Le spectre de l'abstention, qui plane sur les législatives du 4 mai prochain, pousse les pouvoirs publics à investir toutes les tribunes afin de mobiliser les électeurs. Et devant l'incapacité des partis politiques à mobiliser les foules, dans une campagne électorale toujours morose, on fait appel aux mosquées du pays, implantées dans chaque ville et chaque village, pour faire ce travail. Le ministre des Affaires religieuses et des Wakfs, Mohamed Aissa a en effet adressé une instruction à toutes les directions des affaires religieuses des 48 wilayas, leur demandant de consacrer le prêche de vendredi à sensibiliser les électeurs. Ainsi, hier, dans les mosquées du pays, les imams ont fait des discours en faveur du vote le 4 mai prochain. «Les imams doivent œuvrer à convaincre et à sensibiliser les citoyens quant à l'importance des élections législatives, tout en observant la neutralité, étant donné que les lois de la République interdisent aux imams de prendre le parti d'aucune formation politique dans leurs prêches», a déclaré le ministre, avant-hier, en marge d'une session de formation au profit des imams à Alger. «Nous souhaitons que la société participe au choix de représentants compétents dans la nouvelle Assemblée nationale populaire», a-t-il ajouté, mettant l'accent sur «le rôle des imams dans la sensibilisation à cette journée décisive et importante pour le pays». Cet appel du ministre des Affaires religieuses sonne comme l'expression d'une hantise qui habite les pouvoirs publics quant à l'éventualité d'un fort taux d'abstention, qui remettrait en cause la légitimité de la future APN. Une crainte tellement forte que le Premier ministre s'implique en personne dans la campagne à travers des visites dans les wilayas où il rencontre la société civile et appelle systématiquement à un vote massif le 4 mai. Aussi, la crainte est telle que les partis du pouvoir et ceux de la périphérie n'hésitent pas à lier la stabilité et la sécurité du pays au taux de participation aux élections. Avant l'appel lancé aux mosquées, leur demandant de sensibiliser sur le vote, Mohamed Aïssa avait, il y a quelques semaines, enjoint à toutes les directions des affaires religieuses et des wakfs du territoire national de ne pas impliquer les mosquées dans la campagne pour les prochaines élections législatives. «Nous avons adressé une instruction à toutes les directions des affaires religieuses et des wakfs du territoire national de ne pas impliquer les mosquées et les écoles coraniques de la République dans la campagne électorale», avait-il déclaré. Qu'est-ce qui a alors changé entre temps ? L'appel du ministre a été différemment apprécié par les organisations des imams et des zaouïas. Selon le président de l'Organisation nationale des zaouïas, Abdelkader Bacine, l'appel de Mohamed Aïssa à la participation des mosquées dans la mobilisation des électeurs est une «position nationaliste». «Nous avons pris la même position depuis deux mois pour une forte participation aux élections en vue de leur réussite», a-t-il déclaré. Position que ne partage pas Djamel Ghoul, président du Conseil national autonome des imams. Ce dernier demande qu'on laisse les imams éloignés de la politique. A rappeler que pour le moment, une seule zaouïa a pris position pour un parti politique. Il s'agit de la confrérie Tidjaniyya, dont le chef Mohamed El-Aid Tidjani a pris fait et cause pour le FLN.