Le scénographe, dramaturge et metteur en scène, Ziani Cherif Ayad, adapte en une pièce théâtrale, le roman «Sans voile, sans remords» (Editions Dalimen, 2012) de l'ancienne ministre de la Jeunesse et des Sports et ancienne magistrate et secrétaire d'Etat à la Solidarité nationale, Leïla Aslaoui. Traduite du français vers l'arabe dialectal (maghrébin) par le musicologue, chanteur et actuel directeur de l'Opéra d'Alger, Nourredine Saoudi, sur une scénographie signée Arezki Mellal, et mise en scène par Ziani-Cherif Ayad, la pièce «Sans voile, sans remords», produite par le TNA et la coopérative El Gosto, sera jouée par quatre comédiens et présentée au public d'ici trois mois. «On essaye de faire du théâtre à partir d'un produit qui n'était pas destiné à cet effet. Et c'est le cas pour ‘'Sans voile et sans remords'‘ qui est un récit à l'origine. Le projet de le monter en pièce théâtrale a commencé en 2013. Et ce n'est que quatre ans plus tard qu'on va réellement le lancer», a déclaré Ziani-Cherif Ayad, hier matin, lors d'une conférence qu'il a donnée à cette occasion au Théâtre national algérien Mahieddine-Bachtarzi. «D'abord, c'est une histoire touchante qui aborde notre vécu. Ensuite, en adaptant ce roman, je tiens à montrer qu'on peut remédier à la crise du texte justement en adaptant des romans, des critiques ou autres chroniques journalistiques…On peut faire du théâtre avec d'autres éléments de la culture et de la littérature et, ainsi, donner d'autres vies à ces œuvres», souligne le metteur en scène en expliquant les raisons qui l'ont poussé à adapter ce roman. «Depuis que j'ai fait ‘'El Aytaâ'‘, qui parle de la période de 1980, je cherchais une autre histoire poignante qui parle de cette même période. À travers le texte de Leïla Aslaoui, où on a l'impression que ce qu'a vécu la pays est une fiction, j'ai trouvé ce que je cherchais...» Par ailleurs, le metteur en scène s'est indigné du fait que l'Union arabe du théâtre préconise l'utilisation de la langue arabe dans les productions théâtrales. «C'est décevant d'entendre cela d'une structure dirigée par des docteurs et de grands hommes de théâtre. Ils devraient savoir que la langue du théâtre c'est l'expression artistique, corporelle, la musique, l'éclairage… et la langue qu'on utilise doit être celle où l'on s'exprime le mieux…» De son côté, Leïla Aslaoui s'est dite comblée qu'un grand metteur en scène tel que Ziani-Cherif Ayad, adopte son roman. «Je crois que ce récit, je ne l'aurais pas écrit si un certain 12 janvier 2011 je n'avais pas retrouvé, après 48 ans de séparation, une ancienne camarade de lycée. Je ne l'ai pas reconnue car elle portait un djilbab. Ce matin-là, j'étais à la rue Larbi-Ben M'hidi, à Alger, où je me dirigeais vers la Librairie du tiers monde, et soudain, j'entends une voix qui m'appelle : ‘'Lila, Lila…», et c'était elle. Je ne l'ai pas reconnue mais elle, si. Elle m'a donné des indices sur celle que j'appelle Bahidja dans mon récit. Elle est la protagoniste de mon roman que j'ai écrit pour elle.» Des mots pour exprimer des maux… «En 1963, elle m'avait dit une petite phrase lorsque nous étions toutes les deux élèves au lycée Lazerges (actuel Frantz-Fanon) et où on venait de réussir la première épreuve du baccalauréat, on était heureuses. Et soudain, elle éclate en sanglots et me dit : ‘'J'aurais aimé que ma soeur Nouria soit présente avec moi aujourd'hui, elle était moudjahida. Décédée, on n'a jamais retrouvé son corps…A l'époque, cela ne m'avait pas touchée plus que ça…et puis, ce 12 janvier 2011, j'ai eu l'impression qu'elle continuait son récit. On est restées ensemble très longtemps jusqu'au moment où elle me dit : ‘' Si mon histoire te plaît, je t'en supplie, écris-la pour me libérer de mon fardeau… Cette œuvre, pour moi, est presque une justice qui lui a été rendue. J'espère qu'elle guérira un jour», a-t-elle témoigné.