Selon la presse égyptienne, la justice de ce pays aurait entamé des poursuites à l'encontre du président de la Confédération africaine, Issa Hayatou, qu'elle accuse d'avoir «traficoté» dans le contrat par lequel le groupe français Lagardère aurait acquis les droits de retransmission de la CAN et des compétitions des clubs sur la période 2017-2028. Le responsable de la CAF s'est vite défendu par le biais d'un communiqué dans lequel il déclare que ledit contrat a été monté et paraphé dans une totale transparence au profit de la CAF et du football africain. Un contrat qui rapporterait à cette dernière la somme de 1 milliard de dollars. Il faut dire que cela fait un bail que Sportfive, la filiale de Lagardère, règne en maître sur le football continental. Tout ce qui touche aux droits de retransmission de télévision passe par elle. On se souvient de l'histoire de la retransmission du match de qualification à la Coupe du monde 2014 entre le Burkina Faso et l'Algérie qui s'était déroulé en octobre 2013 à Ouagadougou. Ce jour-là, cette confrontation était passée en direct à la télévision algérienne alors que celle-ci n'avait pas acquis les droits qui appartenaient à la chaîne qatarie Beinsport. Cette dernière, une fois le match terminé, avait fait passer sur son écran un message écrit au stylo sur une feuille de papier dans lequel elle accusait la télévision algérienne d'avoir piraté ses images. Quelque temps plus tard, on apprenait que Beinsport allait poursuivre en justice la télévision algérienne. Il faut savoir que le football africain et son évènement majeur, la CAN, suscitent un énorme engouement auprès des télévisions du monde entier. La CAF cherche à en tirer le maximum de bénéfices, ce qui est tout à fait normal, à la condition, bien sûr, que toutes les transactions s'opèrent dans la transparence, sachant que le football mondial est de tout temps secoué par des scandales financiers et que nombre de ses dirigeants (parmi eux Issa Hayatou) ont fait l'objet de sanctions disciplinaires. Au début de l'été dernier, la France avait accueilli la phase finale de l'Euro. Les droits TV pour la France avaient été acquis par Beinsport, TF1 et M6 qui avaient déboursé pour cela la somme de 110 millions d'euros. La moitié avait été payée par la chaîne qatarie, le reste étant à la charge de TF1 et de M6 pour assurer la mission de service public en clair sur le territoire français afin que les images de l'évènement soient accessibles à tous. Les responsables des télévisions françaises indiquaient alors que «cette mesure vise à protéger le contribuable au milieu d'une offre de services tv de qualité mais de plus en plus cryptée. «Peut-on croire que les télévisions des pays africains peuvent assurer cette mission de service public ? Non, si on voit comment elles gèrent le dossier de la CAN 2017. Il se dit que la retransmission de chaque match du premier tour de la CAN se monnaye autour d'une somme comprise entre 1 et 2 millions de dollars. Ce chiffre augmente en fonction du niveau de compétition, à savoir que pour un quart de finale, vous paierez plus, et ainsi de suite jusqu'à la finale. Cette façon d'agir de la part de Beinsport est d'autant plus énigmatique que l'on a appris qu'il y a à peine quelques semaines de cela, elle a vendu les droits de la CAN 2017 et ceux de la CAN 2019 à la chaîne Eurosport pour la modique somme de 600 000 dollars. Une vraie gifle pour le football africain et aux télévisions de ce continent. Depuis quelques années, l'Union africaine de radiodiffusion se bat pour que l'évènement footballistique continental numéro 1 puisse être vu par un maximum de personnes à travers l'Afrique. Il apparaît clairement que les télévisions africaines ne sont pas assez riches pour obtenir ces droits tant espérés et assurer convenablement leur mission de service public. Qu'un Africain doive passer par une chaîne de télévision qui n'est pas de son continent pour suivre les péripéties d'équipes nationales de pays authentiquement africains, voilà le scénario que nous proposent aujourd'hui la CAF et le groupe Lagardère. Une bien mauvaise histoire.