Pour Ali Benflis, «le pouvoir en place» est seul responsable «de bout en bout» de l'échec des élections législatives du 4 mai. Le taux d'abstention qui a atteint 64% est, selon le président du parti Talaie El hourriyet, la résultante logique d'une politique d'exclusion menée par les dirigeants du pays. Les résultats du vote, soutient-il, traduisent de manière éclatante la désaffection d'une société qui ne croit plus en la vertu des échéances électorales, tellement ces dernières ont été de tout temps perverties. Le scrutin du 4 mai n'est dans ce contexte qu'«un simulacre de compétition», a-t-il affirmé lors d'une conférence de presse tenue, hier, au siège de son parti à Alger. Très critique, l'ancien chef de gouvernement a accusé le régime politique d'avoir biaisé totalement ces élections en les présentant comme «le miroir réfléchissant de la stabilité politique et institutionnelle du pays». «Notre régime politique a son propre lexique politique. Ce qu'il appelle la stabilité politique et institutionnelle n'est pour le commun des mortels que de l'inertie et de l'immobilisme qui se propagent du sommet de l'Etat à tous les autres segments institutionnels de la République», soutient encore le président du parti Talaie El Hourriyet qui est, rappelle-t-on, parmi les seuls partis à avoir appelé au boycott des élections au côté de Jil Jadid, parti de Soufiane Djilali. Lors de son intervention, Ali Benflis a estimé cependant que «le régime en place n'a pas eu ce qui comptait le plus pour lui et qu'il désirait de toutes ses forces que le peuple algérien joue les faire-valoir et accepte de lui servir de faux témoin, d'alibi et de caution». En fait, Benflis voit, dans le taux d'abstention record, le refus de la population de cautionner les pratiques politiques d'un régime en total décalage avec les attentes et les aspirations de la société. D'où viendra donc la légitimité même douteuse de la future instance législative ? Sur quelle base pourra-t-elle prétendre à la représentativité ? Et quelle sera la source de la crédibilité dont elle pourrait abusivement se prévaloir ? s'interroge-t-il. «Les abstentionnistes ont formé le parti le plus puissant et le plus représentatif du pays avec 15 millions d'adhérents», a-t-il affirmé. S'ajoute à cela le nombre très élevé de bulletins nuls. «Le parti du vote nul est la seconde force politique du pays. S'il pouvait lui aussi être représenté à l'Assemblée, il y compterait près de 200 sièges et il pourrait légitimement prétendre à diriger le gouvernement», ironise le conférencier en se demandant pourquoi le Conseil constitutionnel a revalidé plus de 350 000 bulletins nuls, arrêtant ainsi leur nombre à plus de 1 750 000, alors que le ministère de l'intérieur a compté plus de 2,1 millions de bulletins nuls. «Comment une si grosse erreur a-t-elle pu échapper à la vigilance des services du ministère de l'Intérieur ? Et quel usage a-t-il été fait de ce nombre considérable de voix ?», enchaîne Benflis, avant de s'attaquer aux partis du pouvoir en estimant qu'ils n'ont aucune légitimité. «Le parti (FLN ndlr) arrivé en tête du scrutin n'a recueilli que 7% de l'électorat. Le parti arrivé en deuxième position (le RND) n'a obtenu quant à lui que 4% de l'électorat. A elles deux, ces formations totalisent un peu plus de 11% du corps électoral. Pourtant, ce sont elles qui gouverneront, qui feront les lois et prétendront parler et agir au nom du peuple algérien dont les électeurs leur ont refusé leurs suffrages à plus de 89%», a dit encore Ali Benflis.