings of the National Academy of Sciences du 2 mars, relancent donc le débat sur la, ou les causes, à l'origine du désastre. Points communs entre les extinctions de masse et celle du Crétacé On constate qu'à chaque extinction de masse, les fossiles révèlent un changement climatique important et/ou une dérive des continents très marquée. A la fin du Crétacé, une dérive spectaculaire des continents s'est effectuée. On sait que ces dérives provoquent des tremblements de terre, des éruptions volcaniques, un changement du climat et un changement du niveau des océans. On assiste, dans ce cas précis, à une montée particulièrement importante du niveau des mers. Imaginez la Terre aujourd'hui avec un niveau des mers de plus de 200 m par rapport au niveau actuel. Tout réchauffement du climat entraîne une fonte des calottes glaciaires. C'est ce qui se passe d'ailleurs actuellement. Quand le niveau des mers monte, des terres entières se retrouvent submergées. Tous les tremblements de terre et les éruptions volcaniques sont dus à la dérive des continents. Cette dérive est lente mais continuelle. Elle provoque également un changement mondial du climat. C'est pourquoi on parle d'âges glaciaires et de périodes interglaciaires. Nous sommes actuellement dans une période interglaciaire. Des désastres à intervalles réguliers ? Personnellement, je penche pour un cycle régulier entraînant ce qu'on appelle des extinctions de masse ou non. Cette théorie a été avancée par D. Raup et J. John Sepkoski en 1983. D'après ces deux chercheurs, une extinction se serait produite à un intervalle d'environ 26 millions d'années sur les 250 derniers millions d'années. Il est exact que cette périodicité coïncide avec certaines extinctions mais pas toutes et la précision de la datation est insuffisante sur des couches dont l'ancienneté dépasse 100 millions d'années. De ce fait, leur théorie a été rejetée par une majorité de scientifiques. Cependant, des cycles immuables existent bien : périodes glaciaires et interglaciaires, formation du super continent puis dislocation de la Pangée, montée et descente du niveau des mers … Que ces cycles ne soient pas aussi précis que les horloges suisses ne changent rien à l'affaire : ils existent. Non seulement, ils existent mais il est évident qu'ils entraînent des bouleversements importants dans la faune et la flore. Il est grand temps que l'image de la météorite percutant la Terre dans une gerbe de feu et entraînant dans son sillage la mort des dinosaures soit reléguée dans la rubrique science-fiction. Les dinosaures victimes de la malchance ? Il y a un point important mais que l'on oublie trop souvent : les dinosaures étaient déjà largement sur le déclin à la fin du Crétacé. Le nombre de fossiles retrouvés au Jurassique et au Crétacé est là pour le prouver. On ne peut donc pas parler de catastrophe subite. Leur disparition était prévisible pour ne pas dire programmée. Une espèce est d'autant plus fragilisée par les agressions imprévues (changement climatique, éruptions …) qu'elle est déjà sur le déclin. Pourquoi ce déclin ? Je pense que le morcellement de la Pangée amorcée au Jurassique en est la principale cause. Tout changement climatique à l'échelon mondial entraîne une modification de la faune et de la flore. Il ne faut pas oublier que l'on doit réfléchir en millions d'années. Pourquoi certaines espèces et pas d'autres ? Les besoins alimentaires d'un diplodocus ne sont évidemment pas les mêmes que ceux d'un rongeur. Qui dit changement de la flore, dit problème pour les animaux qui s'en nourrissent. Les carnivores, eux, sont tributaires des herbivores. Imaginons que l'Afrique connaisse un climat tropical et que la savane soit remplacée par une forêt dense comme en Amazonie. Des troupeaux de gnous, de zèbres ou de gazelles pourraient-ils y survivre ? Certainement pas. C'est toute la chaîne alimentaire qui s'en trouverait perturbée. Effectivement, d'une certaine manière, on peut dire qu'à chaque extinction certaines espèces ont de la malchance mais en aucune façon l'évolution ne choisit volontairement telle ou telle espèce. Toujours est-il que l'on ne peut toujours pas expliqué l'aspect très sélectif de l'extinction de la fin du Crétacé. La taille des espèces est un élément à prendre en compte mais certainement pas l'élément déterminant.