La ville de Tlemcen est connue pour les tenues de la mariée «Echedda» et les mariages traditionnels, où l'on voit hommes, femmes, jeunes et moins jeunes chanter en chœur. Dans cette ville, l'andalou s'apprend naturellement en famille. A Tlemcen, le chant andalou est tellement pratiqué qu'on peut facilement trouver des chanteurs très doués avec de très belles voix et qui ne rêvent jamais de devenir célèbres. Pour eux, la chanson est quelque chose de naturel qui se pratique quotidiennement. D'ailleurs, les chanteurs de hawzi, venant d'autres villes telles qu'Alger ou Blida, pour animer des soirées de mariage s'étonnent de voir tous les invités, femmes et hommes, chanter avec eux en chœur. Ces derniers connaissent pratiquement toutes les chansons. Il faut rappeler que Tlemcen a toujours eu de grands maîtres de l'andalou et du hawzi, et certains d'entre eux, bien qu'ils aient de grandes connaissances n'ont jamais été intéressés par les enregistrements de disques et la célébrité préférant se consacrer à la formation des jeunes. Bensari, le grand maître Si aujourd'hui, Tlemcen est représentée surtout par des chanteurs et chanteuses tels que Brahim Hadj Kacem, Meriem Benalla et le maître du hawzi Mohamed Ghafour, cette ville nous fait toujours penser à Cheikh Larbi Bensari qui, paraît-il était le dernier à connaître les 24 noubas de l'andalou. Certains musicologues ont affirmé que l'histoire de l'existence des 24 noubas n'est qu'une légende, d'autres y croient toujours. Né en 1872 (ou avant ?) Larbi Bensari n'aurait pas été invité par les premiers directeurs de la RTA à enregistrer. Les motifs sont inconnus. Ils ne savaient peut-être pas que c'était une urgence d'enregistrer le grand maître avant sa disparition. Il faut dire aussi, qu'à cette époque, les producteurs avaient trop délaissé notre patrimoine au profit des chansons égyptiennes qui étaient à la mode. De Tlemcen, le grand public ne connaît pratiquement qu'Abdelkrim Dali pour ses passages réguliers à la télévision le jour de l'Aïd. Découvert par Cheikh Omar Bekhchi, Dali avait été encouragé par Abdesslam, le frère de Larbi Bensari qui l'encouragera et l'invitera à faire partie de son orchestre. Très doué, le jeune Abdelkrim montrera ses capacités vocales en reprenant des chansons d'Oum Kelthoum et de Mohamed Abdelwahab en vogue à l'époque. Par la suite, il sera remplacé par Rodhouane le fils le plus doué de Larbi Bensari. Il fera alors partie de l'orchestre de Cheikha Tetma qui ne cessait de faire parler d'elle. La rupture avec Larbi Bensari est motivée par le fait que le grand maître a choisi son fils Redhouane pour l'accompagner au Congrès de la musique arabe au Caire en 1932. Ce choix n'est sûrement pas motivé par le népotisme, car les mélomanes reconnaissent que Redhouane est le plus grand chanteur tlemcénien après Cheikh Larbi. Mahieddine, qui ne ratait jamais l'occasion d'enrôler dans sa troupe les artistes montants, remarque Dali lors d'une tournée et l'encourage à enregistrer son premier disque en 1930. En 1938, il fera une longue tournée à travers le territoire avec «Les tournées Mahieddine» et, en 1940, Boudali Safir, alors directeur des programmes arabes de la radio, l'invite à participer aux concerts de l'orchestre andalou. En 1952, il deviendra définitivement membre de cet orchestre. Après l'indépendance, il chantera lors des semaines culturelles algériennes à l'étranger et donnera des cours au conservatoire d'Alger, puis à l'Institut national de musique. Comme le grand maître Larbi Bensari, Dali jouait de plusieurs instruments mais préférait s'accompagner au luth. Tetma, parmi les meilleures Tetma qui est enterrée au cimetière de Sidi M' hammed à Belouizdad (Alger) sera parmi les meilleures chanteuses de hawzi aux côtés de Fadhila Dziria et Meriem Fekkai dite El Bessekria. Mâalma Yamna restera, bien sûr, inégalable. D'après de grands maîtres de l'andalou, notamment Sadek Bédjaoui, la plus grande chanteuse depuis Yamna est Nassima qui a été la première femme à enregistrer une nouba complète au début des années 1970. Il faut dire qu'il est très difficile d'écrire l'histoire de la musique de Tlemcen sans oublier quelques maîtres, car la ville connaît de nombreux chanteurs et musiciens qui n'ont pas eu la chance ou, n'ont pas voulu être médiatisés. En tout cas, à Tlemcen, certains noms tels que Sekkal, Bekhchi, Dib et Brixi sont très connus. Dans cette ville, les associations et les artistes foisonnent. La musique andalouse est pratiquée dans la plupart des familles. D'ailleurs, lors des fêtes familiales, les chanteurs n'ont pas besoin de chorale. Tous les spectateurs connaissent les textes et prennent un plaisir à suivre la mélodie.