Les acteurs du secteur de la pêche assistent depuis plusieurs années maintenant à un phénomène qui, à terme, risque d'anéantir certaines espèces, notamment la sardine, du paysage marin algérien et méditerranéen. Pour alerter l'opinion publique et dans une tentative d'amener les autorités concernées à mettre définitivement un terme à la surpêche et surtout à l'utilisation de méthodes prohibées, le président du Comité national des marins pêcheurs et des poissonniers (CNMPP), Hocine Bellout, dresse un diagnostic qui donne froid dans le dos. Car, selon lui, si le citoyen lambda apprécie le fait que la sardine soit cédée à 200 DA sur les marchés, il a insisté pour faire savoir que cela se fait au détriment de cette espèce, désormais menacée d'extinction. Dans un entretien à l'APS, le professionnel explique que cette tendance baissière des prix depuis plus de deux mois, est le résultat du non-respect des normes et lois en vigueur de la part des pêcheurs, à la faveur d'un déficit de contrôle de la part des services concernés. Selon lui, les prix des poissons vendus ont baissé en raison de leur petite taille, atteignant parfois 5 cm la pièce seulement, les pêcheurs se rabattant sur des spécimens jeunes vu l'amoindrissement général des poissons dans les eaux côtières. Les poissons s'amenuisent en Méditerranée à cause d'une pêche intensive et inconsciente, de la pollution des eaux, en plus des flux migratoires vers d'autres mers, a-t-il expliqué. Les pêcheurs, pour leur part, bravent plusieurs interdits dans leur activité, a signalé Bellout, citant le non-respect des périodes de repos biologique, la recrudescence de la pêche à la dynamite, la pêche utilisant des filets interdits et le non-respect des tailles marchandes. Pour ce qui est du non-respect des périodes de repos biologique, il représente un grand danger pour la pérennité des espèces puisqu'il génère progressivement leur extinction, les chalutiers pêchant les poissons durant la période de reproduction et de ponte. Durant cette période s'étalant du 1er mai au 31 août, les pêcheurs n'épargnent pas les fonds marins en y chalutant même dans la zone dite «zone une», située dans les profondeurs marines, à 0,3 mile marins, que les poissons rejoignent afin d'y déposer leurs œufs. Le président du CNMPP a également affirmé que les filets interdits à la pêche tel les filets dérivants, les filets à quatre bras, les filets invisibles et ceux interdits en fonction de la taille de leurs mailles sont largement utilisés en dépit de la loi. Pour ce qui est du non-respect des tailles marchandes, cela représente également une menace directe puisque les poissons des différentes espèces sont empêchés d'atteindre la maturité nécessaire et propice à la reproduction. «Le décret exécutif du 18 mars 2004 fixant les tailles minimales marchandes des ressources biologiques interdit formellement de pêcher, entre autres, des sardines dont la taille n'atteint pas les 11 cm», a indiqué Bellout. Or, des sardines ne dépassant pas les 4 cm se vendent actuellement sur le marché, a-t-il poursuivi, ajoutant que l'espèce est pourtant «en voie d'extinction». Ces jours-ci, des poissons de différentes catégories atteignant seulement 5 à 6 cm sont pêchés et ramenés en grande quantité. Le texte du décret exécutif fixe les tailles éligibles à la pêche pour les poissons, certes, mais également pour les mollusques et les crustacés.