Les sombres perspectives de la croissance économique mondiale vont encore impacter négativement la production, la consommation et les prix de l'or noir. Le sommet interministériel des pays OPEP et leurs alliés, qui s'est tenu avant-hier à Saint-Pétersbourg, en Russie, ne peut agir sur un marché complètement grippé par un net recul de la croissance. «Il faut se rendre à l'évidence : c'est le marché qui fixe les quotas de production de l'or noir et les décisions de l'OPEP, et non pas l'inverse. Seul le marché pose ses conditions et fixe les prix», tranche Abdelmadjid Attar. Le Temps d'Algérie : Comment évaluez-vous les conclusions du sommet de Saint-Pétersbourg regroupant les pays OPEP et non-OPEP ? Abdelmadjid Attar : C'est un non-événement. Comme attendu, et sans surprise, aucune décision sérieuse et importante n'a été prise. La seule chose que le sommet de Saint-Pétersbourg ait obtenue est l'engagement du Nigeria et de la Libye de réduire, eux aussi, leurs productions une fois que celles-ci auront atteint, dans le cas du Nigeria, 1,8 million de barils/jour (b/j), et de 1,2 million de b/j pour la Libye. C'est vous dire que cette réunion, la énième du genre, ne peut et ne pourra impacter, de quelque manière que ce soit, le marché mondial du pétrole et, de façon plus générale, le marché énergétique mondial. Vous semblez pessimiste… Plutôt réaliste. Je vous renvoie aux seules lois du marché. La conjoncture mondiale actuelle renseigne de manière claire et précise sur la physionomie du marché pétrolier. Il y a une chose qu'on doit tirer, non pas du sommet de Saint-Pétersbourg, mais de la situation économique mondiale et, à plus forte raison, de la consommation énergétique mondiale. Il faut se rendre à l'évidence : c'est le marché qui fixe les quotas de production de l'or noir et les décisions de l'OPEP, et non pas l'inverse. Seul le marché pose ses conditions et fixe le niveau de la production. L'OPEP et ses alliés n'y peuvent rien. Bien sûr, à cela s'ajoutent d'autres facteurs qui aggravent la situation des pays dépendant des recettes pétrolières, dont l'Algérie. D'abord, il y a les Etats-Unis. Si dans le passé, les USA contribuaient largement au maintien d'une consommation importante, la donne a complètement changé ces dernières années. Le géant américain se suffit désormais à lui-même puisqu'il assure sa sécurité énergétique sans recourir au marché mondial. Ensuite, il y a cette tendance mondiale à se tourner vers l'efficacité énergétique. Nous consommons de mieux en mieux intelligemment et cela ralentit forcément la croissance de la consommation des ressources énergétiques, à commencer par le pétrole. Remarquez, aujourd'hui, que même les plus grands producteurs de pétrole, comme l'Arabie Saoudite, se tournent vers les énergies alternatives. L'investissement dans les énergies renouvelables est de plus en plus visible, de plus en plus sûr, de plus en plus durable. Le pétrole, bien qu'il soit encore incontournable, ne peut espérer, dans ces conditions, maintenir sa place de choix d'antan. Aujourd'hui il y a une mutation des modèles de consommation énergétique dans le monde qui est en train de freiner la croissance de la consommation des hydrocarbures et principalement du pétrole. Quel était dans ce cas l'objectif recherché à travers le comité de suivi interministériel des pays de l'OPEP et des pays non-OPEP ? Les pays de l'OPEP et leurs amis savent ces conditions. Ils connaissent mieux que quiconque la situation et les développements de la consommation énergétique mondiale. Je crois que la réunion de Saint-Pétersbourg, mais également celles qui l'ont précédée, avait pour seul objectif de stabiliser les prix du pétrole en faisant en sorte que ceux-ci ne descendent pas en dessous de 40 dollars. Maintenir les prix autour de 50 dollars le baril de pétrole, en 2017 et 2018, serait déjà un exploit. L'or noir à 70 dollars, c'est fini. A moins d'un bouleversement majeur, un événement grave dans le monde, dans le Moyen-Orient par exemple, et qui impliquerait à la fois, l'Arabie saoudite, l'Iran, l'Irak et les Emirats, je doute fort que les prix remontent à des niveaux élevés, du moins pas avant les cinq années à venir. Encore une fois, le monde est en crise. La croissance économique est grippée. Le taux de croissance de la Chine qui était à deux chiffres est aujourd'hui à son niveau le plus bas depuis ces dernières années. Au final, quelle est l'utilité de ce comité ? Il faut que ce comité continue à faire son travail de surveillant, ne serait-ce que pour maintenir une certaine discipline au sein de l'OPEP.