Lors d'une conférence-débat des détenus de la cause identitaire, tenue la semaine dernière à la maison de la Culture Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou, le doctorant en linguistique berbère, Mouloud Lounaouci, a affirmé que l'officialisation de tamazight dans la nouvelle Constitution algérienne n'est que «de la poudre aux yeux». Pour étayer ses propos, il a précisé qu'«il n'y a aucune volonté politique pour la promotion effective de cette langue maternelle». S'exprimant aux côtés de certains détenus des années 80, comme Saïd Sadi et Amar Zentar, Mouloud Lounaouci a indiqué que les questions linguistiques sont liées directement à la politique. C'est pour cela, dira-t-il, qu'il est convaincu que les choses sont planifiées de telle sorte que la valeur de tamazight ne soit jamais égale à l'arabe en Algérie. «Sur le marché linguistique, nous sommes perdus puisque tamazight n'a pas la même valeur que l'arabe dans la nouvelle constitution. Pour preuve, dans l'article 178 de la Constitution, stipule que l'arabe est la langue officielle de l'Etat, alors que tamazight est seulement une langue officielle», a-t-il insisté. Pis encore, il a précisé que le retard accusé dans la mise en place de la loi organique sur tamazight et son académie dont l'objectif est de vérifier la codification et les normes de cette langue est une preuve réelle que le pouvoir en place n'a pas une volonté réelle pour sa promotion. «Nous craignons que cette loi ne soit pas publiée comme ce fut le cas au Maroc qui ne l'a pas encore publiée, alors que l'officialisation de cette langue a été faite en 2011 dans ce pays». S'il y a une volonté politique, enchaîne-t-il, «il suffit d'une directive gouvernementale pour promouvoir cette langue et nous n'avons pas besoin de cette loi organique», a-t-il regretté. Devant une telle situation, Lounaouci a avoué que tamazight est «polluée», que ce soit sur le plan médiatique ou politique, ce qui est dangereux pour la pérennité de cette langue, selon ses dires. Dans le même ordre d'idées, tout en plaidant pour l'enseignement de tamazight dans les écoles en caractère latin, Lounaouci estime que le tifinagh qui est une marque identitaire amazigh, doit figurer à côté de l'arabe au niveau de l'ensemble des institutions publiques et privées. «Aujourd'hui que tamazight est langue officielle, les enseignes des édifices publics et privés doivent être obligatoirement inscrites en caractère tifinagh, au côté des caractères arabes», affirme-t-il. En outre, il a pointé du doigt le gouvernement qui est, selon lui, «à l'origine du blocage de la généralisation de l'enseignement de cette langue au niveau de l'ensemble des établissements scolaires. Les professeurs licenciés en linguistique amazighe sont au chômage. Alors je ne vois pas pourquoi cette langue n'est pas encore enseignée dans les quatre coins du pays», s'est-il interrogé. A cet effet, il a appelé les jeunes à œuvrer pour redynamiser le travail du mouvement associatif activant dans le domaine identitaire. «Il faut continuer le combat pour sauvegarder cette langue maternelle», a-t-il dit.