Le cauchemar continue pour les souscripteurs Aadl. Longtemps restés à attendre impatiemment la réception de leurs clés depuis 2001 pour la plupart et depuis 2013 pour les plus récents, ils sont aujourd'hui, 16 ans plus tard pour certains, en train de subir une «injustice sans précédent». Après avoir transmis une lettre de doléances au président de la République il y a une semaine, ils sont venus nombreux tenir un sit-in devant la Direction de l'Aadl sise à Saïd Hamdine, où ils ont crié leur ras-le-bol de cette situation qui n'a que «trop duré». «Chaque jour, le ministère de l'Habitat nous impose une nouvelle loi, il nous prend pour des rats de laboratoire ; un jour nos dossiers sont validés puis le lendemain ils t'avisent de ton expulsion de la liste des bénéficiaires», s'indignent-ils. Le département de Tebboune, en lançant une succession d'enquêtes auprès des demandeurs de logements, a mis sur la paille un grand nombre d'entre eux. Ces contrôles, s'ils ont réussi à détecter quelques «demandeurs-fraudeurs», ont tout de même causé du tort à un grand nombre de souscripteurs. Plusieurs cas sont à citer, comme celui des personnes qui ont été recalées voire même sur le point d'être expulsées de leurs appartements acquis car ayant bénéficié d'un héritage familial. «Si nous avons eu droit à un bien familial, cela ne nous empêche pas de demander un logement», affirment les protestataires. «Nous devons alors tenir en vie coûte que coûte nos parents et nos grands-parents pour qu'ils ne nous lèguent aucun bien et ainsi nous pourrons formuler des demandes de logements sans crainte», ironisent-ils. La loi est claire pourtant à ce propos. Les conditions d'éligibilité telles que définies par le décret N°01-105 du 23/04/2001 modifié et complété fixant les modalités d'acquisition du logement dans le cadre de la formule location-vente note ce qui suit : «Le postulant ne possèdant pas ou n'ayant pas possédé en toute propriété, ni lui, ni son conjoint, un lot de terrain à bâtir, un bien à usage d'habitation, et n'ayant pas bénéficié, ni lui, ni son conjoint d'une aide de l'Etat en vue de la construction ou de l'acquisition d'un logement». En aucun cas, donc, l'héritage n'est cité. «Tebboune nous pousse à frauder» Selon plusieurs souscripteurs, «il y a une volonté de nous démoraliser avec toutes ces exigences parachutées de nulle part pour nous faire reculer». Ils réclament d'ailleurs à leur agence des explications sur les motifs de blocage des dossiers et sur le retrait des noms de bénéficiaires sur les listes Aadl. Cette agence leur avait demandé, rappellent-ils, d'actualiser leurs dossiers. Beaucoup d'entre eux avaient, cependant, changé de travail depuis le dépôt de leurs premiers documents et d'autres étaient victimes de leurs employeurs qui ne les ont pas déclarés. Et c'est là que tout bloque. «Tebboune nous pousse à frauder et à falsifier des documents en nous demandant de justifier l'injustifiable», se lamentent les protestataires. «À partir du moment où nous avons nos justificatifs de revenus et que nous sommes à jour dans le paiement des tranches du prix du logement, nous ne comprenons pas pourquoi ce blocage», s'indigent-ils. Autre désagrément causé par l'actualisation des dossiers, demandée même après acquisition du logement, c'est l'âge du demandeur. La direction générale de l'Aadl a mentionné dans des réponses aux recours que ceux parmi les demandeurs nés avant l'année 1946 doivent payer la totalité du prix du logement Aadl, soit 200 millions de centimes à la remise des clés. Aussi absurde soit-elle, cette exigence imposée aux retraités est justifiée par l'entreprise par «le risque de mortalité très élevé chez cette catégorie de citoyens». «Nul ne peut échapper à la mort, enfants, jeunes, vieux… n'importe qui peut mourir à n'importe quel moment», diront-ils. «Il fallait, par exemple, exiger une assurance remboursement en cas de décès en déposant l'assurance-vie auprès de leurs agences, voire même une caution solidaire d'un membre de la famille qui se porterait garant du remboursement du prix du logement le cas échant», citent-ils pour exemple. Décès d'un bénéficiaire de l'Aadl après son expulsion Les souscripteurs ont réclamé haut et fort, hier, le départ du ministre de l'Habitat et ont «exigé l'intervention du président de la République pour résoudre cette injustice». Un cri de détresse, disent-ils, poussé après le décès lundi dernier d'un retraité de 60 ans qui a été appelé à quitter son domicile sis à Sidi Abdellah car ayant bénéficié d'un héritage légué par ses parents.