Le général Pierre de Villiers a démissionné le mercredi 19 juillet. Il a été remplacé par le général François Lecointre, qui occupait la position de chef du cabinet militaire du Premier ministre. C'est la conclusion, logique, du conflit qui l'opposait au président de la République. Dans une démocratie «les armes cèdent à la toge» (1), et le pouvoir civil l'emporte sur le militaire. Mais, cette décision extraordinaire, car c'est la première fois depuis 1958 qu'un chef d'état-major des armées démissionne, est loin de mettre fin au conflit qui oppose les forces armées au président. Cette démission, par ailleurs, entache le quinquennat d'Emmanuel Macron de manière indélébile. La démission du général de Villiers est logique. Il le dit lui-même dans le texte du communiqué qui a été diffusé le mercredi 19 juillet: «Dans les circonstances actuelles, je considère ne plus être en mesure d'assurer la pérennité du modèle d'armée auquel je crois pour garantir la protection de la France et des Français, aujourd'hui et demain, et soutenir les ambitions de notre pays. Par conséquent, j'ai pris mes responsabilités en présentant, ce jour, ma démission au Président de la République, qui l'a acceptée». Mais, la phrase qui précède est tout aussi importante: «Dans le plus strict respect de la loyauté, qui n'a jamais cessé d'être le fondement de ma relation avec l'autorité politique et la représentation nationale, j'ai estimé qu'il était de mon devoir de leur faire part de mes réserves, à plusieurs reprises, à huis clos, en toute transparence et vérité». On connaît l'origine du conflit: les 850 millions que le gouvernement, et donc le président, entendent prélever sur le budget de la Défense. Or, le budget, avant ces coupes claires, était déjà notoirement insuffisant, ce que Emmanuel Macron avait lui-même reconnu. Le général de Villiers s'est exprimé sur ce sujet devant la Commission aux Forces armées de l'Assemblée nationale. C'était son droit, c'était même son devoir de tenir informée la représentation nationale. En tant que chef d'état-major des armés, il doit dire quand il considère que des coupes budgétaires mettent en péril la capacité des forces armées à remplir leurs missions. Ce n'est donc pas lui qui a porté «sur la place publique» ce débat. C'est ce que le général de Villiers rappelle dans la seconde phrase citée. Le fait que la ministre de la Défense, Mme Florence Parly, soit restée silencieuse durant toute cette crise nous dit aussi quelque chose sur le fonctionnement de «l'équipe Macron». C'était à elle de porter en premier ces revendications. Devant son silence, le chef d'état-major n'avait d'autre choix que de prendre la parole. Le fait que le président ait pris la déclaration du général Pierre de Villiers devant cette Commission pour un acte contestant son autorité, alors qu'il s'agissait de l'exercice normal de la démocratie, nous en dit aussi long - et même très long - sur le caractère et l'irascibilité du chef de l'Etat. Ce fait nous est aussi parlant sur son respect (ou plus exactement son non-respect) des procédures démocratiques les plus élémentaires.